Les métros, du tapage nocturne à l’indispensable vie diurne.

L’Europe est encore dans ses guerres du XIXe siècle quand, en 1871, New York est déjà une ville moderne dotée d’un chemin de fer métropolitain urbain. Il s’agit de lignes construites en hâte par-dessus les rues, installées sur une succession de piliers en métal, et apportant, particulièrement pour les habitants des premiers et deuxièmes étages des immeubles, un vacarme incroyable se répercutant de façade en façade, surtout la nuit ! Mais Londres et Paris ne seront pas épargnées quand, à leur tour, ces grandes capitales se mettront au métro. Et de capitale en capitale, le problème du bruit se répercutera, comme les échos dans les paisibles montagnes suisses, mais ici, il ne s’agit pas de paisibles chants de bergers accompagnés par les délicats Alpenhorns… Ah ! On les a détestés, ces métros….

Le quartier des affaires de Manhattan, au cœur de New York, est resserré entre deux rivières, qui le rendent beaucoup plus long que large. Il résulte de cette disposition une séparation entre les quartiers du travail et ceux du logement. Il arrive souvent en 1870 que, pour aller à son bureau ou à son magasin, l’habitant de New York est obligé de parcourir jusqu’à douze kilomètres, distance considérable, surtout à une époque où l’automobile n’existe pas et où seul le chemin de fer peut assurer des transports de masse et à distance. Or, en Amérique, le temps est de l’argent comptant. Aussi, les projets de modes nouveaux de locomotion, destinés à abréger le temps du parcours à l’intérieur de la ville, ont toujours été d’actualité à New-York.

Depuis les années 1860, on juge nécessaire de créer un réseau ferré intérieur, et on a d’abord pensé créer un chemin de fer souterrain, à l’imitation de celui de Londres, mais sa construction aurait demandé un temps beaucoup trop long et des dépenses excessives pour l’achat des terrains et l’expropriation. En outre, le sous-sol de New-York ne semble pas offrir les mêmes caractéristiques géologiques et aussi favorables que celui de Londres. On décide alors de construire un chemin de fer aérien, qui demande une mise de capitaux moindre, et peut-être établi beaucoup plus vite.

C’est à Londres que tout commence dans les années 1860, et ici, dans les années 1870, on construit le métro dans l’enthousiasme. Mais ce métro, à vapeur, sera aussi enfumant que bruyant. Les New-Yorkais essaieront de faire mieux.


Après divers projets plus ou moins ubuesques, la première ligne sérieuse construite à titre d’essai, est celle de la rue Greenwich, dite ligne de la Neuvième avenue.  On l’appellera « Elevated », du fait de sa très grande hauteur au-dessus du sol. C’est dans le bas de la ville que cette ligne, la première de toutes, est commencée eu 1868. Elle n’a qu’un mile (1600 mètres) de longueur initialement, et les essais ont duré plusieurs années. En 1872, elle ne s’étend pas encore au-delà de la 30e rue, soit une longueur totale de 6 km au plus. Les voitures y sont remorquées par un câble sans fin, actionné par des machines fixes entraînant un chariot pilote caché dans une ornière dans le sol, et par un plan incliné à l’extrémité de la ligne. La voie, établie sur des longrines métalliques parallèles, une sous chaque rail, repose sur des poutres métalliques transversales supportées par une seule ligne de piliers verticaux qui s’évasent à leur partie supérieure pour se relier aux pièces transversales. On devine que ces rails solidement boulonnés à une structure entièrement en acier créent ainsi toutes les conditions d’un bruit infernal et les riverains seront servis !

Tout en conservant l’idée première, ce système est modifié et amplifié au fur et à mesure du développement des lignes aériennes. En 1880, cette portion du réseau a été entièrement reconstruite suivant les nouveaux plans. La ligne de la neuvième Avenue a été prolongée jusqu’au pont de Harlem, puis jusqu’à Yonkers, à 15 milles plus loin, par un chemin de fer au niveau du sol. On utilise encore le système de traction des voitures par un câble sans fin, au moyen d’une machine à vapeur fixe, mais le système est tellement malcommode que l’on se décide bientôt à se servir de petites locomotives.
Cette première ligne n’a qu’un piètre succès. Les horaires ne sont pas denses, et les bénéfices sont dérisoires, et le bruit est insupportable. En 1874, on prolonge cette ligne jusqu’à Central Park, en partant de la pointe sud de Manhattan, dite Battery, et aujourd’hui Battery Park. On construit de nouvelles stations, pour multiplier les départs. Quelques années après, le succès commençant à se dessiner, on s’occupe d’étendre tout autour de la ville le réseau ferré aérien.

Le plan du premier métro de New-York, paru en 1870. Nous avons ajouté, en grands caractères, les noms des quartiers. Mais “Hobdoken” est une orthographe d’époque pour “Hoboken”, et “Melgatte” est surnommée “Hell Gate”… (Porte de l’enfer) !

Un voyage sur le premier métro de New-York.

Louis Figuier, grand vulgarisateur scientifique et auteur prolixe, prend des notes : « La voie aérienne allant de la Battery Park actuelle à la rue Greenwich est courbe. Il faut monter un escalier assez haut pour arriver à la station, et de la hauteur vertigineuse de cette station, on voit, au-dessous de soi, maisons, tramways, voitures et piétons. Le billet que l’on prend avant d’entrer dans la voiture coûte cinq cents, pour une distance quelconque. Une porte à coulisse s’ouvre, et l’on entre dans une voiture, moins longue et un peu plus étroite qu’une voiture de chemin de fer, et assez semblable par sa forme aux voitures de tramways. On part bientôt avec un mouvement très doux. La courbe décrite autour de Battery permet de jouir, par une échappée, du beau panorama de la baie de New York. Le train s’arrête à la station de la rue Morris. Les portes de la station s’ouvrent, pour laisser ou prendre des voyageurs, et le train reprend sa marche. Si, de la hauteur à laquelle on voyage ainsi, on regarde dans la rue qui s’étend au-dessous de soi, on éprouve irrésistiblement la crainte d’un déraillement. »

Une vue du premier métro de New-York ne donne guère envie d’aller s’y risquer… La hauteur et la fragilité apparente des viaducs donnent la chair de poule.

Comme le montre la vue de l’époque ci-dessus, la hauteur au-dessus du sol est, en effet, impressionnante et l’on peut craindre qu’un déraillement ne précipite les trains dans le vide. Cependant, répondent les ingénieurs, un malheur de ce genre n’est guère possible, car il y a, en dehors des rails, une poutre massive solidement fixée aux attaches, et dépassant les rails d’une hauteur de 15 centimètres. C’est un contre-rail, capable de repousser une roue qui viendrait à dérailler. Dans de nouvelles sections, la voie a été protégée par deux poutres semblables, plus un revêtement eu charpente très large et très solide en dehors des rails, et en dedans par un revêtement plus petit.
Le train s’arrête à la 59e rue. Le trajet a duré près d’une demi-heure depuis Battery Park. Avec les voitures ordinaires, il aurait fallu près d’une heure. En continuant la route, on arrive à la 60e avenue. En 1874, le réseau ferré aérien ne dépasse pas cette 6° avenue. En 1882, le système forme, autour de l’île de Manhattan, un véritable chemin de ceinture.

Les caractéristiques techniques du premier réseau new-yorkais.

C’est sur le bord des rues les plus larges et des avenues que la voie du chemin de fer est posée. Elle est supportée par des colonnes de fonte, qui laissent au-dessous du tablier de la voie l’espace libre à la circulation. Par exemple, Broadway est la grande artère commerciale de New-York et sa chaussée est large de 15 mètres. Les colonnes destinées à soutenir le tablier de la voie ferrée au-dessus du sol ont donc été placées, non sur la chaussée, mais sur les trottoirs, près des bordures, à des distances de 16 mètres chacune. Chaque voie repose sur des poutres de 15,50 m de portée, sur 1,83 m de hauteur. Les poutres transversales sont en treillis, à intersection simple, de 1,83 m de hauteur. Toute cette construction est rivetée, contrairement à ce qui a lieu ordinairement dans les travaux américains. La superstructure est combinée pour résister à un effort de 2,750 kilogrammes par mètre de voie, soit 520 kg de poids mort et 2,230 kg de charge utile. Les semelles supérieures des poutres travaillent avec une contrainte mécanique de 2,800 kg/mm², tandis que les semelles inférieures en sont à 3,50 kg, et les contreforts à 5,60 kg.

Pour la ligne de la 6e avenue, on a placé la charpente métallique au milieu de la chaussée, en laissant, de chaque côté des trottoirs, un espace de 5,20 m. Les colonnes sont espacées transversalement de 7 mètres et disposées longitudinalement. Elles sont distantes de 15,06 m. Les colonnes montent jusqu’en haut des poutres longitudinales. Ces pièces sont formées de quatre fers méplats, de 0,30 m de largeur, sur 0,15 m d’épaisseur, réunis par quatre cornières. Les poutres longitudinales sont en treillis de 1,90 m de haut, avec assemblage par goujons. Les poutres transversales sont en tôle de 8 mm d’épaisseur. Le panneau du milieu est en treillis. Ces poutres sont solidement reliées aux colonnes et aux poutres longitudinales.

Premiers trains, premières déceptions et premières frayeurs pour les chevaux terrorisés par le bruit.


C’est le 25 avril 1878 que les premières voitures, au nombre de vingt, sont mises en circulation sur le chemin de fer aérien de la Compagnie Gilbert, installé sur Broadway et la 6e avenue. Ces voitures, qui ont 13,50 m de longueur, contiennent 40 personnes, et sont pourvues de roues à voile en papier durci avec des bandages d’acier dans l’espoir d’insonoriser le roulement : le problème commence donc à se poser… Elles sont tirées par des locomotives du poids de 6 tonnes et qui les remorquent à 50 km/h environ.

Ce chemin de fer traversant ou longeant les rues et les avenues de New York ne manque pas, on s’en doute, de faire montre de leurs nombreux inconvénients, et de soulever des critiques. Les adversaires de ce système lui reprochent la gêne considérable qu’il occasionne dans les passages des rues étroites, la frayeur que le bruit cause aux chevaux, et les embarras résultant quelquefois, pour la circulation, des piliers placés dans certaines rues. Les ingénieurs répondent cependant que ces piliers, qui soutiennent des constructions gigantesques, mais relativement solides et légères, « ne blessent pas la vue, et qu’en certains points, leur effet est même pittoresque »… et : « vu les services qu’ils leur rendent, les habitants de New-York pourraient leur pardonner quelques défectuosités et inconvénients. » Les décideurs actuels pratiquent la même langue…
L’inconvénient qui parait le plus sérieux, c’est le bruit occasionné par les trains, et la répercussion du son envoyé par tous les piliers métalliques qui supportent la voie. Il y a là une série de vibrations métalliques et de « ricochets » d’ondes sonores qui affectent très péniblement les nerfs des riverains. Quelques médecins de New York se sont même attachés à énumérer les maux qui doivent résulter, pour la population, de l’établissement de ce chemin de fer. D’après eux, le bruit infernal auquel sont exposés les habitants du voisinage, lors du passage des convois, aurait une influence fâcheuse sur leur santé. Il en résulterait une fatigue extrême, de l’insomnie, des maladies du cerveau, des méningites, etc. Bref, les New-yorkais découvrent le stress et la vie moderne avec un siècle d’avance…

Dans les années 1870, il y eut même des projets de métros “atmosphériques” pour New-York, avec un “wagon-piston” fonctionnant par dépression. Mais la nature du sous-sol n’acceptait guère la présence de tunnels et ce projet qui, aurait été plaisant aujourd’hui pour les écologistes militants, sera oublié.


Edison, l’inventeur du phonographe, présenté comme « l’oracle scientifique de New York » (sic) est chargé, en 1873, d’étudier le mal, et de trouver un moyen d’atténuer le bruit des vibrations produites par les trains. « Mais nous ne savons pas que son esprit inventif soit intervenu ici avec succès… » conclut Louis Figuier qui ajoute : « Nous dirons, d’ailleurs, que ces craintes sont exagérées. On se fera au bruit, et l’on restera en possession d’un moyen rapide de communication, qui a l’avantage de débarrasser la voie publique de la circulation des voitures. »

La ligne de la Huitième avenue : au niveau du dixième étage !

La ligne de la Sixième avenue s’interrompt au Parc Central, pour rejoindre, par la 52e rue, la ligne de la Neuvième avenue. Celle-ci, à son tour, rejoint la Huitième avenue, où elle se continue, à la hauteur de la 105e rue. La construction prend là des proportions grandioses. Le viaduc passe en courbe au-dessus du sol, à une hauteur considérable, et la hardiesse, la légèreté de cette courbe en S et du viaduc en ligne droite qui la prolonge, sont remarquables, même pour les ingénieurs américains qui, pourtant, en ont vu d’autres…  Les différences de niveau du terrain obligent d’élever les voies sur des piliers de 19,60 m de haut, reposant sur des dés en maçonnerie de 6m,70, à une altitude de 26,50 m au-dessus de la chaussée, soit à la hauteur du dixième étage ! La courbe en « S » a une longueur de 600 mètres, et le viaduc rectiligne qui lui fait suite, a une longueur de 735 m dans sa portion la plus élevée, soit à une modeste hauteur de 13 à 19 mètres.

Le métro de New-York dans les années 1920. C’est solidement construit, et très classique. À l’arrière-plan, les piliers de l’ “Elevated”.

La ligne des 21 millions de briques.

La ligne de la Sixième avenue est celle qui a présenté les plus grandes difficultés pour la construction des piliers verticaux, du fait de la présence du réseau, des conduites de gaz et d’eau et des égouts. En outre, en certains endroits, le sol est ou sans consistance, ou presque tout en rochers. Les fondations ont, en général, été construites sur pilotis, à raison de 20 pieux par pilier, et, dans certains cas où des difficultés locales se sont présentées, il a été nécessaire de battre jusqu’à 82 pieux pour un seul pilier et d’employer plus de 80 000 briques pour les arches nécessitées par les égouts et les grandes conduites d’eau de la ville.

On compte qu’il a fallu près de 1000 tonnes de fer pour les 2400 piliers de cette ligne. On a dû faire sauter à la dynamite 45 000 mètres cubes de terre, déblayer 60 000 mètres cubes de terre et battre 100 000 mètres linéaires de pieux. On a employé 37 000 mètres cubes de sable pour mortier, 70 000 barils de ciment et 21 millions de briques. La ligne a une longueur de 11,  850 km

Un « elevated » jugé très élégant et très luxueux, mais… quel vacarme !

C’est, du moins, l’opinion des ingénieurs, en ce qui concerne l’élégance et le luxe, et l’opinion des riverains en ce qui concerne le vacarme. Les stations aériennes sont entièrement construites en fer. Elles sont espacées à peu près tous les kilomètres, et, à moins ‘d’empêchement spécial, sont situées aux intersections avec les rues transversales. Elles sont pourvues de plates-formes couvertes, dépassant la station des deux côtés, sur une assez grande longueur, de manière à permettre de prendre et de déposer les voyageurs de quatre wagons à la fois, opération qui ne doit pas exiger plus d’une demi minute.

Des escaliers décrits comme élégants et recouverts permettent d’atteindre les stations du niveau de la rue. Il y en a deux à chaque arrêt, un de chaque côté de l’avenue, complètement indépendants, l’un pour la voie montante, l’autre pour la voie descendante. Les stations sont supportées par des fermes et treillis, analogues à celles de la voie, reposant sur des piliers très forts, là où les circonstances locales l’ont fait juger préférable.

Au-dessous des voies, à des distances convenables, on a placé de grandes caisses plates en fer, dans lesquelles les locomotives peuvent se débarrasser de l’eau et des cendres du foyer, un tuyau allant jusqu’à l’égout permet d’évacuer l’eau. Les prises d’eau se font, comme à l’ordinaire, à des endroits spéciaux de la ligne.

Les voitures sont pourvues de freins à air comprimé, manœuvrés directement par le mécanicien. Elles sont chauffées, en hiver, par une circulation d’eau chaude, au moyen d’une chaudière spéciale établie au-dessous de chaque voiture, et indépendamment les unes des autres. Aux extrémités de voitures, les plates-formes sont fermées des deux côtés par une grille en fer, munie de portes s’ouvrant par un mécanisme actionné par le conducteur, elles permettent, comme à l’ordinaire, de circuler d’un bout à l’autre du train.

En 1901, ce ne sont pas moins de 132 km de lignes aériennes qui occupent les rues de New York, formant le fameux « elevated ». On songe enfin à creuser un vrai métro souterrain et à traction électrique, tout en électrifiant aussi le « elevated » entre 1900 et 1904. Le courant est de 625v par troisième rail latéral. Manhattan est définitivement débarrassée de ses lignes aériennes au fur et à mesure de la progression du réseau souterrain, ce qui sera chose faite dans les années 1920.

Le plan du métro de New-York en 1949. On parle de “Transit System” : il est étonnant que les technocrates et bureaucrates actuels n’aient pas encore eu l’idée d’utiliser ce vocable pour désigner le bon vieux métro parisien.
Un petit tour à Chicago (les deux documents ci-dessus) où le plan du métro révèle toute l’originalité de ce réseau dit “The Loop” vu son tracé en boucle, et où le bruit et l’encombrement dans les rues crée un enfer immortalisé par le film “French Connexion” et sa mémorable poursuite.

À Berlin, ce sera tout aussi bruyant.

Si, dès 1882, Berlin peut s’enorgueillir d’avoir un chemin de fer métropolitain bien avant d’autres capitales européennes, la ville a choisi une solution qui n’a guère facilité les choses et que d’autres villes ont refusée : le chemin de fer aérien façon New-York ou appelé, ici, « Hochbahn ». La construction ne se fit pas facilement, mais put être menée à son terme.

La ville de Berlin a un projet de Stadtbahn (ligne transversale urbaine) dès 1872, mais celui-ci est constamment modifié, car les édiles berlinois voudraient trouver, dans leur chemin de fer métropolitain, tous les avantages réunis, notamment celui du transport des marchandises, ou celui du transit des trains de voyageurs grandes lignes. Il fallait des lignes à quatre voies dont deux pour les marchandises, mais aussi des raccordements directs avec les grandes gares, etc. À force de trop en vouloir, plus rien n’est faisable… et, pendant une dizaine d’années, entre 1872 et 1882, les discussions vont bon train (si les vrais, eux, ne roulent pas encore) et le projet est peu à peu révisé à la baisse.

L’idée d’un service des marchandises est abandonnée. En effet, la ville a pris de l’extension entre temps et la nécessité de transporter d’abord des voyageurs devient de plus en plus prioritaire. L’intégration du nouveau réseau dans les lignes classiques existantes est maintenue : c’est cette exigence qui implique que le réseau ne soit pas souterrain, mais au moins au niveau du sol. Pour ne pas gêner la circulation dans les rues par une multiplication de passages à niveau, il sera, en fin de compte, surélevé.

Le Stadtbahn, construit pour desservir le centre de Berlin en 1882, ne suffit bientôt plus. La municipalité de Berlin décide, peu après le début du siècle, de construire un nouveau chemin de fer, mais électrique, et uniquement de type métropolitain. A nouveau le refus d’une ligne souterraine se manifeste, et, puisque la place ne manque pas et puisque le terrain est plat, la ville décide, une nouvelle fois, de construire une ligne surélevée, entièrement sur une succession de viaducs.

La ligne nouvelle rejoint deux stations de la Stadtbahn, le Jardin Zoologique et pont de Varsovie, mais en faisant une boucle par le sud, en passant par la Mollendorfer Platz, et la gare de Potsdam, au sud du Landwehr Kanal. Elle est inaugurée en 1902.

Des stations berlinoises, mais somptueuses.

Comme le montrent les illustrations, le style des stations est, pour le moins, très surchargé architecturalement et contribue, à n’en pas douter, au charme très « kitsch » de la grande métropole allemande. Clochetons, statues, toitures mouvementées sont de rigueur pour les bâtiments, tandis que les nombreux viaducs et ponts métalliques enjambant le Landwehr Kanal sont des chefs-d’œuvre d’ornementation et de volutes forgées. La station de Hallesches Tor ou celle de Mollendort Platz semblent être des cathédrales baroques.

Mais l’intensification de la circulation automobile durant les années 1930 oblige la ville à construire d’autres lignes, souterraines, cette fois, et formant ce que l’on appelle aujourd’hui le U-Bahn. Le Berlin Verkehrs-Betriebe (BVG) gère un grand réseau de 134 km, alimenté par 3ᵉ rail sous 780v, et comportant 9 lignes et 160 stations. Un matériel moderne circule depuis les années 1970, et des rames entièrement automatiques ont fait leur apparition sur la ligne N°4. Le trafic total est de l’ordre de 574 millions de voyageurs par an.

Station de métro berlinoise en 1902. Le style est somptueux, et “kitch” à souhait.
Une autre station de métro berlinoise à la même époque : à Paris, on n’a pas osé construire de telles stations sur les berges de la Seine.

À Londres on enterre le métro, ses problèmes et son bruit.

Pour être ancien, il l’est, et Londres mérite le titre très envié de première ville du monde desservie par un métropolitain, bien avant les autres capitales. Et, en outre, ce chemin de fer l’était vraiment en ce sens qu’il marchait à la vapeur, soignant ainsi les poumons avec des inhalations efficaces…. et faisant la fortune des blanchisseurs et des teinturiers, vu les couleurs données aux habits.

C’est lui, l’inventeur du chemin de fer métropolitain : Charles Pearson. Cet innovateur a l’idée de faire creuser la première ligne urbaine souterraine du monde au début des années 1860, et la ligne Paddington-Farringdon est ouverte en 1863 sur une courte distance de 6 km environ, et sous l’un des axes les plus chargés de la capitale anglaise, alors la plus grande ville du monde. Le succès est tel, malgré la fumée et la vapeur que les locomotives exhalent à cœur joie, que d’autres lignes suivent, et on peut dire qu’en 1880, à une époque où l’ensemble des grandes villes du monde en sont encore à des transports de type médiéval avec des chevaux et des voitures, Londres a déjà un véritable réseau moderne de chemins de fer métropolitains. L’électrification de ce réseau est amorcée à partir de 1906, apportant le mode de traction définitif que réclame ce type de chemin de fer.

Le chemin de fer souterrain de Londres est constitué de deux types différents: le plus ancien, construit près du sol par chantier à ciel ouvert puis recouvert, a des tunnels à voie double et un matériel roulant au gabarit proche de celui des British Railways; le plus récent, construit à grande profondeur, a des tunnels à voie unique et un matériel à gabarit restreint de forme circulaire, donnant des voitures de forme cylindrique et un plafond bas, ce qui lui a valu le surnom de « tube » de la part des londoniens. Mais les deux systèmes ont en commun de venir à la surface du sol en s’éloignant du centre de la ville et de gagner des villes de banlieue à l’air libre, ou sur des viaducs.

Le type le plus ancien a été construit entre 1863 et les années 1880, par des compagnies privées, et comprend une ligne circulaire, ou Circular Line, autour du centre de Londres, donnant des correspondances avec un grand nombre d’autres lignes. Ce sont ces lignes-là qui furent d’abord exploitées en traction vapeur, avant l’électrification intégrale entreprise à partir de 1906. Par contre, le premier forage du « tube » commença en 1890, et avant 1914, un grand nombre de lignes, déjà, se ramifie sous Londres. L’ensemble des lignes fut regroupé en 1933, formant un seul réseau public, et l’on pensa, à l’époque, que le besoin de lignes nouvelles ne se faisait plus sentir.

Le premier “tube” de Londres, donc le premier vrai métro urbain londonien, est le “Central London Railway” ouvert en 1902. De robustes et bruyantes “Boîtes à sel” se chagent de la traction.
Sur une ligne concurrente, le “Central & South London Railway”, les motrices n’ont pas de suspension ni de moteur suspendu et créent des fissures dans les murs des immeubles !

Mais durant les années 1960, l’accroissement du trafic automobile donne des embouteillages tels qu’il faut bien ouvrir de nouveaux chantiers. Deux nouvelles lignes urbaines sont créees au centre de Londres même, la Victoria Line et la Jubilee Line, inaugurant de nouvelles techniques comme ces tunnels entièrement en béton et des trains à pilotage automatique. La Piccadily Line, pour sa part, est prolongée en 1977 loin en direction de l’Ouest jusqu’à l’aéroport de Heathrow qui se trouve rattaché directement au centre de Londres d’une manière rapide et efficace – contrairement au cas de bien des grands aéroports mondiaux ! Mais l’opération de la rénovation de l’Est de Londres entraîne la création, en 1987, de la ligne du Docklands Light Railway qui joue un très grand rôle dans la réussite de l’intégration des habitants dans cette nouvelle ville créee de toutes pièces à la place du port.

Le “tube”, en parcours aérien, vu en 1936. Le gabarit très restreint est tout aussi peu attractif.
Le métro de Londres, aujourd’hui : toujours le même “look”, indémodable, donc “so british”. Rien n’a changé et rien ne changera.
Rien n’a changé, non plus, en ce qui concerne les voies. Prière de ne pas se promener dans cet imbroglio électrique !

Le plus grand métro du monde est anglais, donc.

Aujourd’hui encore, le réseau de Londres est le plus important du monde avec 5 de ses lignes atteignant des villes situées à environ 25 km du centre de la capitale. Le réseau comprend plus de 420 km de lignes (New-York atteint 380, et Paris 200, par exemple) en voie normale de 1435 mm, alimentées en majorité selon le curieux système à 4 files de rail (un rail positif + 600v, un rail négatif -600v, et deux rails de roulement neutres), 273 stations, plus de 4000 véhicules, et transporte plus de 760 millions de voyageurs par an.

En URSS : le métro sera le palais du prolétaire.

Architecturalement, c’est sans nul doute le plus beau du monde: les dirigeants de l’URSS des années 30 voulaient que le peuple aille au travail en traversant des palais…. La valorisation du travail et du peuple sont à l’honneur. Et, à l’époque, il réunit ce que les ingénieurs russes ont pu trouver de mieux, techniquement, sur les autres réseaux du monde.

Image du socialisme triomphant, le métro de Moscou laisse croire qu’il a été voulu par les Soviets, et très peu de gens savent que, du temps des Tsars, un projet existait déjà en 1902, la Russie traditionnelle s’ouvrant au monde moderne et attirant les investisseurs étrangers. Malheureusement, les Tsars eurent d’autres préoccupations et, au sein d’une histoire devenue mouvementée, ils oublièrent les transports en commun et leur politique sociale.

Inauguré le 15 mai 1935, le métro de Moscou fait sensation à l’époque par le luxe de ses stations qui ne dépareraient pas les palais royaux et impériaux les plus notoires. À l’époque, le réseau est prévu avec 6 lignes diamétrales et une ligne circulaire, le tout totalisant 80 km de développement. Pour le moment, on inaugure un tronçon de 8 619 m entre Sokoliky et la Place Krimskaya, plus un embranchement de 2 418 m entre la bibliothèque Lénine et la place Smolensk.

La main d’oeuvre est essentiellement consituée de mineurs enthousiastes mais dont la compétence limitée en matière d’ingénieurerie de travaux publics souterrains ne manque pas de poser des problèmes. Il faut trouver 10 000 ouvriers et des ingénieurs spécialisés dans ce dernier domaine pour que les choses avancent mieux, et, en fin de compte, par manque de main d’oeuvre et dans le cadre de l’émancipation féminine,  on ajoute des dizaines de milliers de femmes pour creuser le tunnel: en fin de compte 75 000 personnes creusent sous Moscou! Le gabarit des tunnels est de 5,46 m, vu la largeur du matériel et l’écartement de 1,524 m.

Des escaliers mécaniques vertigineux.

Le métro est creusé à grande profondeur, vu la faible qualité du sol saturé d’eau, et qu’il a fallu congeler par endroits afin de le durcir provisoirement. Cette profondeur nécessite la pose d’escaliers mécaniques absolument vertigineux, descendant directement à 50 mètres sous le sol, et pouvant transporter 13 000 personnes à l’heure. Les stations comportent un quai central entre les deux voies, et sont décorées de céramique ou de marbre provenant de toutes les parties de la Russie, chaque station évocant ainsi une région. Des lustres somptueux éclairent les stations à la manière d’une fête royale à Versailles!

Le matériel roulant moscovite.

Les trains sont formés de l’accouplement de 2,3 ou 4 unités formées chacune d’une motrice et d’une remorque. Les voitures, entièrement métalliques et soudées, ont une longueur de 18,9 m, 4 portes de chaque côté et 55 places assises, plus 115 debout (capacité théorique largement dépassée en service…). Chaque motrice a 4 moteurs de 200 ch alimentés en 825 V continu par rail conducteur latéral. Pour l’époque, la signalisation est très moderne, avec un bloc-système automatique autorisant en toute sécurité une vitesse de 60 km/h, donnant une capacité de transport remarquable de 60 000 voyageurs/heure. Le prix du billet (trajet illimité) est de 50 kopecks au début de l’exploitation, puis il ne cesse de baisser au fur et à mesure que le matériel roulant augmente en nombre, pour tomber à 30 kopecks – un prix très bas qui durera tant que durera le régime communiste. Aujourd’hui, ce métro qui a été continuellement agrandi même pendant la guerre, connaît l’un des trafics les plus importants du monde avec 2 500 millions de voyageurs par an.

Plan du métro de Moscou, en 1936.
Station de métro à Moscou, en 1936. Le style ne manque pas de grandeur.
Station de métro, dans le plus pur style soviétique, construite en 1949. Les rames, enterrées très profondément, ne joignent pas leur voix et leurs chants à ceux du peuple uni et travailleur.

La RGCF s’intéresse au problème en juillet 1905.

La Revue Générale des Chemins de fer publie son premier article concernant le bruit des métros urbains en juillet 1905 et montre qu’à New-York en 1871, puis en  1897 avec le viaduc en acier reliant la Harlem River à la 110e rue, comme à Chicago en 1905, la seule solution possible est de poser les rails sur un matelas de matériaux « isolants au point de vue de la sonorité » comme le plomb, le feutre, ou l’asphalte.

Les croquis parus dans la RGCF page 81 montrent l’emploi d’un coffrage formé de poutres longitudinales en bois, disposés de part et d’autre des rails, et servant de récipient à un mélange de sable et d’asphalte. Par ailleurs, les rails sont posés sur des semelles en plomb interposées entre le patin du rail et les traverses en bois.

Mais la RGCF écrit que les ingénieurs de la compagnie, « après avoir essayé longuement de nombreuses substances, telles que sciure de bois mélangée avec de l’asphalte, arrivèrent à la conclusion qu’aucune de ces matières placées autour des rails et sous les traverses ne pourraient résoudre efficacement le problème, car, bien qu’elles amortissassent un tant soit peu le bruit, elles n’étaient pas assez consistantes pour maintenir la voie. On dut donc recourir à une méthode plus radicale, qui a consisté à relever les rails de la voie, et les isoler de la structure métallique par un lit de ballast et des traverses en bois. » Savourons le “amortissassent” ! Sic… Pour le plaisir, on ne peut regretter que, à la RGCF comme dans la presse française, l’imparfait du subjonctif se soit perdu en un siècle de bon usage de la langue française !

Toutefois, des essais ont été faits avec des rails relevés et munis de traverses sciées, placées sur un ballast de pierres cassées. « L’amortissement du bruit causé par le passage des trains fut tellement réduit, que les personnes demeurant à proximité cessèrent leurs plaintes et abandonnèrent leurs demandes en dommages-intérêts » note la RGCF. Ajoutons que la présence du ballast fait que l’on supprime le jour existant entre les traverses : or ce jour permet à la lumière de parvenir, à travers les voies et en passant entre les traverses, jusqu’aux trottoirs et aux rez-de-chaussée des maisons en contrebas. Les habitants se plaindront désormais de l’obscurité… Lumière et bruit, ou obscurité et silence, il faut choisir.

« Cependant, la Compagnie a vérifié que malgré l’importance de l’amélioration obtenue, le remède n’était pas complet et qu’en somme, il était bien difficile d’arriver à la perfection. Il a été facile à la Compagnie de vérifier cette assertion, car sa ligne présente successivement les quatre genres de construction que l’on rencontre sur tous les métropolitains. Les trains venant du nord passent tout d’abord sur un pont-levis sur lequel les rails reposent directement sur les poutres du pont, ensuite sur le viaduc en acier muni d’un ballast en roche, puis sur le viaduc en pierre muni d’un ballast analogue au précédent, et enfin, dans le tunnel, ressortant au niveau de la rue un peu plus loin.
Quelles que soient les précautions que l’on ait prises, le bruit a toujours été plus grand sur le pont-levis, moindre sur la structure en acier munie de ballast et bien moindre encore sur le viaduc en pierre, et enfin pour ainsi dire nul dans la rue au-dessus du tunnel où les trains sont complètement enfermés. Le bruit ne peut donc être presque entièrement éliminé qu’aux endroits où les trains sont complètement entourés par une masse de matériaux non métalliques et dépourvus de vibrations.

La RGCF note que l’une des premières tentatives faites en Europe pour amortir le bruit sur les viaducs métalliques a été faite avec succès en 1893 sur le chemin de fer électrique élevé à Liverpool en Angleterre. La voie a été établie sur des longrines en bois isolées de l’ossature métallique par du ballast et de l’asphalte. De même, à Berlin, des solutions analogues sont employées avec une pose de la voir sur un ballast composé de graviers volcaniques provenant de la vallée du Rhin.

Entendre le tic-tac de sa montre, placée à 30 cm de l’oreille, dans le métro ?

C’est possible dans certains métros, d’après la RGCF. Lisons ces lignes parues en 1922 :

« Le Métropolitain de Londres (Underground Railway) a fait étudier par un ingénieur spécialiste de Londres les moyens de réduire le bruit produit par le roulement des voitures. Le professeur Low a utilisé, dans ce but, un appareil qu’il appelle « Audiomètre » et qui enregistre automatiquement l’intensité des vibrations à l’endroit où il est placé. Il a trouvé que le bruit provenait exclusivement des bogies et des roues et que la caisse de la voiture fonctionnait comme résonateur. La partie principale de ce résonateur est formée par le double pavillon qui constitue un résonateur semblable à la caisse d’un violon.

Une autre source de bruit importante est la vibration des châssis des glaces qui, à cause de leur grande longueur, ont des vibrations qui leur sont propres. En conséquence, on a essayé de remplir d’amiante l’intervalle entre le pavillon et le toit intérieur. On a établi un montant intermédiaire dans la fenêtre, de façon à diviser en deux les châssis de glace. Enfin, on a placé au-dessus des roues des couvre-roues en bois pour réfléchir le son vers le sol.

Les résultats obtenus ont été surprenants. La voiture ainsi modifiée n’est plus sonore et l’on peut parler sans élever la voix d’un bout à l’autre de la voiture, et de même, alors qu’il était impossible d’entendre le tic-tac d’une montre en la plaçant à son oreille, on l’entend maintenant distinctement en plaçant la montre à 30 cm de l’oreille. »

Enfin, en 1950, le pneumatique peut « remettre les Elevated en faveur ».

Les essais faits par la firme Michelin avec des autorails utilisant des roues à pneumatiques, entrepris entre les deux guerres, montrent, entre autres avantages procurés par une adhérence améliorée, un grand silence de roulement (voir nos différents articles parus sur ce site en tapant directement “Lamming-Michelines” sur Google). Cet enseignement restera entendu par les ingénieurs du métropolitain de Paris, et, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des essais sont entrepris en vue de la circulation de rames de métro sur pneus dès 1950. Il est vrai que les pneumatiques ne sont plus les mêmes que ceux des années 1930 qui ne pouvaient admettre de fortes charges, et, surtout, il est possible, pour la RATP, de construire des pistes de roulement permettant l’emploi de pneumatiques larges, chose qui était impensable pour Michelin dont les autorails devaient s’adapter au roulement direct sur les rails classiques des grands réseaux de l’époque. On retiendra que la charge est, à l’époque, d’à peine 1200 kg par pneumatique pour les pneumatiques Michelin sur rails des années 1930, ce qui aurait demandé une trentaine de roues sous une remorque ou une motrice de la RATP pouvant dépasser la trentaine de tonnes à pleine charge. C’est pourquoi la RATP ne se lancera dans l’expérience du roulement sur pneus que très tardivement et seulement dans les années 1950.

La RGCF rend compte de ces essais dans de nombreux articles parus au début des années 1950, et principalement dans son numéro d’Avril 1954. Il est certain que le silence de roulement n’est nullement la motivation première des ingénieurs qui visent d’abord des démarrages et des freinages plus énergiques du fait de la grande adhérence des pneumatiques, cette caractéristique permettant d’augmenter le débit des lignes, notamment la ligne N°11 dont les déclivités atteignent 40 pour mille. La construction du matériel roulant, qui ne doit plus résister aux vibrations, peut être allégée et simplifiée, dont elle coûte moins cher. Les moteurs sont plus légers et coûtent moins cher. La consommation d’énergie est moindre, malgré un coefficient de roulement pourtant doublé par rapport à celui du roulement classique avec des roues en acier sur des rails en acier. Voilà l’essentiel des motivations. Mais le silence de roulement est pourtant là et il apparaît, d’emblée surtout pour les utilisateurs et les riverains des lignes aériennes, comme étant le bénéfice le plus important.

Lisons la conclusion de l’auteur de l’article écrit par Henri Ruhlmann, Ingénieur Général des Services techniques de la RATP. : « Quelles sont les possibilités d’avenir de cette nouvelle technique ? La première application possible est évidemment sa généralisation aux chemins de fer métropolitains pour lesquels elle a été conçue. Le problème se présente d’ailleurs différemment selon qu’il s’agit de la transformation d’une ligne déjà existante ou d’un métro neuf”.

Indépendamment des avantages énumérés plus haut pour un métro existant, l’adoption de voitures sur pneus permet également des économies de construction. La suppression des traverses et du ballast réduit la section du tunnel, ce qui entraîne des économies de terrassement. Les pistes de roulement coutent moins cher que la voie classique et exigent moins d’acier. Le rail, n’ayant plus à assurer que le retour du courant et le fonctionnement de la signalisation, a une section réduite. L’excellente adhérence facilite le problème du tracé puisque les lignes peuvent suivre de très près la surface du sol, sous les voies publiques et s’accommoder de rampes que ne peuvent gravir des trains sur roues métalliques.

Un deuxième champ d’application, toujours relatif au chemin de fer métropolitain, est le métro aérien, condamné parce qu’il est bruyant et inesthétique, malgré son avantage de bas prix de revient. Les voitures sur pneumatiques, silencieuses, roulant sur un viaduc, au béton précontraint, qui n’exige pas d’entretien, peuvent remettre les « Elevated » en faveur. Le métropolitain sur pneumatiques peut ainsi apporter aux habitants des grandes villes un confort considérablement accru, sans dépenses supplémentaires. »

Bien que la ligne N°11, entièrement en souterrain, soit équipée la première, il est certain que la RATP ne fera pas attendre plus longtemps les riverains de la partie aérienne de la ligne N°6, notamment ceux des abords de la station Passy, pour qu’ils puissent bénéficier du silence des pneumatiques. Les rames du métropolitain passent désormais devant les fenêtres bourgeoises comme sur la pointe des pieds, faisant entendre un murmure à peine audible, que le tintement des cuillers contre les tasses de thé suffit d’ailleurs à masquer. Le progrès, donc, se mesure aisément à l’aune de la discrétion.

Les premiers essais parisiens d’un métro sur pneus en 1955. Enfin, le silence vint.
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