Le Jura : la montagne qui refusait le chemin de fer.

À titre d’exemple et d’introduction : la ligne centrale du Jura reliant Andelot à La Cluse, dite « Ligne des Hirondelles », d’après un magnifique document « carnet et schémas » SNCF qui doit se déguster avec soin et expertise.
Le réseau ferré de la chaîne du Jura, d’après un document SNCF de 2017. La forme géographique de la chaîne montagneuse est ajoutée en gris clair.

Le massif montagneux du Jura a un chemin de fer très particulier du fait de sa morphologie géologique et géographique interdisant toute ligne la traversant d’est en ouest, et autorise seulement des lignes longitudinales nord-sud logées dans les vallées, presque toutes orientées dans le sens de la chaîne et de ses plis.

Les trois départements occupant partiellement les montagnes de la chaîne sont ceux du Doubs et du Jura, qui font partie de la Franche-Comté historique, et aussi celui de l’Ain qui, non franc-comtois et en bressan, possède les plus hauts sommets du Jura, dont le Crêt de la Neige (1723 m). Si nous consultons notre livre « Toutes les lignes et toutes les gares de France en cartes » (Éditions LR-Presse) contenant les 90 cartes historiques ferroviaires Pouey des départements de France et localisation des 12.000 gares de 1933, on en retire les informations suivantes :

Le département du Doubs.

Historiquement, ce département Franc-Comtois est entièrement desservi par le réseau du PLM, bien qu’il ne soit pas éloigné du réseau de l’Est et que cinq lignes Est y aboutissent directement. La vallée du Doubs, le pays de Montbéliard et l’axe nord-est du département sont très actifs, et le reste est situé en altitude avec des hauts plateaux et des montagnes rendant difficile le passage vers la Suisse et défavorables pour ce qui est de la construction de lignes pour le chemin de fer.

La ligne PLM de Bourg à Mouchard (110 km) longe, par l’ouest, le bas des montagnes du Jura et elle est, de fait, créatrice en 1864 de l’axe Lyon-Strasbourg, par Besançon et Belfort. À l’époque, pourtant, Besançon ne se destinait pas à ce rôle, se tournait vers Paris et le PLM et elle est déjà desservie dès 1858 par la ligne de Dôle à Belfort (141 km).

L’importante « Transjurassienne » Dôle-Vallorbe (145 km), au profil sévère, est ouverte entre 1855 et 1915 et traverse le sud du département du Doubs à partir de Boujeailles, ainsi que son embranchement vers Pontarlier. En direction de la Haute-Saône, département franc-comtois, mais hors du massif montagneux du Jura, la ligne Besançon-Vesoul (63 km) est ouverte en 1872 et complète un embranchement par Marnay jusqu’à Gray ouvert en 1859.

En 1884, la difficile transversale Besançon-Le Locle (74 km) est ouverte et atteint la Suisse par un parcours sinueux et presque en rampe continue avec quelques paliers sur les hauts plateaux. En 1885, cette ligne reçoit le court embranchement de L’Hôpital-du-Grosbois à Lods (25 km) desservant la vallée de la Loue en contrebas du plateau, et, enfin, en 1888, la ligne est raccordée à celle de Pontarlier à Gilley (23 km), sur les hauts plateaux. N’oublions pas la courte ligne de Voujeaucourt à St-Hippolyte (27 km) qui est ouverte en 1886 et qui survit grâce à son service marchandises aléatoire jusqu’à Pont-de-Roide.

Toutefois, il reste des lacunes, et quelques 200 km de lignes d’intérêt local et en voie métrique sont construites par un assez grand nombre de petites compagnies, courageusement et avec difficulté, vu le relief ingrat. Tout commence dans le pays de Montbéliard, avec la Société du Tramway de la Vallée d’Hérimoncourt (TVH) qui dessert les usines Peugeot avec un Audincourt-Hérimoncourt (7 km) en 1887 étendu jusqu’à Valentigney, Mandeure, Montbéliard sur de faibles distances jusqu’en 1924.

Plus au centre du département, sur les hauts plateaux, la Compagnie d’Andelot à Levier (AL) ouvre sa ligne (21 km) en 1901, puis descend jusqu’à Salins (12 km) en 1928. La Compagnie des Tramways de Pontarlier à Mouthe (30 km) ouvre sa ligne en 1900, toujours sur les hauts plateaux. La Compagnie des Chemins de fer Vicinaux (CFV) relie Besançon à Vesoul en 1911, une des rares à ne pas se lancer à l’assaut des plateaux et de la montagne et à se diriger vers l’ouest : elle n’a que 19 km dans le Doubs, le reste étant en Haute-Saône. La Compagnie des Chemins de Fer Régionaux de Franche-Comté (RFC) ouvre sa ligne de Morteau à Maîche (34 km) en 1905, puis à Trévillers (11 km de plus) en 1908 sur les plateaux. La Compagnie des Chemins de fer du Doubs (CFD) ouvre en 1910 sa ligne de Besançon à Amathay (47 km), puis à Entreportes en 1930 (19 km), la même année 1930 que celle de Levier à Pontarlier (23 km), après avoir ouvert celle de Mouthe à Foncine-le-Haut (12 km) en 1927, desservant ainsi les hauts plateaux.

La situation actuelle a gommé tout ce qui est métrique avant la Seconde Guerre mondiale, mais les lignes en voie normale ont plutôt bien résisté et sont actives et électrifiées, sauf pour les petites lignes Pontarlier-Gilley, Besançon-Vesoul (ressuscitée néanmoins depuis jusqu’à la nouvelle gare TGV), Besançon-Gray, et  la ligne de Pont-de-Roide.

La carte Pouey du Doubs en 1933. En rouge : le « grand chemin de fer », ici le PLM en l’occurrence. Le réseau de l’Est est en bleu, mais ne pénètre pas dans le département du Doubs.
La gare du Frambourg, dans la « cluse » (passage resserré entre deux vallées) de Joux, près de Pontarlier. Les voies uniques de Neuchâtel et de Vallorbe sont côte à côte.
Le BV de la gare de Pontarlier vers 1910. Style massif pour un bâtiment devant affronter les rigueurs des longs hivers comtois.

Le département du Jura.

Ce département a, sans nul doute, celui des deux qui a le plus souffert, sur le plan ferroviaire, de la présence de ce que l’on appelle localement la « Montagne ». Le relief jurassien impose soit de contourner et de longer la chaîne montagneuse en restant dans les plaines entourant le Jura, soit de ne pénétrer que sur les hauts plateaux par les « reculées » (vallées en cul-de-sac) , soit enfin d’affronter aussi la partie montagneuse et de suivre des plis et des vallées orientées approximativement, nord-sud alors que tout l’intérêt d’une ligne réside dans la traversée d’est en ouest et vers la Suisse.

Traverser le Jura dans le sens est-ouest, ou disons France-Suisse, est très difficile. Le toujours prudent PLM ne s’y risque qu’à pas comptés. La ligne de Mouchard à Bourg-en-Bresse (une partie de l’axe Lyon-Strasbourg) desservant cette préfecture de l’Ain (113 km) et desservant aussi Lons-le-Saunier (préfecture du Jura) en 1862 reste bien au pied des montagnes. La préfecture du Jura, Lons-le-Saunier est naturellement prévue pour devenir un nœud ferroviaire. La ligne de Saint-Germain-du-Plain à Lons-le-Saunier (65 km) est ouverte en 1871 et assure une relation vers la plaine de la Saône et Chalon par Louhans, celle de Saint-Jean-de-Losne (60 km) aussi en 1905, et celle montant courageusement sur le premier plateau jurassien et Champagnole (44 km) ouverte en 1891 (voir l’article consacré à l’absurde gare de Conliège sur ce site-web) vient terminer le tout : l’étoile de Lons a mis du temps à briller, et ne durera guère, perdant peu à peu ses petites lignes et devenant une simple gare de passage.

La grande affaire sera la ligne internationale, seule grande transversale ayant vaincu la chaîne montagneuse du Jura, de Dijon à Dôle et Vallorbe (145 km), construite entre 1855 et 1915 et empruntée désormais par de nombreux grands trains internationaux. Une ligne compliquée lui sera embranchée à Andelot, celle de La Cluse à Andelot (123 km) dont la construction dure de 1867 à 1912 pour un itinéraire difficile, et passant par St-Claude et Morez.

Dole prendra de l’importance avec la ligne vers Besançon et Belfort (141 km) ouverte en 1858, et complétera son étoile avec les modestes lignes vers Chagny (80 km) par Allerey en 1871, vers Poligny (39 km) ouverte en 1884 pour le bonheur du président de la République, Jules Grévy, qui l’utilise chaque semaine pour rentrer dans son village natal Mont-sous-Vaudrey et sa modeste maison de campagne. Un autre ligne vers Gray par Pesmes (55 km) ouverte en 1901.

Pour ce qui est de la voie métrique du département du Jura, la Compagnie Générale des Chemins de fer Vicinaux du Jura (CFV) s’attaque courageusement au problème, et ouvre l’importante et belle ligne transversale de Lons-le-Saunier à Saint-Claude (68 km) en voie métrique, ceci en 1898, complétée par un embranchement desservant Orgelet et Arinthod (28 km) en 1901, et un autre desservant les deux Foncines (45 km) en 1907, et enfin un troisième de Clairvaux-les-Lacs à Saint-Laurent-du-Jura et Foncine-le-Bas (41 km) la même année.

Elle se tourne aussi vers la montagne et ouvre aussi la ligne de Champagnole à Foncine-le-Bas (23 km) en 1924, et en traction électrique 1500 v, avec embranchement de Sirod à Boujeailles (29 km), une gare située sur la grande ligne de Dijon à Vallorbe.

Notons aussi l’ouverture d’une ligne de Dôle à Gray (27 km) en 1901 par les CFV de Haute-Saône, d’Andelot à Levier (8 km) en 1901 et à Salins (12 km) en 1928, de Pontarlier à Foncine-le-Haut (42 km) en 1912, et surtout la très intéressante ligne internationale en voie métrique et électrifiée de Morez à Nyon (27 km) par La Cure et St-Cergue dont il sera question à la fin de cet article.

Aujourd’hui, toute la voie métrique du département du Jura a disparu. Le massacre a eu lieu entre 1933 et 1958 (il s’agit en 1958 de la partie française du Morez-Nyon, la partie suisse étant plus que jamais active !), mais l’ensemble des grandes lignes reste en place. Toutes les petites lignes en voie normale des étoiles de Lons-le-Saunier et Dôle ont cependant disparu.

La carte Pouey du Jura, toujours en 1933. Le PLM en gros trait rouge, et les secondaires en trait fin noir.
L’arrivée du train des CFD en voie métrique, en provenance de Lons-le-Saunier à Saint-Claude, au faubourg des Étapes.
La gare CFD en voie métrique de Clairvaux-les-Lacs.
En gare de Lons-le-Saunier en 1957, avec un X-2800 bleu en attente de départ. La jolie marquise du quai est typique du PLM.
La ligne de Lyon à Strasbourg qui longe prudemment le massif du Jura sans s’y risquer, passant par les départements de l’Ain, du Jura et du Doubs avant de pénétrer en Alsace par Belfort. Entre Arc-et-Senans et Mouchard, elle fait plateforme commune avec la « Transjurassienne » Dôle-Andelot-Vallorbe. Document datant des années 1960.

Le département de l’Ain.

Ce département offre un relief plus facile pour les voies ferrées, ayant une importante partie en plaine et beaucoup de petites collines, sauf pour la partie montagneuse à l’est avec la chaîne du Jura située près de Gex qu’elle domine de toute sa hauteur. Le département de l’Ain s’étend au nord-est de Lyon, et forme un très ancien carrefour de passage, dès l’époque romaine, entre Lyon, Genève, la Savoie, la vallée de la Saône, cette disposition lui valant d’avoir un réseau ferré assez consistant avec, en 1934, plus de 450 km de voies. La compagnie du PLM ainsi que celle des Dombes et du Sud-Est sont constructrices du réseau d’intérêt général en voie normale sous la forme de deux diagonales qui sont des tronçons de la liaison Strasbourg-Lyon et Paris-Chambéry qui se recoupent à Bourg-en-Bresse, le chef-lieu du département, plus une importante liaison Lyon-Genève ayant un tronc commun avec l’une des précédentes entre Ambérieu et Culoz. Notons aussi que Bourg commande, par Nantua, l’accès aux montagnes du Jura avec la pittoresque ligne transversale desservant Saint-Claude et Morez situées dans le département du Jura. La disposition de ces grandes en lignes en diagonale n’est guère favorable pour les lignes d’intérêt local qui seront disséminées loin de Bourg, et qui relieront de nombreux villages et chefs-lieux d’arrondissement (Belley, Gex, Nantua) et des villes importantes du département (Bellegarde, Ambérieu, etc.) et des départements voisins (Mâcon, Villefranche-sur-Saône, etc.) sans former pour autant un réseau cohérent et centralisé, mais ayant le souci de desservir pas moins de 162 gares dans l’ensemble du département, donnant une bonne densité de gares au km².

Les réseaux secondaires apparaissant sur la carte Pouey sont ceux de Bellegarde à Chazery totalisant 20 km, en traction électrique, ouvert dès 1907 et fermé en 1937, et surtout de la Régie Départementale des Tramways de l’Ain (ou RDTA) avec un regroupement de plus de 400 km de lignes en 1918 dont une remarquable électrification partielle en monophasé 10.000 v 50hz autour d’Ambérieu et de Nantua. Malheureusement, ce magnifique réseau électrifié subit une fermeture en 1954, donc assez tardive grâce à son électrification, et bien après la plupart des secondaires français condamnés par leur traction vapeur et leurs faibles performances.

Aujourd’hui il subsiste toujours les deux grandes diagonales ex-PLM devenues SNCF et la liaison Lyon-Genève, très actives et électrifiées, mais la longue ligne « de pied de montagnes » Strasbourg-Lyon est désormais à voie unique sur la majeure partie de son parcours. Le département n’est pas réellement concerné par la LGV Paris-Lyon qui le longe sur l’ouest, mais bénéficie, en contrepartie, de la liaison TGV Paris-Genève dès 1981 qui dessert Bourg et qui, surtout, utilise depuis 2010 l’ancienne ligne Bourg-Genève par Nantua. Cette ligne a été récemment électrifiée et entièrement remise à niveau, et crée une liaison directe entre Paris et Genève, évitant le long détour par Ambérieu et Culoz que les premières rames TGV des débuts de ce service ont parcouru.

La carte Pouey de l’Ain en 1933, département lui aussi chasse gardée du PLM. Les réseaux secondaires (trait fin noir) sont remarquables par leur électrification très poussée pour l’époque.
La première gare PLM de Bellegarde, en style « chalet », dans les années 1860

La ou les « Transjurassiennes » possibles et réalisées.

Pour commencer, abordons la question de la grande ligne Dole-Vallorbe dite « Transjurassienne », un nom peu porté par cette ligne plutôt surnommée « la bosse » : elle résume bien l’histoire du chemin de fer franc-comtois qui est d’oser affronter la montagne jurassienne, sa neige, ses rampes, ses pièges.

La « bosse » traverse la chaîne du Jura d’ouest en est, reliant la France à la Suisse et, au-delà, au sud de l’Europe par le Simplon. Elle passe par-dessus cette redoutable barrière de hauts plateaux et de montagnes, et l’aventure de la construction de cette ligne n’a d’égale que celle de son déneigement en hiver. Mais, du piège de Salins au piège de Jougne, bien des embûches attendent les ingénieurs.

Salins est dans ce que l’on appelle localement une « reculée » qui désigne, pour les Jurassiens, les vallées formant des échancrures ramifiées prolongeant le plateau inférieur par des entailles ou des encoches dans le rebord des marches des plateaux supérieurs. Inévitablement, les reculées se terminent en cul-de-sac, et les agglomérations sont au bord de la rivière, en bas de la « reculée ». On peut se servir des reculées pour des routes restant au fond de la vallée, mais rarement pour le chemin de fer et assez difficilement, quand il s’agit de quitter la « reculée » pour passer au niveau supérieur. Passer au niveau supérieur, pour le chemin de fer, demande une rampe à flanc de coteau qui éloigne les gares de leurs villes et leurs villages toujours construits au fond de la vallée.

Le principe de la « reculée » jurassienne : les rivières (en bleu) creusent des échancrures dans le rebord du plateau supérieur pour tomber sur le plateau inférieur, souvent avec des chaines de cascades. Le chemin de fer (en rouge) doit suivre les parois de la « reculée » pour gagner de l’altitude, et même suivre les parois des vallées adjacentes des affluents de la rivière. Les agglomérations sont, elles, au niveau des rivières. et ne peuvent être correctement des services.
La gare de Conliège, village blotti en bas dans sa reculée. La ligne de Lons-le-Saunier à Champagnole doit gagner le premier plateau, tout en utilisant la reculée : forcément, en gagnant de la hauteur, elle finit par passer loin des agglomérations. (voir l’article consacré a à Conliège et sa gare, sur ce site-web)

C’est ainsi que le relief du Jura a ses plis orientés nord-sud facilitant l’établissement de lignes dans le sens de la circulation longitudinale, la circulation à travers la chaîne, celle qui intéresse la Suisse, est beaucoup plus compliquée, mais elle est cependant facilitée par une particularité du relief jurassien que l’on appelle localement une « cluse ». C’est, en quelque sorte, une ouverture entre deux vallées, ouverte par une rivière coulant d’un pli et l’ayant peu à peu creusé.

Dans l’état actuel des choses, cinq lignes françaises ont pu couper transversalement la chaîne. D’abord, le plus au sud, il y a la ligne d’Ambérieu à Culoz, qui est une partie de l’itinéraire de Paris et Lyon vers Genève, la Savoie et l’Italie, par la cluse de I’Albarine, formant la principale voie d’accès aux Alpes françaises.

Puis, en remontant vers le nord, on a la ligne de Bourg à Bellegarde à voie unique, par la cluse de Nantua, dite ligne du haut Bugey.

Ensuite, plus au nord encore, on trouve la grande ligne internationale de Dijon en Suisse, par Frasne et Vallorbe, vers Lausanne et le Simplon, avec un embranchement international important de Frasne à Pontarlier, vers Neuchâtel et Berne : elle bat le record d’altitude sur le sous-embranchement de Pontarlier à Vallorbe dont il sera question aussi.

SI l’on continue, on trouve, toujours en remontant vers le nord, la ligne internationale d’importance régionale Besançon – Le Locle, dite « ligne des horlogers ».

Pour finir, presque en Alsace et contournant le massif par le nord, on trouve la liaison directe Paris-Berne, par Delle.

Toutes les cinq sont actives même si leur existence a souvent été remise en question.

Le piège de la « reculée » de Salins-les-Bains se referme sur la ligne.

Vers 1855, lorsque les ingénieurs du PLM explorent les tracés possibles de la ligne en partant de Dijon, il n’y a aucun doute que la ligne se dirigera vers Dôle, par la plaine de la Saône et du Doubs, et gagnera ensuite les pieds du massif montagneux du Jura en escaladant les marches que sont les plateaux, allant directement droit devant elle. À Arc-et-Senans et Mouchard, elle trouve deux points de croisement importants avec la ligne de Lyon à Belfort et à Strasbourg ouverte en 1862. En 1855, deux voies ferrées sont en construction, celles de Dijon à Mulhouse et de Dole à Salins. Le 25 juin 1855, la première ligne ferroviaire franc comtoise est ouverte entre Dijon et Dole. La construction de la ligne de Dole à Salins commence en février 1856.

Mouchard est directement situé au pied même de la première marche de l’escalier des plateaux. Les ingénieurs ne connaissent sans doute pas très bien le système très particulier du Jura qui les attend. Ils songent donc à rester encore sur le niveau de la plaine de la Saône « en rez-de-chaussée » de l’escalier du Jura qui les a amenés jusqu’à Mouchard, et à passer par Salins, une ville assez importante à l’époque pour justifier une gare, sans se douter que Salins est dans une « reculée », au niveau de la plaine au pied du Jura, et bordée par les plateaux environnants sur lesquels il faudra bien monter. Autrement dit, on ne fait qu’une économie provisoire de travaux et de rampes en prenant la « reculée », et on se laisse prendre au piège.

Le chemin de fer atteint Salins en 1857, et il faut bien se décider à continuer, mais la ville est entourée de hautes parois verticales délimitant la « reculée » et correspondant au premier plateau. Les ingénieurs se trouvent face à de grosses difficultés techniques pour sortir de la « reculée » de Salins : durant toute l’année 1857, ils cherchent en vain une faille assez longue afin de pouvoir faire grimper le chemin de fer par une rampe inférieure à 30 pour mille depuis le fond de la vallée jusqu’aux plateaux jurassiens situés 200 m plus haut. Ils songent à utiliser la vallée d’une rivière au nom peu avenant de La Furieuse qui aurait permis, en passant par les villages de Champtave et Moutaine-Aresnes, de gagner progressivement Pont d’Héry et Andelot, comme le fera ultérieurement une ligne à voie métrique, mais au prix de rampes atteignant 30 pour mille, donc impropres au trafic lourd d’une grande ligne internationale. On doit finalement abandonner le tracé par Salins et essayer de grimper les contreforts du Jura à un autre endroit. Il faut faire demi-tour et revenir neuf kilomètres en arrière, c’est-à-dire jusqu’à Mouchard, et reprendre l’arpentage depuis cette localité dans une autre direction. C’est pourquoi Salins les bains, qui devait être la première ville des montagnes du Jura à obtenir son chemin de fer, restera à tout jamais un terminus d’un court embranchement de quelques kilomètres depuis Mouchard, et dont, aujourd’hui toujours, on voit les murs de soutènement et les ouvrages d’art en empruntant la route nationale qui a contribué à la mort de la ligne fermée à tout trafic ferroviaire après la Seconde Guerre mondiale.

L’inutile gare de Mesnay-Arbois, isolée, posée « nulle part ailleurs » sur la rampe de la ligne de Dole à Vallorbe, et dominant la plaine de la Saône où se trouve Arbois et sa vraie gare sur la ligne de Strasbourg à Lyon contournant le Jura. Cliché collection Jean Cuynet.

Les ingénieurs du P.L.M. choisissent en fin de compte de monter en longeant les contreforts qui surplombent Arbois et ses vignobles, en créant au passage l’inaccessible gare de Mesnay-Arbois qui domine de très haut sa ville qui sera mieux desservie par son autre gare située sur la ligne de Lyon à Strasbourg, à son propre niveau qui est celui de la plaine. Puis la ligne se trouve enfin sur le premier plateau et gagne Andelot pour poursuivre son chemin en direction de l’est et de la Suisse. Le piège de Salins a donc été contourné.

La ligne de Dijon à Vallorbe : les approches et le premier plateau.

La grande ligne qui traverse le Jura est, sur le plan national, un embranchement de la ligne impériale du PLM, embranchement qui prend naissance dans la gare de Dijon. Elle se raccorde au réseau suisse à Vallorbe, d’où les trains pourront gagner les bords du lac Léman, et remonter la vallée du Rhône en direction des grands cols alpins et de leurs tunnels. Elle est une section de l’itinéraire européen France – Suisse – Italie – Balkans par Lausanne, le Simplon et Milan.

Dès le début de son existence, elle est suivie par de nombreux rapides internationaux, dont le Simplon-Orient-Express, et par les trains circulant entre Dijon et Lausanne, ou Genève, et d’autres grandes villes de la Suisse comme Berne qui, à Frasne, prennent la sous-branche de Pontarlier, ouverte dès 1862, tandis que la variante de tracé par Pontarlier et Vallorbe, permettant un accès plus direct à Lausanne n’a été livrée à l’exploitation qu’après 1870.

Les deux branches de la ligne de Dijon à Vallorbe seront électrifiées par la SNCF à la fin des années 1950. Celle de Dijon à Dôle est en courant continu 1500 volts avec des sous-stations à Gollonges et Champvans, tandis que celles de Dôle à Vallorbe et de Frasne à Pontarlier, ont été électrifiées en courant monophasé 25.000 volts à la fréquence industrielle de 50 Hz avec des sous-stations à Champvans, commune avec le continu 1.500 volts, Arbois et Frasne. Cette électrification a été très remarquée à l’époque, notamment avec la « Commande centralisée » des mouvements imposée par la mise en voie unique pour dégager le gabarit électrique entre Mouchard et Vallorbe du fait des nombreux tunnels. Enfin, la branche de Pontarlier aux Verrières est électrifiée en courant monophasé 15.000 volts et à fréquence spéciale de 16 2/3 Hz, la traction des trains étant assurée, sur cette section, par les Chemins de fer Fédéraux Suisses.

Pour ce qui est de son histoire, la ligne est restée à double voie de Dijon jusqu’à Dôle. Au départ de Dijon, elle parcourt d’abord une région plate et monotone à travers la plaine de la Saône, et elle traverse la rivière à Auxonne, gare située à 32 km de Dijon. Une fois à Dole, à. 47 km de Dijon et à l’altitude de 232 mètres, elle est en communication avec la ligne de la vallée du Doubs vers Besançon. Elle traverse le Doubs, puis la Loue, en se dirigeant directement à travers les forêts de Joux en direction de la chaîne du Jura que l’on voit au loin. Elle est au pied de la chaîne, et même au sein des premiers contreforts, à Mouchard : nous sommes à 77 km de Dijon, mais toujours à une altitude basse, soit 288 mètres. C’est à Arc-et-Senans et jusqu’à Mouchard que la ligne se confond avec la ligne de Lyon à Belfort qui longe la chaîne du Jura par l’ouest, restant au niveau de la plaine de la Saône.

L’ancienne gare de Dôle.
La gare de Mouchard vers 1880. Au premier plan, la ligne de Strasbourg à Lyon. Au fond, on devine la ligne de Dôle à Vallorbe.
La gare de Mouchard dans les années 1990. À gauche, la ligne vers Vallorbe se préparant à une longue rampe, et, à droite, la ligne vers Lons-le-Saunier et Lyon, continuant à contourner et à éviter le Jura.
La gare PLM de Mouchard en 1904. La ligne de Salins n’est plus qu’une impasse, supplantée par la ligne vers Andelot. En bas, la ligne de Strasbourg à Lyon, provenant d’Arc-et-Senans, se dirige vers Poligny et Lons-le-Saunier. En haut à gauche, la direction d’Arc-et-Senans est aussi celle de Dole et Dijon

Désormais, la ligne comporte de longues rampes de 20 pour mille lors de la traversée du Jura. Dès la sortie de la gare, une longue rampe commence, à travers les vignobles, attaquant les premières pentes du Jura, la ligne domine la plaine sur la droite offrant une vue panoramique magnifique. Une fois le premier plateau gagné, le décor devient plus sauvage, et les grands sapins forment l’essentiel de la végétation. La gare d’Andelot est atteinte à 102 km de Dijon, à une altitude de 637 mètres : cette gare est le point de contact avec la ligne dite des « hirondelles » vers Morez, St-Claude et Nantua, qui est une longitudinale au tracé très pittoresque. Puis, une fois le plateau traversé, une nouvelle rampe conduit la ligne sur les hauts plateaux précédant immédiatement les crêtes du faîte de la chaîne, et à la froide, et perdue gare de bifurcation de Frasne, située à 122 km de Dijon et à l’altitude de 858 mètres.

La ligne de Dijon à Vallorbe : la montagne.

Jusqu’en 1915, les itinéraires menant en Suisse, soit par Berne, soit par Lausanne, passent tous deux par Pontarlier, où ils se séparent, l’un vers Les Verrières, et l’autre vers Vallorbe par une ligne à voie unique à forte pente. Cette ligne, au profil ingrat, est un obstacle à la circulation des trains internationaux vers Lausanne et le Simplon. Véritable handicap pour le P.L.M., elle place en mauvaise posture, au début du siècle, la grande compagnie par rapport à la concurrence entre les diverses grandes lignes menant en Italie par le Mont-Cenis, le Simplon, le Saint-Gothard, puis par le Lötschberg.

Cette concurrence incite les grandes compagnies européennes, notamment françaises, à procéder à de continuelles retouches aux voies d’accès à ces tunnels, et, pour le P.L.M. il faut vraiment éliminer cette « mauvaise » (sic, selon les termes de l’époque) section de Pontarlier à Vallorbe.  Pour déjà diminuer d’une quinzaine de kilomètres le trajet Paris à Lausanne et au SimpIon, le PLM passe un accord avec les Chemins de Fer Fédéraux suisses pour construire un raccourci direct à double voie de Frasne à Vallorbe, comportant un tunnel international de 6100 mètres de long sous le Mont d’Or, ce sommet de la crête de faîte du Jura étant, lui, à 1464 mètres.

Les approches du tunnel ne sont pas faciles, notamment avec les terrains marécageux de Labergement-Ste-Marie. Ce marais environne le lit du Doubs, entre les lacs de Ronceray et de Saint-Point, qui formaient, jadis, un seul grand lac. Les sondages montrent que le terrain marécageux et inconstructible a une profondeur dépassant la soixantaine de mètres. La construction d’un viaduc en maçonnerie n’est pas possible, car ses fondations auraient été peu sûres, et trop profonds. Un pont métallique à travée unique d’une portée de 350 mètres n’est guère possible, non plus, et on réalise, en fin de compte, un immense remblai en immergeant pas moins de 455 000 mètres cubes de matériaux, après déviation et canalisation du Doubs.

Le BV de la gare des Longevilles-Roche St-Jean, et, au fond, le tunnel du Mont d’or.
La difficile traversée des plis orientés nord-sud de la « montagne » du Jura, ici au niveau du Mont d’or. On ne passe d’une vallée à une autre que par de rares « cluses » ou, à défaut, par un tunnel.

Le souterrain traversant le massif du Mont d’Or, entre la France et la Suisse, est long de 6 097 m, et il est en pente de 13 pour mille continue en direction de la Suisse. Les travaux du côté français sont gênés par l’obligation de pomper l’eau au-dehors, contre la pente. Le 23 décembre 1912, à 4 273 m de la tête suisse du tunnel, une couche d’argile saute, laissant s’écouler dans le souterrain une venue d’eau débitant 5 000 litres à la seconde qui met à sec les sources du Bief rouge, en France.

Le 18 avril 1913, à 4 407 m de la même tête de tunnel, une nouvelle venue d’eau se présente avec 10 000 litres par seconde. Il faut percer une galerie de dérivation de 240 m parallèle à l’axe du souterrain, et il faut capter tous les écoulements d’eau souterrains en les raccordant à des canalisations. Le débit de ces venues d’eau, somme toute, est de vingt fois ceux survenus au Lötschberg, et de huit fois ceux du Simplon – c’est dire l’ampleur de la catastrophe qui, heureusement, ne fait pas de victimes, mais dérègle le système des eaux souterraines de la région. Le chantier est pénible et dure de 1910 à 1915.

Une fois mis en service, cet itinéraire raccourci est une bénédiction, car non seulement il joue son rôle économiseur de kilomètres et de temps de trajet, mais surtout, il dispense des fameuses rampes, ou pentes selon le sens de la marche, de 30 pour mille de la ligne damnée qu’est celle de Pontarlier à Vallorbe. Il sera immédiatement suivi par tous les trains internationaux vers Lausanne et le Simplon, conduisant à l’abandon de la ligne précitée.

Cette section de Mouchard à Vallorbe comporte en fin de compte cinq tunnels, dont le tunnel international du Mont d’or, et elle traverse plusieurs plis du Jura par les cluses du Drugeon et du Doubs et passe, à Labergement-Sainte-Marie, à proximité du lac de Saint-Point, formé par le Doubs dans sa partie haute, et dont la vallée était anciennement desservie par la ligne à voie métrique de Pontarlier à Mouthe qui a laissé, en ce qui le concerne, un grand souvenir et bien des regrets. Dès la sortie du grand tunnel, on est en Suisse, à Vallorbe, ville située à 147 km de Dijon, à une altitude de 807 mètres.

Certainement, la ligne n’est pas propice aux grandes vitesses et même les TGV qui l’empruntent, une fois la ligne à grande vitesse quittée avant Dijon, roulent très sagement à des vitesses dignes d’un train des années 1930… Dole est franchi à 150 km/h et la vitesse est de 160 km/h jusqu’à Arc-et-Senans, puis de 150 km/h jusqu’au point kilométrique 391 et ensuite 100 km/h jusqu’à Mouchard. Une fois la gare de Mouchard franchie, on commence la rampe de 20,1 pour mille et les courbes de 335 mètres et les tunnels en courbe. La vitesse est alors limitée à 90 km/h jusqu’au point kilométrique 407, puis à 100 km/h jusqu’à Pont d’Héry et 110 km/h jusqu’à Andelot et La Joux. La vitesse est autorisée ensuite à 120 km/h jusqu’à Vallorbe, avec des rampes de 14 à 15 pour mille cependant. Sur le versant suisse, et dans la grande descente en courbes et contrecourbes vers Lausanne, on ne roule qu’à un très modeste à 80 km/h, avec des déclivités et des courbes du même ordre. En outre, mais l’hiver jurassien est connu par sa rigueur, ses tempêtes et ses congères de neige et son froid polaire. La traction des trains y est toujours difficile, les interventions de chasse-neige fréquentes, et les horaires sont souvent perturbés.

Le chasse-neige, comme ici à Pontarier, toujours indispensable et familier pour les cheminots des lignes de montagne du Jura.
Etrave ou « soc » attendant patiemment l’hiver à Andelot. IL sera bientôt en service pour de longues semaines d’action. Au fond : le BV du métrique d’Andelot à Levier
La neige, toujours la neige sur les lignes de montage du massif du Jura, ici vers 1920.
Un TGV vu à Frasne en 2009 : ambiance ordinaire des hivers jurassiens. Un membre du Club Ferroviaire de Franche-Comté réclame des racloirs pour la boue des bottes pour que les « locaux » puissent « monter à Paris » !

La mise à voie unique lors de l’électrification.

Louis Armand, qui dirige la SNCF à l’époque et qui aime bien les solutions rapides et innovantes, apporte non seulement sur la ligne du Jura l’électrification en monophasé 25 kV à fréquence industrielle 50 Hz, mais aussi applique à la ligne la solution déjà trouvée pour la ligne de Reims à Epernay, en mettant à voie unique la section Dole-Vallorbe en ne conservant sur les 101 km de parcours que ce que l’on appelle des « garages actifs » qui sont des évitements ou des garages à pénétration directe sans rebroussement, par des appareils pris en pointe.

Ces garages sont établis entre Arc-et-Senans et Mouchard sur six kilomètres, Pont-d’Héry et Andelot sur six kilomètres aussi, et entre Boujailles et Frasne sur huit kilomètres. Cela permet, en plaçant la voie unique conservée dans l’axe des tunnels, d’obtenir le gabarit électrification sans abaisser la plateforme des voies ou sans reconstruire le tunnel, et aussi d’améliorer les rayons des courbes de la ligne, portés à 335 par le gain de place sur les plateformes.

La ligne de Dôle à Vallorbe, alors électrifiée en 1957-1958.
La ligne de Dôle à Vallorbe, et son embranchement vers Neuchâtel, d’après une carte PLM de 1904. En vert : la ligne de Pontarlier à Vallorbe.
La ligne de Dôle à Vallorbe, profil SNCF de 1950.

La « mauvaise » ligne de Pontarlier à Vallorbe.

Nous avons déjà, sur ce site-web, parlé de cette ligne à propos du dernier voyage en train fait par le maréchal Pétain. Elle laisse un souvenir encore vivant pour les équipes de conduite qui l’ont fréquentée. En hiver, ou, pis encore, en automne à l’époque des rails gras et humides et des feuilles mortes, quand on « faisait » un train « à la descente » entre Jougne et Vallorbe, il arrivait très souvent que l’on ne pouvait plus maîtriser quoi que ce soit, et que le train dévale la pente d’une manière plus ou moins contrôlée, passant alors à grande vitesse sans marquer l’arrêt en gare frontière de Jougne-Les Hôpitaux-Neufs, pénétrant ensuite immédiatement en Suisse, et n’ayant désormais pour seul recours, pour s’arrêter en bas de la pente à Vallorbe, le cul-de-sac en rampe placé fort sagement au-delà des quais de la gare par les ingénieurs des Chemins de Fer Fédéraux suisses au cas où… Le train n’avait ensuite plus qu’à « se laisser aller » en arrière pour rejoindre son emplacement d’arrêt normal en gare de Vallorbe. Le cas était si fréquent que même les douaniers savaient que, parfois, ils pouvaient être dispensés de travailler quand il pleuvait en automne, du moins pour les trains à la descente, ceux en montée souffrant d’autres difficultés, notamment de redémarrage en gare.

Cette « mauvaise », selon les termes de l’époque, ligne franco-suisse de Pontarlier à Vallorbe, et dont on voit toujours les murs de soutènement et la plateforme aujourd’hui en voyageant sur la nationale 57, est construite par la compagnie du PLM à partir de 1857. Elle est aussi mise en service le 1ᵉʳ juillet 1875 sur les 27 km qui séparent les deux villes, la française et la suisse. Son exploitation est assurée à l’époque par la compagnie suisse du Jougne-Eclepens, puis par le Jura-Simplon et enfin par le P.L.M. français en 1915.

Le parcours de Pontarlier à Vallorbe se fait d’abord en profil facile tant qu’on est sur les hauts plateaux, et on trouve d’abord la gare de Frambourg, où s’embranche la ligne vers Neuchâtel. Cette gare prendra le nom de La Cluse de Mijoux en 1935. Ensuite, la ligne s’élève par une rampe de 23 pour mille pour dépasser le millier de mètres d’altitude sur les hauts plateaux du Jura. Ensuite, c’est le grand plongeon vers la Suisse en contournant Métabief et le Mont d’or. La ligne dessert au passage la petite gare des Hôpitaux-Neufs où sont postés les douaniers, puis passe en tunnel sous le village de Jougne et débouche en Suisse, près de Balleigues au lieu dit « Le Creux », au pied du Mont d’Or, pour terminer sa descente en gare de Vallorbe, alors une gare terminus pour cette ligne, comme pour celle du Brassus et celle de Neuchâtel, jusqu’à l’ouverture de la section Frasne-Vallorbe en 1915 qui lui assure un débouché vers la France. Donc les trains venant de France doivent rebrousser pour poursuivre leur route en direction de Lausanne.

Inaugurée en 1877, la ligne achemine essentiellement les trains internationaux du PLM et assez peu de trains locaux. En 1906, le tunnel du Simplon est enfin ouvert et assure une liaison France-Italie importante : les 140 du P.L.M. « s’essuient les pieds » sur la ligne. Notre ligne de Pontarlier à Vallorbe est aux premières loges pour prendre le trafic qui se présente, et l’on constate que pas moins de quarante trains, chaque jour, empruntent la ligne, ce qui ne fera, d’ailleurs, que mettre en évidence les difficultés qu’elle crée et entraîner sa perte rapide, cette période d’or ne durant que moins d’une décennie pour elle…

Neuf ans plus tard, en 1915, en effet, l’ouverture à la circulation du tunnel du Mont d’Or crée la liaison Frasne-Vallorbe qui est plus courte et à profil moins acrobatique, et relègue notre ligne au seul trafic local – ce qui, on s’en doute, n’est pas grand-chose. Avec l’apparition des autorails sur la ligne en 1935, le trafic voyageurs reprend un peu d’importance, avec, quand même, jusqu’à huit trains par jour dans chaque sens. Les autorails sont quatre petits appareils à deux essieux Baudet-Donon-Roussel assurant un transport en classe uniquement. La toute dernière circulation voyageurs se fait après la fermeture de service voyageurs, sous la forme de la présence d’un autorail X 44000 du dépôt de Besançon et de sa remorque assurant le transport des skieurs jusqu’à la gare des Hôpitaux Neufs en hiver au début des années 1950.

Le 18 avril 1939, la ligne Vallorbe-les Hôpitaux Neufs via Jougne est fermée au trafic voyageurs, et en septembre de la même année, le trafic est fermé par les autorités suisses à la frontière au Creux. En 1943, les Allemands, manquant de métal, déposent non seulement la voie entre les Longevilles-Rochejean sur la ligne de Vallorbe à Frasne, mais s’en prennent aussi à notre ligne dont ils connaissent l’existence et déferrent la portion de voie entre Le Creux, au niveau de la douane de Vallorbe, et Jougne. Il est à noter que les CFF déposent également la voie sur la partie suisse de la ligne, ce qui met fin à toute possibilité d’utilisation entre Vallorbe et Jougne.

En 1969, cette courte ligne est définitivement fermée à tous trafics et seuls de courageux amateurs, formant une association, se souviendront d’elle et la remettront en service, du moins partiellement et depuis Pontarlier, avec l’espoir d’une remise en service intégrale.

La « ligne des horlogers » : de Besançon au Locle-Col-des-Roches.

Connue sous le surnom de « Ligne des horlogers », cette ligne au profil accidenté relie Besançon, au Locle-Col-des-Roches, une gare proche de la frontière proche de la ville suisse du Locle. Une fois en Suisse, la ligne atteint la ville horlogère réputée de La Chaux-de-Fonds.

Elle est déclarée d’utilité publique sous le Second Empire par un décret impérial en date du 19 juin 1868. Mais les travaux commencent avec beaucoup de retard en août 1876 et, deux années plus tard, en 1878, les travaux sont abandonnés pour raison de faillite le 1er juin. Rachetée par l’État, la ligne retrouve son chantier grâce à une convention franco-suisse, une convention signée le 14 juin 1881. La partie française est concédée à titre définitif au PLM par une loi en date du 20 novembre de la même année. En trois années, la partie de ligne française est achevée le 4 août 1884 par le PLM, quittant Besançon en utilisant les escarpements de la vallée du Doubs pour gagner le premier plateau, puis utilisant d’autres contournements pour accéder au deuxième plateau, puis pour franchir la « montagne » au col des Roches. Sauf sur les plateaux, la ligne est en rampe continue. Elle comprendra aussi l’embranchement de  L’Hôpital-du-Grosbois à Lods, et se raccordera aussi à celle de Pontarlier à Gilley sur le deuxième plateau. Elle est toujours en service aujourd’hui grâce à une renaissance du trafic voyageurs transfrontalier.

La gare de Besançon dans les années 1950 (Géographie de H.Lartllleux). La « ligne des horlogers » se détache aux Chaprais et passe dans la gare de la Mouillère et gagne difficilement le premier plateau par Morre et un tunnel. La ligne de Besançon à Vesoul, fermée aux voyageurs en 1952 et aux marchandises en 1973, revit depuis 2011 pour la desserte voyageurs de la gare de Besançon sur la nouvelle LGV.
L’élégante et inexplicable grande gare annexe des Mouillères, à Besançon : sans doute des rêves de thermalisme et de tourisme chic.
Entre autres intéressantes lignes, le profil de la ligne de Besançon-Le Locle (en bas) et son embranchement 873 de l’Hôpital du Gros Bois à Lods (en haut à droite). Doc. SNCF.

La « ligne des Hirondelles » : courbes et contre-courbes au cœur de la Franche-Comté

Faisant partie des secondaires de la France profonde, et terminée en 1912, cette ligne, aujourd’hui appelée « ligne des hirondelles », relie Andelot à La Cluse par  St-Claude et Morez. Elle forme une longue et pittoresque artère reliant Bourg à Andelot. Véritable et seule ligne desservant longitudinalement l’ensemble de la chaîne du Jura, elle offre un parcours, qui, aujourd’hui toujours, est un des plus remarquables de France.

Le Jura est composé de plateaux bordant sa partie ouest et d’une importante chaîne de montagnes bordant sa partie est, le long de la frontière suisse. Des plis longitudinaux, orientés dans le sens de la longueur de cette montagne en forme de croissant, séparent des vallées profondes qui ont la même orientation, mais certaines vallées sont reliées entre elles par des « cluses » : voilà, encore, une autre spécialité locale, non gastronomique, mais géologique. Il était relativement aisé d’établir des lignes de chemin de fer longitudinales, après pénétration dans une de ces vallées, mais il était très difficile d’établir des transversales qui se retrouvaient dotés de profils sévères en passant d’une vallée à une autre.

Les deux lignes les plus anciennes et les plus importantes pour le Jura sont donc, forcément, longitudinales : l’une, l’importante ligne reliant Lyon à Besançon et Strasbourg, est tracée au pied des premiers contreforts du Jura par l’ouest, suivant les plaines de la Saône et du Doubs, tandis que l’autre passe transversalement de la plaine de la Bresse, en partant de Bourg, pour arriver jusque dans le cœur même de la chaîne, devenant alors longitudinale et desservant Nantua, St-Claude, Morez, et s’embranchant à Andelot sur la grande ligne transversale de Dole à Vallorbe que nous connaissons déjà. Elle a un embranchement transversal de La Cluse à Bellegarde.

En gare de Morez, aujourd’hui. La gare est en cul-de-sac et impose un rebroussement. Au fond, en hauteur, le majestueux viaduc des Crottes (sic) qui attend au sommet de sa rampe de 37 pour mille.
La gare PLM de Morez dans les premières années 1950. En prolongement du cul-de-sac : la ligne à voie métrique vers St-Cergue et Nyons (Suisse)
La longue rampe au départ de Morez vers Morbier, vers le plateau, et Andelot. Au fond, les viaducs de Morez dans la vallée et des Crottes à mi-hauteur. La gare de Morez est en cul-de-sac, sur la gauche., non visible sur le cliché.
La gare en cul-de-sac de Morez, vue depuis le train, sur le viaduc des Crottes.

L’histoire d’une longue ligne secondaire.

C’est à Bourg en Bresse que la ligne d’Andelot se détache de la ligne de Lyon à Besançon. Cette ligne à voie unique a été commencée par la Compagnie des Dombes et terminée par le PLM. Elle comporte de nombreux ouvrages d’art, et elle a de longues rampes de 25 pour mille, parcourues par des trains reliant Bourg à Saint-Claude et à Andelot où l’on a des correspondances pour Vallorbe et la Suisse, dans un sens, et pour Mouchard, Dole, Dijon et Paris dans l’autre.

Quittant Bourg à une altitude de 241 mètres, la ligne part en ligne droite à l’assaut du Jura dont elle traverse les reliefs successifs avec cinq tunnels et de nombreux viaducs, avant d’atteindre La Cluse, à 37 km de Bourg et à une altitude de 241 mètres. Laissant ensuite à Nantua la ligne se dirigeant vers Bellegarde et Genève (formant un itinéraire très court entre Paris et Genève qui sera bientôt parcouru par les TGV qui n’auront plus le détour par Culoz à faire), la ligne suit la vallée qui s’offre à elle en direction du nord et dessert Oyonnax, à 50 km de son origine et à une altitude de 740 mètres), puis Saint-Claude à 80 km et à une altitude de 440 mètres. C’est à partir de St-Claude que le tracé devient spectaculaire.

La gare de Saint-Claude : cette belle gare, terminée en 1912, et excentrée, sise de l’autre côté de la rivière La Bienne par rapport à la ville, sur le versant encore inhabité, à l’époque : la gare de Saint-Claude n’est pas d’un accès facile. Le quartier de la gare s’est développé autour d’elle.
Le viaduc de Cize-Bolozon, entre Bourg-en-Bresse et La Cluse, construit en 1872 et vu dans les années 1980.

Une ligne de vallées.

Longue de 24 km, ligne de Morez à Saint-Claude longe la vallée de la Bienne, une rivière fortement encaissée et orientée Nord-Sud. La vallée très étroite lui vaut le franchissement de sept ravins profonds et une succession de 17 tunnels pour relier Morez, à 103 km de Bourg et à 735 mètres d’altitude.

La ligne de Saint-Claude à Morez s’embranche en rebroussement, à Morez, sur la ligne en provenance d’Andelot, gare située sur la grande ligne de Paris à Lausanne. Cette ligne monte vers St-Laurent du Jura, au point kilométrique 116 et à 950 m d’altitude, par un spectaculaire tracé comprenant un tunnel hélicoïdal et plusieurs viaducs en courbe accrochés à flanc de montagne. La ligne franchit un tunnel sous le col de la Savine à 840 mètres d’altitude et se trouve sur le haut plateau de Saint-Laurent du Jura, un des plus froids de France. Elle dessert la ville industrielle de Champagnise, à 140 km de Bourg et à 540 m d’altitude, et se termine au point kilométrique 153 en gare d’Andelot à une altitude de 637 mètres. À Champagnole, il y avait une ligne directe descendant jusqu’à Lons-le-Saunier et qui a été fermée à la fin des années 1950 : elle permettait, au prix d’un tracé difficile, une liaison directe avec Louhans et la vallée de la Saône.

En souvenir de la ligne de Lons-le-Saunier à Champagnole.

Le choix des ingénieurs ne pouvait être autre: il fallait bien chercher la rentabilité là où elle était, c’est-à-dire desservir les villes industrielles et importantes de la région, et donc quitter les hauts plateaux pour les vallées.

Une ligne attendue.

D’un accès difficile, le Jura compte beaucoup sur le chemin de fer pour son expansion industrielle, les routes étant bloquées par les neiges durant de longs mois d’hiver. Concédée au PLM le 2 août 1886 sous réserve de déclaration d’utilité publique, la ligne de Saint-Claude à Morez est l’objet d’un avant-projet en 1899, tandis que la déclaration d’utilité publique est obtenue en 1901.

Les travaux sont entrepris entre 1905 et 1911 et l’ingénieur Paul Séjourné, très réputé à l’époque, se charge du dessin des viaducs. La ligne est ouverte le 10 août 1912, et le trafic ne cessera jamais d’être soutenu, même s’il ne suffira jamais à compenser les dépenses de construction de la ligne qui sont exceptionnelles, vu le relief. La ligne se justifie cependant pleinement, car elle fait partie d’un ensemble cohérent dont la Franche-Comté a su se doter.

Un tracé et un profil difficiles.

La voie est en rampe continue de Saint-Claude à Morez, et les rampes atteignent jusqu’à 22,5 pour mille, occupant 15 % de la longueur de la ligne. Les tunnels ont toutefois été exécutés en rampe maximale de 20 pour mille pour ne pas, à la montée, occasionner trop de difficultés en traction, notamment d’importantes émissions de fumées pour les équipes de conduite.

Un ensemble de neuf viaducs et grands ponts a été construit. Le viaduc de Morez est le plus important et comprend neuf arches de 20 m, pour une longueur totale de 238 m et une hauteur de 41 m. Il est en courbe de 250 m et en pente de 4 pour mille. Les piles ont été posées sur du béton armé avec des rails du réseau du PLM ! De nombreux murs de soutènement en maçonnerie ont été construits et totalisent une longueur de 4 783 mètres.

La traction.

Comme d’autres lignes de montagne difficiles, la ligne est dure pour les mécaniciens des locomotives type 140 L en tête de trains omnibus formés de voitures à portières latérales d’origine armistice, ou de longs trains de marchandises. La double traction est souvent nécessaire pour monter les trains de Morez à Andelot, tandis que le freinage à la descente est toujours intense. Les autorails améliorent sensiblement les temps de parcours à partir des années 1950, tandis que la traction diesel prend en charge les trains de marchandises.

Quelques chiffres :

Longueur : 116 km sur deux régions

Ouvrages d’art : 700, soit un tous les 140 mètres en moyenne

Gares : 26

Maisons de P.N. : 25

Passages à niveau : 108

Tunnels : 31

Ponts et viaducs : 380

Le Nyon – Saint-Cergue-Morez : le seul métrique international français.

Rien ne destinait la petite gare de Morez à devenir internationale, si ce n’était le désir, pour les populations des hauts plateaux jurassiens, de pouvoir descendre commodément jusqu’à la gare pour prendre leur train. Mais, au-delà de la frontière suisse, il y a Nyon, au nord du lac Léman, sur la très active ligne reliant Genève à Lausanne, et cette ville a donc une belle gare… Va-t-on laisser les jurassiens français aller prendre leur train en Suisse ?

Le Jura est une montagne comportant des plis orientés nord-sud, et s’incurvant en forme de croissant le long de la frontière suisse. Cette disposition géographique a toujours favorisé l’établissement des voies ferrées longitudinales, mais défavorisé celle des lignes transversales est-ouest qui, pourtant, sont nécessaires pour relier le Jura à Paris et à l’ensemble des autres régions françaises. C’est ainsi que, dès 1912, Morez se trouve desservie par une ligne reliant Bourg à Andelot, donc orientée dans le sens des vallées. Mais les habitants des Rousses et des plateaux environnants, eux, n’auront aucune chance de voir un chemin de fer venir les « désenclaver » comme on ne dit pas encore…

La Suisse, par contre, ne recule devant aucun relief ni aucune excuse pour ne pas desservir l’ensemble de son territoire, et c’est pourquoi le Jura suisse est amplement desservi par un ensemble de lignes à voie normale ou métrique. En particulier, la ligne de Nyon à La Cure vient, jusque sur la frontière française, narguer l’indifférence ou l’incompétence administrative hexagonale, et attirer les Jurassiens français dans l’orbite de la gare de Nyon.

Le prolongement de la ligne suisse est décidé, et se fera, en France, avec la solution la moins chère qu’est celle de la plateforme sur accotement routier, par utilisation de la Nationale 5. Toutefois, la voie est bien obligée de s’éloigner de la Nationale lors de certains virages trop serrés, et de faire une boucle plus ample, le plus souvent en tunnel.

Morez, gare internationale, donc.

Morez a sa gare construite par le Paris, Lyon et Méditerranée en 1912, et elle est située à une altitude de 700 mètres, dominant la ville à flanc de montagne, et obligeant les trains de la transversale jurassienne Bourg – Andelot à repartir en marche arrière pour poursuivre leur itinéraire, car la vallée de Morez forme un cul-de-sac.

Depuis 1924, la gare P.L.M. de Morez est aussi le terminus d’un chemin de fer électrique franco-suisse à voie étroite venant de Nyon, ville située à une altitude de 406 mètres sur le lac Léman et coupant au col de Saint-Cergue à une altitude de 1230 mètres le pli de faîte du Jura. La ligne est longue de 40 km, dont 12 sont sr le territoire français. Les rampes atteignent 48 pour mille et les rayons de courbure minimaux sont de 50 mètres. Quelques courts tronçons ont des rampes de 60 pour mille et des rayons de 30 mètres. Le courant traction est à la tension de 2200 volts, l’énergie étant fournie sous la forme de triphasé à la tension de 11 500 volts et à la fréquence de 50 Hz par la centrale de Saint-Cergue qui est placée au milieu de la ligne. Deux trains de 67 tonnes chacun peuvent se suivre à 25 minutes d’intervalle.

Le « N-StC-M » (Nyon-Saint-Cergue-Morez) est constitué par la réunion de deux compagnies distinctes : le Morez-La Cure, côté français, et le Nyon-Saint-Cergue, côté suisse. La concession du tronçon français est confiée à la Société Dyle et Bacalan, qui constitue la Cie des Chemins de Fer électriques du Jura (CFEJ).

La Cure, village au statut diplomatique exceptionnel.

Partant de Nyon, la ligne s’élève en lacets en attaquant directement les pentes du Jura qui sont beaucoup plus abruptes du côté suisse que du côté français où la montagne descend par plateaux successifs. Elle atteint assez rapidement l’altitude de 1000 mètres, pour desservir l’importante station de sports d’hiver de St-Cergue dont les nombreux hôtels ont une vue magnifique sur le lac Léman et les Alpes.

La ligne continue son ascension et franchit le col de La Givrine à 1233 mètres d’altitude, puis redescend en direction de la frontière française par un parcours de haut plateau entre des sapins sombres qui, en hiver, sont pris dans une épaisse couche de neige. Cette ligne franchit la frontière à La Cure, sur la Nationale N°5 de la Faucille.

Ce petit village a pour particularité d’être coupé, en son centre, par la frontière. Le fameux hôtel Arbez ou « Hôtel Franco-Suisse » est traversé jusque par le milieu du comptoir par la frontière, et si une des façades de la maison est suisse, l’autre est française, ce qui a sauvé des vies pendant les guerres. Le carrefour qui est à proximité de l’hôtel est celui où la route suisse s’embranche sur la Nationale 5, ce qui fait que le goudron est suisse jusqu’à la ligne blanche et français au-delà. Cet hôtel est resté ouvert durant la Seconde Guerre mondiale et les soldats allemands, occupant la France, voyaient leur action de surveillance limitée à une extrémité du comptoir et aux premières marches de l’escalier, ce qui permit à un certain nombre de personnes de sauver leur peau de justesse, les soldats allemands les poursuivant dans l’escalier, mais renonçant à poser le pied sur les marches suisses pour ne pas créer un incident diplomatique avec lequel les Suisses auraient réagi avec fermeté.

Douze kilomètres en France, mais qui ne sont plus qu’un souvenir.

La ligne, peu après La Cure, continue son parcours en France et dessert Les Rousses, station d’été et de ski proche d’un lac. Au-delà des Rousses, la ligne descend rapidement vers Morez en suivant la route Nationale N°5 dont le tracé en corniche, se repliant en de multiples boucles et épingles à cheveux, au-dessus de la profonde vallée de la Bienne, a rendu très difficile le passage du chemin de fer.

La fermeture de la ligne sur les douze kilomètres du côté français est intervenue en 1958, et d’une manière assez inopportune, car, quelques années plus tard, la mode du ski et de la montagne allait déverser dans la gare de Morez des foules entières de touristes qui, aujourd’hui, s’entassent dans les autocars aux pneus arrière dument chaînés pour affronter la dure route menant aux Rousses… A quelques années près, la ligne aurait pu rester ouverte et active.

Construites entre 1914 et 1936, les automotrices de la ligne assurent un service de fait international, puisque reliant Nyon à Morez via Saint-Cergue. Elles circulent sans interruption sur la section suisse jusqu’en 1985, date à laquelle elles cèdent leur place à un matériel moderne. Depuis, certaines d’entre elles coulent une retraite paisible dans les Alpes françaises.

La construction du parc moteur de ces deux lignes fut donc confiée à BBC (Suisse), pour la partie électrique, et à SWS (Suisse), puis Dyle et Bacalan (France), et enfin la Compagnie générale (France) pour la partie mécanique. Le premier exemplaire fut réceptionné en 1914 par le Nyon –Saint-Cergue sous l’immatriculation BCe 4/4 I. Le Morez – La Cure réceptionna la BCFZe 4/4 I en 1924. Après la disparition du tronçon français en 1958, le N-StC-M récupère l’ensemble du parc de sept automotrices. Ces automotrices sont alimentées sous 2200 V continu, ce qui constitue en 1914 un niveau de tension tout à fait respectable ! Elles disposent de quatre dispositifs de freinage indépendants, à savoir : un frein à main, un frein continu à air comprimé, un frein rhéostatique, et enfin un dispositif de freinage pneumatique sur rail. Chaque bogie reçoit deux moteurs de 74 kW, portant la puissance continue de ces machines à près de 400 ch.

Ces automotrices connaissent de multiples évolutions tout au long de leur carrière. Certaines sont équipées d’un compartiment fourgon (BCFZe 4/41 du M-LC, CFZe 4/4 10-11 du N-LC), et leur capacité est de 11 places en troisième classe. La taille des fourgons et la répartition des places assises connait des multiples changements. D’autres disposaient de onze places en deuxième classe et 26 places en troisième classe (BCe 4/4 1 du N-LC). Toutes achèvent leur carrière sous la dénomination ABDe 4/4.

Après plus de soixante-dix années d’exploitation quotidienne, l’ensemble du parc automoteur du N-StC-M est remplacé à l’occasion du changement de la tension d’alimentation de la ligne. L’ensemble du parc subsistant, soit les N° 1, 5, 10 et 11, est progressivement transféré sur le Chemin de Fer de La Mure en France. Après mise en conformité technique, deux exemplaires participent dès les beaux jours à l’exploitation touristique. Troquant les pentes du Jura pour les Alpes françaises, ce matériel connaît aujourd’hui une paisible retraite amplement méritée.

Caractéristiques techniques

Motrice : type BB

Puissance : 292 kW

Écartement : 1 m

Longueur : 16,4 m

Poids : 32,5 t

Alimentation : 2200V continu

Nombre de moteurs : 4

Immatriculations et numéros

Type      Numéro               Année

BCe4/4                1             1914

BCFe4/4                             2             1936

BCFZe4/4                           1             1924

BCe2/4                               5              1914

BCe2/4                               6             1914

CFZe 4/4             10          1918

CFZe 4/4             11          1918

NB: Deux motrices portent le même N°1 ?

Carte de la ligne de Morez à Nyon, du temps de sa splendeur partiellement française perdue depuis 1958.
Quand les belles automotrices rouges du Nyon-Saint-Cergue-Morez faisaient encore l’honneur de circuler en France. Nous sommes ici dans la petite gare des Rousses, dans les années 1950. Le petit autocar (U 23 Citroën ?) complète le tableau.

Aller à Genève : un siècle et demi de mauvaises solutions.

L’histoire du voyage de Genève, ou plutôt du désir de ce voyage, est très ancienne, et elle s’est toujours passée d’une manière indirecte et complexe quand il s’est agi de prendre le train. Genève attendra longtemps sa ligne directe, car, depuis 1857, elle peut être atteinte en contournant le Jura par le sud.

Il est vrai que la ligne de Lyon à Genève a constitué, très tôt dans l’histoire du réseau français, un axe majeur permettant d’atteindre la grande ville suisse par un itinéraire assez direct, se glissant entre les chaînes montagneuses des Alpes et du Jura. De grands intérêts se rattachent à cette ligne internationale. Ouverte en 1858, elle reçoit tout le trafic qui arrive à Lyon pour la Suisse par la ligne de la Méditerranée et par le Grand-Central que nous connaissons déjà, c’est-à-dire tous les produits et les voyageurs du bassin de la Méditerranée, du midi, du centre de la France et principalement les houilles de Rive-de-Gier et de Saint-Etienne. De Lyon à Bourg, elle fait partie de la direction naturelle que parcourt le transit du Rhône au Rhin, et dont la ligne du Jura de Dole à Vallorbe, concédée à la compagnie de Paris à Lyon, est le complément : elle peut donc ainsi recevoir une notable portion du transit de la Méditerranée à Mulhouse et des provenances du réseau de l’est aboutissant à Dôle. À Genève, la ligne de fer sert de prolongement aux lignes qui traversent la Suisse et se relient autour de Bâle et du lac de Constance. Au réseau allemand. Enfin, à Culoz, elle est en contact avec les lignes encore piémontaises qui lui ouvrent l’Italie. Les dépenses d’exécution du projet de Lyon à Genève sont évaluées par le gouvernement, en 1853, à 62 250 000 francs. La Suisse fournit une subvention de deux millions. La France fournit, de son côté, une subvention de quinze millions, et le reste est obtenu par des actions. En 1855, ce capital est élevé, d’après de nouveaux devis, à 64 116 000 francs. Enfin, en 1858, y compris l’embranchement de Versoix, les dépenses atteignent le chiffre total de 412 500 000 francs, soit 474.600 francs par kilomètre.

Mais la ligne de Lyon à Genève ne reste pas seule sur cet itinéraire très prometteur, et la ligne complémentaire de Dijon – Saint-Jean de Losne est ouverte en 1883, et elle est prolongée jusqu’à Lons-le-Saunier en 1905 : elle n’est rien d’autre que la réalisation, par étapes, d’une ligne de Dijon à Genève, s’embranchant sur celle de Paris à Lyon, et offrant un accès direct à la grande ville suisse. Mais Genève ne sera jamais atteinte ainsi. La lecture de la RGCF de l’époque nous explique pourquoi.

La bataille d’une « Transjurassienne » par le col de la Faucille.

L’histoire de l’inespérable ligne de Genève a eu ses grandes batailles, et même ses querelles des anciens et des modernes. Depuis 1857 il existe la solution du contournement du Jura par Ambérieu et Culoz, mais c’est bien long et on perd du temps. Le PLM le sait et songe bien encore, en 1905, réaliser sa ligne directe Paris – Dijon – Lons-le-Saunier – Genève quand le chantier atteint Lons-le-Saunier. Mais est-ce la contemplation de la barrière du Jura dont les premières collines entourent cette ville qui rend le PLM moins entreprenant ? En effet, à Lons-le-Saunier, il va falloir, exactement comme pour la ligne de Dijon à Pontarlier et Neuchâtel qui vient buter contre la chaîne montagneuse à Salins, trouver des subterfuges pour loger un tracé difficile, surtout à une époque où, pour la traction vapeur, la moindre rampe dépassant la vingtaine pour mille coupe le souffle. Si, à Salins, comme nous l’avons vu, les ingénieurs du PLM ont dû « faire marche arrière » et revenir jusqu’à Mouchard pour trouver un tracé de contournement de la cuvette au fond de laquelle se trouve la ville, laissant la ligne initialement prévue s’y terminer en impasse, on recommence à Lons-le-Saunier où le même problème se pose avec une « reculée » orientée en direction de Genève.

Le Jura se présente comme une succession de deux marches d’escalier (les deux plateaux) puis d’une partie montagneuse. Il faudrait, si l’on veut rester à l’air libre, profiter de la « reculée » de Conliège pour racheter la différence de niveau séparant la plaine de la Saône et le premier plateau, puis continuer de la même manière pour gagner le second plateau, puis franchir le relief tourmenté de la troisième partie dite la « Montagne » avant de redescendre très brusquement sur Genève. Le projet Chevaux de 1899, que le PLM a repris en 1911, est une suite de tunnels, l’un de 6 400 m sous le premier plateau, mais permettant de se mettre au niveau du second, puis un deuxième de 11 400 m sous la partie élevée du second plateau, puis un troisième de 15 200 m sous la « Montagne » et plus précisément sous le col de la Faucille. Le troisième tunnel est déjà plus long que ceux du Mont-Cenis ou du Saint-Gothard.

Mais le PLM a une autre idée en tête depuis le XIXe siècle : c’est de construire des lignes menant en apparence à la Suisse, mais visant surtout à prendre le très intéressant trafic Paris – Milan et par de grandes percées alpines comme le Simplon, le Saint-Gothard, et d’autres grands cols par lesquels transitera le trafic européen nord-sud. C’est pourquoi la compagnie a accéléré la construction de ses lignes desservant Neuchâtel, Fribourg ou Lausanne et ceci par Vallorbe, Pontarlier. Le PLM met les bouchées doubles pour concurrencer le réseau de l’Est qui joue exactement le même jeu, mais par Bâle. Alors Genève n’est intéressante que si on poursuit jusqu’à Milan. On l’a certes bien compris dans la partie sud du Jura où les villes comme St-Claude notamment ou Lons-le-Saunier veulent leur part du « gâteau » prometteur que sera le grand trafic européen vers l’Italie par la Suisse.

En rouge : le projet Chevaux d’une ligne directe Paris-Genève par le col de la Faucille. La nécessité de nombreux tunnels lui a enlevé tout espoir de réalisation.

Aller à Genève : un faux problème et un vrai mal caché ?

Le vrai problème est de relier Paris à Milan qui sont deux grands centres économiques d’importance européenne. Il suffit d’examiner une carte du réseau ferré français et suisse au début du XXe siècle. Genève est dans une impasse, bloquée à l’extrémité de son lac. Une ligne (Paris) Dijon – Genève n’irait pas plus loin que la gare de Cornavin, et ne pourrait gagner les grands cols alpins qu’en rejoignant ses concurrentes en contournant le lac soit par la rive nord et Lausanne, soit par la rive sud par Thonon et Evian, une ligne qui, de toutes manières rejoindrait celle venant de Lausanne pour aller affronter le Simplon. Ce contournement fait perdre plus de 20 km.

A la fin du XIXe siècle, Genève est certes une ville déjà importante, mais sa desserte exclusive ne justifie pas les dépenses d’un « Transjurassien » direct par la Faucille avec les dépenses d’une succession de tunnels dont l’un deux est un véritable St-Gothard à lui seul.

Mais de puissantes campagnes sont organisées en faveur du projet par la Faucille, notamment par les élus de Saint-Claude, une ville qui se trouverait sur la ligne entre les deux grands tunnels, et se verrait directement reliée à Paris et à Genève. Les habitants de Lons-le-Saunier trouvent aussi un grand intérêt à faire de leur ville une grande plaque tournante (on ne dit pas encore un « hub ») pour tout le trafic de l’est de la France et vers la Suisse. La campagne est à son maximum vers 1905.

Les chiffres.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes quand il faut comparer la ligne de la Faucille et ses concurrentes pour le trajet Paris – Milan. La ligne de la Faucille gagne, certes, sur le tableau de la modération des déclivités, mais se positionne mal ailleurs et perd beaucoup trop sur celui des coûts et des longueurs de tunnel à percer en France.

Paris – Milan par :Distance totale (km)Déclivités maximales en France (pour mille)Déclivités maximales en Suisse (pour mille)Total des longueurs sous tunnel (m) France (+ Suisse)Coût des travaux (millions de frs)
Frasne –Vallorbe – Le Simplon1.63015256225 (+ 19.730) = 25.95540 + 78 = 118
Pontarlier – Jougne – Le Simplon1.64720250 (+ 19.730) = 19.73078
La Faucille – Genève – Lausanne – Le Simplon1.670102511.400 + 15.200 (+ 19.730) = 46.330140 + 78 = 218
Belfort – Bâle – Le St-Gothard1.6978270 (+ 14.984) = 14.98475

On comprend, à la lecture de ce tableau, que seul l’itinéraire par Frasne est viable et sera réalisé, une fois le tunnel du Mont d’or percé, mettant fin au trajet peu commode par Jougne. L’itinéraire de l’Est, par Bâle, offre l’avantage de ne demander aucun tunnel autre que celui du St-Gothard qui était de toutes manières à percer pour de nombreuses autres raisons. Mais il est le plus long et les rampes du St-Gothard sont très dures.

Le professeur Jean Bruhnes use du principe de réalité.

Ce professeur à l’université de Fribourg, et géographe mondialement connu, remet les choses à leur juste place dans un article de la Revue économique internationale.  Combattant énergiquement ceux qu’il appelle les « rêveurs » (le terme est même repris par la très peu pugnace RGCF), il démontre, en deux tableaux restés connus, anticipateurs d’une véritable géopolitique ferroviaire, que les « lobbies » peuvent faire circuler des documents faux et induire en erreur, à coups de graphiques, les esprits les plus objectifs. À l’époque, le tunnel du Mont d’Or n’est pas encore percé, et les trains pour la Suisse passent par Pontarlier, Jougne avec sa descente vertigineuse, et rebroussent à Vallorbe avant de continuer à descendre vers Lausanne. Notons aussi que le Simplon n’est pas encore ouvert : le premier tunnel le sera le 1er juin 1906, et le deuxième seulement le 16 octobre 1922.

Raisonnant en termes d’économie, il démontre que les temps de parcours Paris – Milan par La Faucille ou par Jougne seront équivalents, même si les rampes sont plus modérées par la Faucille, car la distance restera inférieure par Jougne et profitable pour l’usager puisque l’on paie la distance parcourue. Le percement du tunnel du Mont d’Or permettant un trajet direct par Vallorbe, réduira le trajet d’une vingtaine de minutes et donnera une distance totale réduite d’une quarantaine de kilomètres.

Jean Bruhnes, avec clairvoyance, prédit que le problème des rampes sera de moins en moins crucial avec les promesses faites par la traction électrique et que l’on préférera à l’avenir des lignes économiques à construire puisqu’à fortes rampes et sans tunnels, comme aux États-Unis, dans la mesure où l’on disposera de puissances supérieures. On notera que d’autres considérations ont redonné, aujourd’hui, toutes leurs chances aux projets à long tunnel de base, notamment par la plus grande facilité technique du percement de longs tunnels qui était loin d’exister en 1906. Toujours est-il que, à l’époque, on juge que ce n’est donc pas la peine de creuser les trois tunnels à rampe modérée de la ligne de la Faucille.

Enfin, le professeur donne le coup de grâce aux « partisans de la méthode de l’enthousiasme » (La Faucille) en avançant point par point les arguments des  « partisans de la méthode de l’observation positive » : les zones de trafic. Là où les partisans de la Faucille voient en elle « la voie transeuropéenne pour toutes les marchandises arrivant aux ports de la Loire » ou encore « le lien entre l’Amérique et tout l’Orient de l’Europe », le professeur démontre, tableaux et rapports à l’appui, que la ligne de la Faucille ne récupérera guère que le trafic marchandises allant de la plaine de la Sâone (Chalon, Louhans, Dôle, etc) en direction du Jura et de Genève.

Pour le TGV Paris-Genève : d’abord un détour qui date de 1857.

De toutes manières, quand cette bataille et ces querelles de la « Transjurassienne » battent son plein, la ligne Lyon-Genève existe déjà, et depuis 1856. Cette ligne a été conçue pour offrir à Genève non seulement d’être reliée à Lyon, mais aussi et surtout d’avoir à son service un véritable réseau de lignes du côté français : la compagnie du Lyon-Genève ouvre, dès 1857 et conformément au programme initial, les lignes d’Ambérieu à Seyssel, de « Bourg à la Saône » et de « La Saône à Mâcon ». Il est donc inévitable que le trafic Paris – Genève tombe dans le rayon d’action de ces lignes et passe ainsi par Bourg, Ambérieu, Culoz, Bellegarde, quitte à faire le long détour par Ambérieu et Culoz. L’électrification de l’étoile d’Ambérieu, menée avec rapidité et efficacité au milieu des années 1950, augmente encore l’attractivité du contournement du trafic Paris-Genève par le sud du Jura et fera taire à tout jamais toute idée d’une ligne directe par La Faucille. C’est pourquoi le détour par Ambérieu et Culoz, suivi jusqu’en 2010 par les TGV Paris-Genève est vraiment une très vieille histoire. L’électrification de la ligne du Haut Bugey, dite « ligne des Carpates » (pour « casse-pattes ») par les équipes de conduite en traction vapeur d’entre les deux guerres, est terminée en 2010, et elle ne sera, somme toute, qu’un tardif et très attendu aménagement de cette situation remontant à presque un siècle et demi.

En bleu : le détour fait par Ambérieu et Culoz fait par les TGV Paris-Genève jusqu’en 2010. En rouge, l’important raccourci offert avec l’électrification de la ligne du Haut-Bugey par Nantua.
L’impressionnant viaduc de Bellegarde enjambant la Valserine sur la ligne de Lyo, à Genève en 1868.
En 1904 : la ligne du Haut-Bugey (en rouge), construite par la compagnie des Dombes, arrive de trop haut en gare de Bellegarde pour se raccorder directement aux voies du PLM (en vert) : elle traverse la gare en hauteur, sur un mur de soutènement, et se raccorde au-delà de la gare. Les trains venant de Bourg par le Haut-Bugey doivent rebrousser Toutefois, une gare des Dombes est construite sur le mur et un escalier permet une correspondance avec le PLM.
En 2007, la ligne du Haut Bugey est raccordée dans le bon sens pour permettre un accès direct par le tunnel du Credo à la ligne de Genève sans rebroussement en gare de Bellegarde. Toutefois, il faudra ajouter une remplaçante de la gare des Dombes, puisque la gare principale ex-PLM est toujours évitée.

Laissons à Florence Grillet, du Musée du Tacot de Cléron (Doubs), le soin de conclure sur l’état actuel du réseau du Jura : certaines lignes ne sont plus que des souvenirs disparus (trop tôt peut-être avec les changements à venir ?) devant l’individualisme du tout automobile (lignes du tacot du Doubs, trams du Jura, trams de l’Ain,…), d’autres étant en souffrance dont l’amputation de la partie Saint Claude à Oyonnax de la ligne des Hirondelles (Andelot en Montagne à La Cluse), et d’autres en renaissance comme la ligne des Horlogers (Besançon au Valdahon, Morteau, et Le Locle).

Bibliographie:

Jean Cuynet « Histoire du rail en Franche-Comté », Editions du Château, 2019

Gaby- Bachet et Jean Cuynet :« Histoire du rail en Bourgogne-Franche-Comté »; Editions du Belvédère, 2007.

Jean Cuynet « Cheminots et résistants. Bataille du rail en Franche-Comté ». Editions La Taillanderie, 1997

3 réflexions sur « Le Jura : la montagne qui refusait le chemin de fer. »

  1. Superbe article sur les lignes du Jura. Cet article permet de se retrouver dans le labyrinthe, et ce n’est pas chose facile. Un grand MERCI.

    1. %
      Merci pour votre appréciation. Malgré un nom anglais, j’ai des origines un peu comtoises et j’ai passé mon adolescence à Lons, avant de faire mes études supérieures à Bsac (comme on dit localement. Bien à vous, bien cordialement.

  2. Jacqueline Prost-Tournier 16 décembre 2021 — 11 h 41 min

    Très interessant et une certaine nostalgie pour ces Trams supprimés dont on voit encore les gares et les tracés au bord des routes Lons-le Saunier, St-Claude ou Morez- Les Rousses

Commentaires fermés

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