L’autorail en voie métrique ? C’était souvent du Billard.

Les autorails ont sauvé le chemin de fer rural ou montagnard, faisant entendre leur trompe à deux tons dans les campagnes et les vallées à une époque où le chemin de fer se mourait, tué par l’automobile et les « décideurs ». Grâce à ces modestes autorails, certains réseaux ont survécu jusqu’à aujourd’hui, comme celui de Provence (Train des Pignes), de Corse, ou sous la forme d’automotrices électriques pour les métriques de Savoie ou de Cerdagne (Train Jaune). Les métriques, sauvés par des trains légers et confortables, continueront longtemps à assurer des services irremplaçables. Mais la presque totalité des réseaux en voie métrique ont disparu, même l’immense Réseau Breton avec ses 400 km de lignes, et si la France avait 12.500 gares en 1933, et si elle n’en a plus que 3000, la plupart des 9000 gares manquantes étaient rurales et souvent en voie métrique.

Avant les Billard des années 1930, les débuts de l’autorail se font sous la forme d’autobus adaptés au rail tant bien que mal. La présence d’une remorque témoigne de la supériorité du rail, cependant. Portant fièrement le béret, le conducteur affiche une fière conviction dont le chemin de fer d’intérêt local, qui est en train de mourir, a un besoin vital.

Revenons au début des années 1920. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, un certain nombre de constructeurs d’automobiles s’intéressent aux chemins de fer secondaires et vicinaux dont les petites lignes à voie métrique connaissent un trafic en chute libre. Ce n’est pas qu’ils s’apitoient sur la mort des chemins de fer, bien au contraire… Un concurrent mort est un bon concurrent. Mais la grande crise économique n’épargne par le marché de l’automobile et ces constructeurs cherchent de nouveaux débouchés pour faire tourner leurs usines. Mais, techniquement, l’automobile, devenue fiable, économique, et rapide, remplit les routes et vide les trains, surtout sur de courtes distances et pour le transport porte-à-porte.

La lenteur, la vétusté et la saleté sont l’”image de marque”, pour utiliser un terme actuel, des chemins de fer secondaires à voie métrique de la France des années d’entre les deux guerres, avec des lignes exploitées sans moyens et sans personnel en nombre suffisant par de petites compagnies sans envergure ni expérience. Si, avant 1914, ces chemins de fer “a minima” suffisaient encore parce que les automobiles étaient encore rares, à partir de 1925, le développement du réseau routier et, surtout, l’arrivée en masse sur le marché national d’excellentes petites automobiles populaires signées Citroën, Mathis, Peugeot, Renault ou Rosengart, voilà ce qui va mettre à mal ces braves « tortillards » à qui l’on trouvait pourtant tant de charme et d’utilité, mais au temps de la Belle Époque.

Les représentants de commerce, les paysans, et même Monsieur le curé délaissent le chemin de fer poussiéreux et lent pour la B14 Citroën ou la 201 Peugeot qui, à 50 km/h affichés par l’aiguille sautillante sur le cadran du tableau de bord, vont bien plus vite, acceptent toutes les charges et surcharges – surtout sous la forme du torpédo qui accueille tout le monde, y compris les cochons et les veaux… Peu à peu, les petites gares des lignes rurales se ferment.

Il faut dire que le voyage en train sur les lignes départementales et dites “d’intérêt local” est localement inintéressant, voire désespérant, pour ne pas dire décourageant. C’est à fuir ! Les passionnés de voie métrique actuels, réunis en associations certes admirables, nécessaires, et productives, ne savent pas que les trains et les lignes qu’ils ont sauvées avec tant de dévouement et de passion étaient devenus dans les années 1930 des repoussoirs, honnis, détestés, fuis par les derniers clients qui rêvaient tout simplement de pouvoir aller à la préfecture du département sans voyager toute la journée et même une partie de la nuit à une moyenne de 10 km/h, secoués dans un wagon glacial et venté. Le train à voie métrique est trop inconfortable, sale, lent, avec sa moyenne commerciale de 15 à 20 km/h qui impose six heures de trajet aller et autant au retour, sur de rudes bancs en bois ciré, pour aller à la grande foire de la préfecture, pourtant distante d’à peine 60 km.

Autorail Tartary, vu sur le réseau des Deux-Sèvres, en 1923. Le bilan de ces engins fut assez médiocre et leur disparition fut rapide. Le petit garçon pose pour la postérité. Quinze après, il sera cheminot à la (toute jeune) SNCF.
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, les autorails “modernes” (Billard, Renault, etc.) ne sont pas encore venus à bout de ces innombrables autocars transformés qui, inconfortables, se dandinant sur les voies inégales, puant les gaz d’échappement, assurent des moyennes dissuasives. Ici un De Dion-Bouton type NC circulant sur le réseau métrique de l’Aube qui en est à son crépuscule.
La fin des réseaux en voie métrique est proche : un des derniers autorails Billard, en gare de La Voulte-sur-Rhône, dans les années 1960. Dans cette gare, alors en deux écartements, le réseau en voie métrique du Vivarais avait des quais communs avec le PLM puis la SNCF avec arrivée en gare sur une voie à trois files de rails. La voie SNCF est sur la droite, hors du cliché.

Le dernier atout des métriques.

L’autorail pour voies métriques marque la volonté, pour les chemins de fer français, de ne pas mourir, tués par la concurrence routière des années d’entre les deux guerres. Les locomotives à vapeur, datant du début du siècle, n’assurent plus qu’un service trop lent et remorquent des rames dont les voitures en bois sont d’un autre âge.

De Dion, ou Berliet, sont parmi les pionniers de cette conquête du marché du rail avec des véhicules issus des techniques de l’automobile. Ils construisent alors des engins à quatre roues, avec moteur de type automobile donnant 40 à 80 ch, et une carrosserie inspirée de celle des autobus de l’époque. L’autorail pour lignes secondaires est né, mais ne se montre guère performant sur le plan mécanique : un moteur, un embrayage et une boîte de vitesses de type automobile ne peuvent guère, en effet, « encaisser » durablement les longs et lents démarrages du type ferroviaire, les longues marches à bas régime. Mais le chemin de fer est dans une situation si désespérée qu’il lui faut bien songer, vers les années 1930, à se faire client des grands constructeurs automobiles et à leur acheter des autorails, puisque c’est une solution de remplacement de la traction vapeur, trop onéreuse.

Les Sociétés exploitantes de chemins de fer métriques voient aussitôt tout le parti qui pouvait être tiré de l’utilisation des autorails et la “traction nouvelle” (c’est aussi le titre d’une revue ferroviaire de l’époque) fit son apparition sur la voie métrique dès les premières années qui suivent la guerre. À la vérité, les premiers véhicules sont loin de ressembler aux autorails mis en service durant les années 1930, car ils n’en ont ni la puissance ni le confort et ressemblent le plus souvent à des autocars de l’époque montés sur des roues à boudin pour la circulation sur rails.

La puissance motrice est fournie par des moteurs à essence de faible puissance du type utilisé sur les camions. Néanmoins, ces ancêtres de la “traction nouvelle”, dont l’aspect archaïque nous fait sourire, furent appréciés des voyageurs en raison de l’augmentation de la vitesse due surtout à la réduction de poids, et par les exploitants à cause de l’exploitation économique qu’ils permettaient de réaliser. Ces véhicules automoteurs remplacent un certain nombre de trains à vapeur de 1923 jusqu’à 1930.

Les métriques se réveillent.

À partir de cette époque, les progrès faits dans la technique des moteurs diesel et les essais satisfaisants réalisés, à force de ténacité, par les constructeurs et par les anciens Grands Réseaux, amènent une évolution rapide de l’autorail pour voie métrique. Les réseaux secondaires à voie métrique de la métropole et des colonies, en face de la concurrence de plus en plus importante due à la mise en service massive de nouveaux services d’autocars routiers et devant la baisse continuelle du trafic, envisagent le remplacement systématique des trains de voyageurs à vapeur et des anciens autorails par de nouveaux véhicules plus confortables, plus rapides, le plus souvent montés sur des bogies et capables de fortes accélérations.

De nombreux constructeurs s’intéressèrent à la question et étudient des autorails dérivés des types à voie normale et adaptés au service spécial de la voie métrique, de sorte qu’à partir de 1932 le nombre des véhicules modernes mis en service croît très rapidement.

Le réseau à voie métrique de la France métropolitaine est alors encore très étendu puisque, en 1938 et malgré la suppression d’un certain nombre de lignes particulièrement déficitaires, il comprend plus de 5800 km de lignes desservies par des autorails.  L’effectif total des autorails à voie métrique en France au 1er juillet 1938 est de 258 unités. La puissance des moteurs a été notablement accrue, elle est souvent de l’ordre de 135 à 150 CV et elle atteint dans certains cas plus de 300 CV. La puissance massique est d’environ 10 CV par tonne. Elle atteint plus de 12 CV dans le cas de deux autorails Billard équipés avec un diesel CLM de 250 CV mis en service à la fin de 1938.

Pour augmenter la souplesse d’exploitation et faire face aux pointes du trafic, la plupart des autorails sont capables de remorquer une voiture normale du parc ou un véhicule spécialement construit à cet égard, lequel bénéficie alors de la légèreté qui peut être obtenue avec les procédés modernes de construction.

Sur tous les types mis en service depuis 1935, on retrouve les diverses solutions classiques éprouvées sur les autorails à voie normale de la SNCF. Ces constructeurs sont, sans nul doute, ceux qui innovent le plus et conçoivent, pour les réseaux métriques français, un engin tout à fait spécifique, et dont les caractéristiques techniques sont pensées en fonction des contraintes de la traction ferroviaire, d’une part, et, d’autre part, de la circulation sur voie ferrée.

Les autorails français en voie métrique en 1938.

ConstructeursTotal du nombre d’autorails en 1938Nombre d’autorails construits depuis 1930
Billard5454
Brissonneau & Lotz3232
De Dion Bouton10461
Renault196
SCCF3416
VFI & Crochat-Schneider1513
TOTAL258182

Les autorails Billard, très adaptés à la voie métrique.

L’autorail Billard, fabriqué à Tours par l’entreprise Pierre Billard, est adopté par la grande majorité des réseaux secondaires de la fin des années 1930. D’abord, c’est un engin circulant sur des bogies, ce qui lui garantit une bonne inscription en courbe, même à faible rayon, et une grande douceur de roulement, une excellente stabilité, même sur des voies médiocres et mal nivelées. Il est conçu comme un autorail et non comme un autobus : doté de cabines de conduite aux deux extrémités, comportant même une version articulée à deux caisses sur trois bogies, ce type d’autorail est mû par un moteur diesel d’environ 170 kW et a une transmission mécanique.

La construction Billard est caractérisée par l’abaissement du centre de gravité, et surtout un bogie merveilleux acceptant de rouler en vitesse et en douceur sur les pires voies qui soient, avec le grand écartement des ressorts d’appui de la caisse dans le sens transversal, une suspension très complète avec dispositifs d’amortissement des déplacements de traverses danseuses. Les bogies à double suspension sont du type chemin de fer très allégé. Dans leur construction, il est fait un très large usage de la soudure.


La transmission est mécanique, en général par une boîte Minerva, ou Winterthur. Le moteur, la boîte et la transmission aux deux essieux sont montés sur un des deux bogies. L’autre bogie est simplement porteur. Grâce à ce montage et à l’isolement général de la caisse par application d’un revêtement à base d’amiante, les bruits et les vibrations du moteur ne parviennent pas jusqu’aux voyageurs. Les caisses sont du type poutre dont tous les éléments participent à la résistance. L’acier utilisé est un acier au chrome-cuivre semi-inoxydable. La plupart des assemblages sont soudés à l’arc ou par points. La réalisation générale est particulièrement simple et robuste. Suivant les types, la vitesse maximum varie entre 65 et 80 km à l’heure.

Ces autorails sont équipés avec des moteurs diesel de différentes puissances suivant la capacité de l’autorail, le profil de la ligne et le programme d’exploitation prévu par la Compagnie intéressée. Les moteurs construits par Berliet, CLM, MAN, etc. ont une puissance de 80 à 250 CV. Dans le type A 210 D équipé avec un moteur MAN de 210-225 CV, la longueur de la caisse est de 16 m,765 pour une largeur de 2 m,400 et le poids à vide est de 22 tonnes en ordre de marche. Le nombre de places offertes est de 57, dont 42 assises, il y a deux postes de conduite, un compartiment à bagages de 3 m², un cabinet de toilette. Le freinage est assuré par un frein à air comprimé direct et par un frein électromagnétique.

Autorail Billard et remorques, vu dans le Tarn en 1955.
Autorail Billard A-80-D, vu sur le réseau du Vivarais. Etat de préservation actuel et soigné, heureusement.
Autorail Billard A-80-D dans, disons, la situation naturelle de cet engin : perdu dans les broussailles sur une petite voie modeste et rurale. Nous sommes en Dordogne.
Autorail Billard A-150-D sur le réseau des “Tramways d”Ille-et-Vilaine” (TIV) en voie métrique qui jouxte et prolonge le magnifique Réseau Breton.
Autorails Billard sur le réseau actuel du Vivarais, dernier paradis et “réserve naturelle” pour les Billard préservés; race en cours d’extinction cela va sans dire.
Le remarquable autorail Billard A-150-D2 à deux caisses et sur trois bogies, dont un bogie central d’intercaisse que les TGV actuels ne renieraient pas.
Les réseaux en voie métrique français desservis pas les autorails Billard entre 1934 et 1986, y compris pour les remorques circulant sur la ligne de Provence et en Corse.


Les autorails Brissonneau et Lotz, techniquement très évolués.

Ces autorails se caractérisent par l’adoption de la transmission électrique, même pour les autorails de petites puissances. La régulation de puissance, obtenue par la variation de la vitesse du diesel et par le réglage automatique de l’excitation de la génératrice par un jeu de contacteurs vibrants, constitue une réalisation très simple et ingénieuse, qui permet d’utiliser au mieux la puissance du diesel. Elle limite, en outre, automatiquement, l’intensité susceptible de traverser le circuit principal, même en stationnement, en cas de difficultés de démarrage. Cette particularité rend la conduite extrêmement facile et permet des démarrages automatiques d’une grande souplesse.

Les groupes moteurs-générateurs sont placés dans les caisses, les diesel sont donc particulièrement accessibles et à l’abri des réactions de la voie. Les autorails simples, équipés avec un moteur diesel de 125-150 CV, sont montés sur deux bogies du type Brissonneau bien connu. L’un des bogies est porteur, l’autre est moteur, ce dernier est actionné par deux moteurs électriques, type traction, à suspension par le nez. La caisse est du type tubulaire, elle est en acier au chrome-cuivre soudé et rivé. La longueur totale de l’autorail est de I3,200, sa largeur est de 2 m,400 et son poids en charge de 20 tonnes. La vitesse maximum qui est de 90 km à l’heure en palier, est encore de 35 km à l’heure en rampe de 30 millimètres par mètre. Le frein direct à air comprimé permet d’arrêter le véhicule sur 150 mètres à la vitesse de 70 km/h.

Les autorails doubles du réseau du Var sont composés de deux véhicules articulés sur trois bogies. Les bogies extrêmes sont moteurs et le bogie central porteur. Ils sont équipés avec deux moteurs Berliet de 150 CV, la longueur totale des deux éléments est de 23 m,280 et un poids total en charge de 87 tonnes. Le nombre de places offertes est de 80 dont 60 assises. La vitesse qui est de 90 km/h en palier est de 42 km/h en rampe de 30 pour mille.

Autorail Brissonneaux & Lotz du réseau de l’Anjou, vers 1935. Ligne “moderne” et soignée.


Les autorails De Dion Bouton, signés d’un ancien grand nom de l’automobile.

C’est la société De Dion Bouton qui créa les premières automotrices légères à moteur thermique. Des séries de voitures à essence de ce constructeur furent mises en service dès 1905 en Hongrie et en Roumanie et y roulent encore. Une grande quantité d’automotrices légères sont sorties de ses ateliers et ont été mises en service en France à partir de 1923. En 1938, cette marque domine l’autorail français en voie métrique avec 104 exemplaires en circulation sur un total de 258.

Parmi les réalisations des années 1930, on peut mentionner les petites automotrices à deux essieux qui ont 8,30 m. de longueur et ne pèsent que 7,3 tonnes à vide. Elles sont équipées avec un moteur diesel de la marque Unic (licence Mercedes) développant 95 CV à 1 650 tours. La boite est à quatre vitesses et une marche arrière. Un frein à pédale agit sur les tambours des quatre roues. La carrosserie affecte la forme générale d’un petit autocar contemporain, avec une carrosserie aux formes arrondies : bref, une conception intégralement automobile !  

Les automotrices types MT et ND équipées avec moteur diesel Unie licence Mercedes, développant 105 CV à 1300 tours. Ces véhicules ont 10,125 m de longueur et pèsent 12,7 tonnes à vide. La caisse repose sur un bogie à l’avant et un essieu moteur à l’arrière. Tous les véhicules sont équipés avec le dispositif de retournement breveté par le Constructeur, en vue de permettre la circulation sur des lignes ne possédant pas de plaques tournantes, sans être obligé de prévoir deux postes de conduite.

Les automotrices type OC est le plus connu. Il est à deux bogies et à deux postes de commande, et sa caisse a l8,536 m de longueur totale. Le véhicule pèse à vide 10,5 tonnes. Il est équipé avec un moteur diesel à huit cylindres Willème (licence Deutz) de 180 CV placé sur la caisse à une extrémité. La transmission mécanique se fait par l’intermédiaire d’une boîte à quatre vitesses et d’un inverseur de marche, placé au
centre de la voiture, d’où partent les deux arbres de transmission allant chacun à un bogie. Les freins du système De Dion Bouton agissent sur les faces extérieures latérales des roues, ils sont commandés par l’air comprimé agissant sur un piston de cylindre de frein, situé à chaque extrémité des essieux.

Autorail De Dion-Bouton type JM préservé par l’Association des Chemins de fer des Côtes-du-Nord, et visible dans la baie de St-Brieuc. Vaut le déplacement, comme disent les guides… car c’est très rare, surtout dans cet état.
Autorail De Dion-Bouton OC1 à l’époque de son étonnante “modernité” de lignes, d’inspiration très Bugatti. Mais les vitesses n’étaient pas les mêmes : on était loin, très loin du “140 à l’heure” et plus proche du “40”…
Autorail De Dion-Bouton type OC2, visible, lui aussi, dans la Baie de St-Brieuc. Etat avant restauration.

La fin de l’époque classique avec Verney.

Le constructeur d’autocars Verney fournit, en 1950, les derniers types d’autorails de cette période classique, et les réseaux du Blanc à Argent et du PO-Corrèze les utiliseront. Longs de 18,53 m, pesant moins de 18 t, ces engins roulent à 80 km/h si les voies le permettent, et leur moteur diesel Willème de 140 ch actionne une transmission mécanique.

Le service est remarquable sur le réseau du Blanc à Argent, assurant un des derniers services voyageurs subsistant encore entre Salbris et Buzençais, sous les couleurs de la SNCF et après une modernisation de la caisse.

Les premiers autorails Verney en voie métrique en 1950.
Autorail Verney type rénové SNCF sur le Blanc-Argent en 1980.
L’espoir et le courage avec les nouveaux autorailsX-74500 SNCF des années 2000 sur le Blanc-Argent.

Renault, roi de l’automobile et aussi de l’autorail, et aussi en voie métrique.

Le grand constructeur fait étudier par ses services une version adaptée de l’autorail VH au gabarit réduit des chemins de fer métriques, et dont le poids est réduit à 30 tonnes. La série comporte 49 autorails de 8 types légèrement différents, ABH1 à ABH8, et livrés à partir de 1935 aux réseaux de Provence, des Côtes-du-Nord, de Corse, plus un autorail livré en Indochine.

Très puissants pour leur faible poids, très stables sur les voies médiocres des chemins de fer métriques, endurants, dotés d’un système de freinage performant, ces engins ont une carrière aussi exemplaire que longue, et certains d’entre eux circulent encore sur le réseau de Provence ou sur le réseau corse, relégués toutefois dans des services de navettes scolaires ou de renfort.

Le prix de revient kilométrique de ces autorails est de l’ordre du tiers seulement de celui des trains à vapeur qu’ils remplacent avec 35 % du coût de la vapeur en 1937 sur la ligne Nice-Digne, par exemple. La fréquentation, sur cette ligne, passe d’une moyenne de 15 à 26 voyageurs par circulation.

Malheureusement, en dépit du sursis accordé par la guerre aux chemins de fer secondaires du fait des pénuries de pneus et d’essence frappant l’automobile, les autorails ne pourront guère retarder la fermeture de ces lignes, si l’on songe aux Côtes-du-Nord, ou, dans les meilleurs cas comme en Provence et en Corse, leur assurer une survie dans des conditions de concurrence de plus en plus sévères.

Caractéristiques techniques des ABH

TypeABH-1ABH-2ABH-3ABH-4ABH-5ABH-6ABH-7ABH-8
RéseauProvenceIndoch.Dak-NigDak-NigProvenceCdNIndoch.Corse
Date1935-19361937194019401945194819491950
Nombre66556388
Longueur (m)20,62019,919,919,2521,0919,7220,87
Disposition essieuxB2B2B22BB2B2B2B2
Type du moteur12v140/513513/517517E517D517A517J517J517J
Puissance (ch)265265300300300300265300
TransmissionMMMEMMMM
Places assises40/4412+3212+2212+2224443640/44
AménagementsWC+BagWC+BagWC+BagWC+BagWC+BagWC+BagWCWC
Jumelage/CouplageJJJCJJCC
Masse à vide (t)26,8028,5527,6029,7525,802828,4033
Masse en charge (t)32,1534,7532,4534,2531,1534,1033,638,78
Vitesse max(km/h)7070707070707070
Autorails ABH Renault au dépôt de Nice, sur la ligne Nice-Digne. Ils assurent une partie de la relation Alpes-Azur offrant un trajet exceptionnel de Genève à Nice, dont une partie en voie métrique.
Autorail ABH en Corse encore en service dans les années 2010. Remorque Billard.
Dans la cabine de conduite d’un ABH pour un “accompagnement” privilégié par la beauté du trajet.

Les résultats obtenus en 1938.

L’augmentation du trafic voyageurs résultant de la substitution de l’autorail à l’ancien train à vapeur est en moyenne de 30 à 40 % et, dans certains cas, elle est beaucoup plus importante comme sur le réseau des Chemins de fer de Provence, sur la ligne de Toulon à Saint-Raphael où le trafic a doublé. En 1937, le parcours total des autorails à voie métrique a dépassé 12 millions de kilomètres pour l’ensemble des lignes de la France métropolitaine. La vitesse commerciale qui, en général, ne dépassait guère 20 km à l’heure avec la vapeur s’est accrue de près de 100 %. Elle est, en général, comprise entre 35 et 40 km à l’heure et dépasse même, dans certains cas, 40 km à l’heure comme en Provence et en Corse, malgré les nombreux arrêts et ralentissements pratiqués sur un profil très accidenté. Cette vitesse de plafond, qui était de 50 km à l’heure environ en traction vapeur, a pu être portée facilement à 70 km à l’heure et plus.

Toutefois, le fléau économique et social qu’est la fermeture de la quasi-totalité des réseaux en voie métrique commence à la fin des années 1930, créant une désertification de la France rurale et… d’énormes profits pour les constructeurs d’automobiles qui sauront utiliser un réseau routier d’autant plus vénéré qu’il est financé par le contribuable. Les lois dites de la “coordination des transports” de 1934 ont déjà commencé le massacre, tissant, par l’action d’un puissant lobby routier, kilomètre par kilomètre, suppression par suppression, substitution par substitution, la domination absolue de l’automobile, du transport routier, ceci pour une période indéfinie et infinie puisqu’elle dure encore en 2021 et qu’il est impossible d’en sortir sinon que par des farces techniques déplorables comme l’automobile à batteries et ses fantomatiques bornes de recharge. Les jumelles nécessaires pour les repérer ne sont pas fournies…

La plus grande extension du réseau en voie métrique avec desserte par des autorails, ceci en 1938.
Quand les BV des gares des réseaux en voie métrique étaient splendides… comme ici à Valençay, château (non loin) oblige.
La renaissance de l’autorail en voie métrique se fera, dès 1972, sur le chemin de fer de Nice à Digne avec les quatre autorails “SY”. Ici nous sommes en gare de Puget-Théniers. La remorque est une Billard.
La renaissance se fait en Corse avec le très bel autorail Soulé dans les années 1990. Ici, la gare de Corte.
Pour terminer sur une note d’espoir et d’encouragement : la présence des fameux autorails AMG-800 sur le réseau Corse à partir de 2011. AMG veut dire : Autorail Métrique Grand confort. Le pari, après quelques problèmes à la mise en service, a été gagné. Les Corses reprennent le train, les touristes aussi.
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