Bagnoles de l’Orne : gare victime des automobiles de l’Orne.

Pour ce “ouiquende”, allons prendre les eaux à Bagnoles de l’Orne, ou “B-O” pour les intimes. Il importe de remédier à nos excès gastronomiques et intellectuels, et de dépenser au casino le dernier billet de 5 euros que nous laisse notre maigre salaire, et nous plonger dans un autre monde, riche, celui-là. Ne pouvant plus y aller en train aujourd’hui, nous avons pris la bagnole qui est, comme on dit, “éponyme” avec la destination, et nous avons vu que les fossés herbeux des bords de la route deviennent subitement des trottoirs chics, que de belles barrières blanches bordent des villas sortis tout droit d’un Larousse du XIXe siècle. Nous avons vu un lac romantique abord duquel Lamartine aurait aimé pleurer….Bagnoles, belle ville dans une “Suisse normande” prospère, était un monde secret, distingué, suranné, brillant, du moins à l’époque des chemins de fer. Aujourd’hui qu’en reste-t-il ? Une gare morte, mais fleurie.

Une des toutes premières affiches de la compagnie de l’Ouest pour Bagnoles. A noter que la section de ligne de Briouze à la Ferté-Macé, mise en service la première en 1869, n’est pas encore intégrée au réseau de l’Ouest (voir plus loin ci-dessous).
Le profil en long de la ligne de Bagnoles en 1950. Le curieux rebroussement de la Ferté-Macé est bien indiqué. A noter le “montage” graphique associant les profils des lignes de Briouze à La Ferté-Macé datant de 1869, d’une part, et de La Ferté-Macé à Bagnoles, datant de 1883, d’autre part. Un reste historique qui se retrouve encore en 1950 à la SNCF ?

Repérées dès l’Antiquité, les eaux de Bagnoles de l’Orne seront remises à l’honneur durant la deuxième moitié du XIXe siècle grâce à la mode des villégiatures dans les villes thermales dont la grande bourgeoisie parisienne sera une fervente adepte, mode qui, notons-le en passant, sera aussi, pour les réseaux de chemin de fer, une excellente affaire.

Aujourd’hui encore, mais d’une manière nettement moins mondaine, Bagnoles attire une clientèle ayant des problèmes de circulation veineuse et des rhumatismes. A la fin du XIXe siècle, et  l’impulsion d’Albert Christophle, ancien ministre, Bagnoles de l’Orne devient la station à la mode des belles années 1900 à 1914. Sa gare fait à l’époque, et pour le titre de “centre du monde”, concurrence à celle de Perpignan que le peintre Salvador Dali vénérait tellement.

La gare de Bagnoles de l’Orne à l’époque de sa gloire et avec sa cour remplie de … bagnoles ! La plupart sont des petits autobus d’hôtel ou “pataches”, ou des voitures de service des nombreux établissements balnéaires. Noter l’unique voiture à cheval sur la gauche.
La gare de Bagnoles, vue coté voies dans les années 1990, quand il y avait encore trois voies de service.
Ce qui reste des voies aujourd’hui coté voies, quand il n’y a plus qu’une voie : sans commentaire, sauf qu’une maigre et dérisoire consolation existe puisque sur ces rails rouillés devenus “verts” circulent des “vélorails”. De Charybde en Scylla, de la bagnole au pédalier…

Le Grand Hôtel reste associé à l’âge d’or de Bagnoles de l’Orne : il se dresse devant le lac dès le 19 juin 1898, avec ses quatre étages et sa belle façade longue de 82 mètres. À l’époque, il est le plus moderne et le plus confortable des « palaces » avec l’électricité dans chaque chambre, le téléphone, l’ascenseur et le monte-charge. Chacune des 200 chambres, magnifiquement meublées, est pourvue de sanitaires. Au rez-de-chaussée, trois salons au style Louis XIV et une salle à manger style renaissance et une salle de café avec ses billards accueillent les grands de ce monde comme le Roi et la Reine de Roumanie (entre 1914 et 1927) ou encore Albert Ier (roi de Belgique) ainsi que des hommes politiques français comme Édouard Herriot, et tant d’autres qui composaient la clientèle de l’établissement. L’élite européenne qui a une “bonne descente” à table fait la renommée, dès le milieu du du XIXe siècle, de Bagnoles-de-l’Orne et de ses bains indispensables pour ceux qui ont creusé leur tombe avec leur fourchette. Aujourd’hui, après avoir souffert de la Seconde Guerre mondiale, le Grand Hôtel a fermé et le bâtiment a été restauré et transformé en une “Résidence du lac” avec des logements privés en “copro” comme on dit.

Le Grand Hôtel de Bagnoles de l’Orne, ouvert en 1898 avec ses jardins donnant sur le lac.
Le casino et le lac de Bagnoles, aujourd’hui.

Une gare jadis brillante et mondaine.

La gare de Bagnoles, dont le bâtiment-voyageurs est d’un bien modeste type Ouest “à trois portes”, est très active et sa cour est remplie de calèches, de “pataches d’hôtel”, puis de voitures automobiles et de petits autocars et ceci dure jusque durant les années 1930, mais, aujourd’hui, la gare est triste comme une gloire ternie, car aucun train n’y passe plus. Elle reste cependant très fleurie et proprette comme tous les bâtiments de Bagnoles.

Mais la curiosité nous attise le flair, chatouille notre nez d’historien, et cette gare nous intrigue. L’histoire des chemins de fer français va vite débroussailler le terrain et nous apprendre ce que cette gare cache.

Lorsque les grands réseaux nationaux se constituent, à la fin du XIXe siècle, les lignes secondaires sont construites et le maillage très fin des réseaux se perfectionne. Des petites villes sont atteintes, et, situées parfois en bout de ligne, notamment en bord de mer, ou au fond d’une vallée. Elles sont l’honneur d’une gare terminus – mais une minuscule gare terminus: et, sur le réseau de l’Ouest par exemple, nous sommes loin de la Gare Montparnasse ou de St-Lazare ! Mais Montparnasse ou St-Lazare, mine de rien, sont rapidement et facilement atteintes depuis ces petites gares comme celle de Bagnoles. Le réseau de l’Ouest sait faire avec des trains omnibus à tranches directes et leurs arrêts multiples dans des petites gares d’embranchement.

La ligne de Granville, grande ligne des petits embranchements et des petites gares en cul-de-sac.

La ligne de Paris à Granville un bel exemple d’une de ces lignes du réseau de l’Ouest, passée en 1909 avec l’ensemble du réseau, sous le contrôle du réseau de l’Etat par rachat. Elle n’a pas une importance nationale, mais a une grande importance régionale : elle n’a pas la chance de passer par une grande ville et doit vivre avec les maigres apports de toute une succession de localités agricoles, dans une région certes riche, mais grâce à la culture et l’élevage qui ne font jamais l’affaire du chemin de fer à qui il faut des transports de masse réguliers et permanents à longueur d’année. Surnommée la ligne du beurre et du lait, elle pénètre en Normandie à peine à 100 km. de Paris.

Entièrement posée initialement à double voie, elle est desservie de bout en bout par des express s’arrêtant dans toutes les gares de moyenne importance, et des omnibus desservant toutes les petites gares par tronçons. On devine que la vitesse commerciale des trains n’est pas une référence… Cette ligne passe son temps à enjamber des vallées : Eure, Avre, Iton, Risle, Orne, Vire, etc. Ceci lui donne un ingrat profil en dents de scie, avec des déclivités atteignant 10 à 12 mm.

Longtemps, les trains de cette ligne sont partis de la gare parisienne des Invalides, mais à la suite des agrandissements de la gare Montparnasse dans les années 1930, ils partent plus que de cette gare et circulent en tronc commun avec la ligne de Chartres jusqu’à Saint-Cyr.  La ligne reste en traction vapeur, avec des Pacific ou des 230, jusqu’à la diéselisation des années 1960-70 suivie d’une électrification partielle en courant continu 1500 V de Paris-Montparnasse à Saint-Cyr en 1937 et de Saint-Cyr à Plaisir-Grignon en 1972, puis, en un troisième temps, en courant alternatif 25 kV 50 Hz de Plaisir-Grignon à Dreux en 1984.

La ligne dessert beaucoup de gares d’embranchements desquelles partent des petites lignes transversales se terminant souvent en cul-de-sac.  Les gares d’embranchement importantes, situées sur des transversales interrégionales sont Dreux (PK. 80), où partaient jadis trois lignes vers Maintenon, Chartres et Evreux, ou encore la gare de Verneuil (PK. 117) qui avait deux lignes d’embranchement vers La Loupe et Evreux, ou encore Laigle (PK. 141), gare de bifurcation pour la transversale venant de Conches et Rouen et qui avait jadis une ligne d’embranchement jusqu’à Mortagne, mais aussi Sainte-Gauburge (PK. 156) ancien nœud ferroviaire avec plusieurs lignes à voie unique en étoile et un dépôt. Les gares de Surdon (PK. 181) et d’Argentan (PK. 197) ont conservé leur importance moyenne grâce à la transversale Rouen – Le Mans. La gare de Flers (PK 242), lui fait couper la ligne de Caen à Laval par Domfront. Mais la gare de Vire (PK. 270) n’a plus ses lignes vers St-Lô et Caen par La Besace, ou vers St-Hilaire du Harcouet. La gare de Folligny (PK. 312) est une gare d’embranchement sur la transversale du Cotentin. Et, enfin, après avoir jadis desservi cette multitude d’embranchements qui, aujourd’hui, ont pour la plupart disparu, la ligne se termine à Granville (PK. 327), la seule ville importante depuis Paris et dotée d’un port avec des services voyageurs vers les îles anglo-normandes. Manque de chance, cette longue ligne Paris – Granville traverse une des zones qui a le plus souffert de la Seconde Guerre mondiale : la plupart des gares ont été détruites en 1944 lors de la bataille de Normandie.

La ligne est construite à double voie à l’origine, mais elle a toujours fait craindre pour sa suppression, crainte qui est ravivée en 1999 quand elle est déclassée d’une manière inquiétante, réduite à une voie unique banalisée entre Argentan et Granville, totalisant une longueur de 81 km. La remise en service de la deuxième voie entre Folligny et Granville et la création d’un triangle de raccordement avec l’axe Caen – Rennes en juin 2011 redonnent de l’espoir aux fervents partisans de la ligne, car cela permet de faire circuler des trains entre Granville et Caen en évitant un rebroussement à Folligny.

A l’époque de la création de la ligne, toutes ces petites gares moyennes étaient autant d’”étoiles” régionales au-cœur d’un immense réseau à voie unique, celui de l’Ouest, et dont beaucoup de lignes rurales, qui d’abord faisaient un réseau maillé, ont été tronquées au lendemain de la Première Guerre mondiale et finissent en gare terminus dans une bourgade. Une ville comme Mortagne était au centre d’une étoile de pas moins de cinq lignes à voie unique en écartement normal, menant à Laigle par Tourouvre, à Ste-Gauburge, à Alençon, à Mamers par Bellême, et à Condé sur Huisne : de tout ceci, il ne reste strictement plus rien, pas même une gare dont on cherche en vain l’emplacement, sauf à Bagnoles. Le “grand Ouest” s’est vidé de ses petites lignes. Mais Bagnoles et sa gloire passée reste dans les souvenirs.

Le réseau de l’Ouest en 1934. La ligne de Granville dessert en finesse la partie centrale de la belle province tant aimée des Parisiens. Bagnoles est sur la petite ligne de Briouze à Couterne.
En 1937, Bagnoles est indiquée comme une gare terminus importante (document au centre) sur les prospectus du réseau de l’Etat qui a racheté le réseau de l’Ouest en 1909.

Bagnoles de l’Orne : sur une ligne réalisée en deux temps.

La ligne de Briouze à Couterne est située dans le département de l’Orne et la région de la Basse-Normandie. Elle relie les deux localités de Briouze et de Couterne par La Ferté-Macé et Bagnoles-de-l’Orne ce qui crée une relation jusqu’à Paris par Dreux d’une part, et par Alençon et Le Mans, d’autre part.

La gare de Briouze (PK. 225 de la ligne de Paris à Granville) est à 23 km de Bagnoles, et elle est parcourue en été par des voitures directes de Paris à Bagnoles-de-l’Orne, les voitures directes circulant jusque dans les années 1960.

Historiquement, c’est bien la ligne de Briouze à la Ferté-Macé qui est déclarée d’utilité publique au titre de l’intérêt local par un décret impérial du 24 juin 1868. Ce même décret approuve la convention signée le 31 août 1867 entre le Conseil Général de l’Orne et un certain Monsieur Girard pour la concession de la ligne qui est mise en service le 6 décembre 1869 par une petite compagnie du “Chemin de fer d’intérêt local de Briouze à La Ferté-Macé.”

La section de Couterne à La Ferté-Macé, une toute affaire, est déclarée d’utilité publique par une loi le 16 décembre 1875. Une loi du 31 juillet 1879 autorise le ministère des Travaux publics à démarrer les travaux de construction. Mais la foi ou les moyens, ou les deux, manquent…. et la section de Couterne à La Ferté-Macé est rétrocédée à la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest par une convention signée entre le ministre des Travaux publics et la compagnie le 17 juillet 1883. La construction peut commencer et il semble que la ligne soit ouverte en 1885 ou 1886.

Enfin toute la section de Briouze à la Ferté-Macé est intégrée au réseau d’intérêt général et concédée à titre définitif à la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest par une loi appliquée le 15 mars 1886. Voilà donc son avenir assuré, du moins en principe ! Cette ligne devenue régionale raccordait donc la ligne de Paris à Granville à la ligne d’Alençon à Domfront par La Ferté-Macé et Bagnoles-de-l’Orne, et pouvant desservir correctement le pays d’Andaine dont Bagnoles est la capitale.

Amateurs d’horaires : à vos loupes. Une donnée légendaire : la desserte ferroviaire de Bagnoles en 1913, par le réseau de l’Etat qui a racheté celui de l’Ouest en 1909 pour cause de faillite de ce dernier. La capitale de la “Suisse normande” est encore desservie depuis les gares des Invalides et de Montparnasse. On notera l’existence d’un “train direct” 463 , et de nuit partant à 22h17 et débarquant le voyageur encore endormi (et en pyjamas ?) en gare de Bagnoles à un cruel 4h07 !. Mais déjà la “bagnole” occupe le terrain à Bagnoles avec de très nombreux services d’autocars touristiques qui commencent à faire leur nid dans celui du chemin de fer.

Malheureusement la section de Bagnoles-de-l’Orne à Couterne est fermée dès le 17 février 1941 et elle est même carrément déferrée peu après la Seconde Guerre mondiale, ceci dans la grande fête du retour de l’automobile et de la prospérité, La fermeture au trafic marchandises entre Briouze et Bagnoles-de-l’Orne en chose faite en 1954 : place au camion, c’est l’avenir de l’humanité, promis, juré. C’est donc très étonnant que la section entre Briouze et Bagnoles-de-l’Orne survive et continue d’être exploitée en trafic voyageurs pour une longue période jusqu’au 26 mai 1991.

La gare de Briouze, état actuel. A gauche, ce qui reste des voies de service de la ligne de Bagnoles, et déconnectées des voies principales semble-t-il. Au fond, le raccordement direct vers la voie principale de Bagnoles et Couterne a été supprimé.
La gare de Couterne, peu après sa mise en service de 1881. Une petite locomotive-tender Ouest type 120 dite “Bicyclette” assure le service.
Même à Lonlay-le-Tesson, la plus petite gare de la ligne, on attend le train, le progrès et les lumières de la civilisation.. Noter l’unique voie de garage des wagons à marchandises et son gabarit de chargement.

Le déclenchement en marche : ou comment atteindre Bagnoles en quittant l’express de Granville sans le faire s’arrêter ?

Revenons au milieu du XIXe siècle. La construction de ligne de Granville avance très lentement. La ligne a été concédée en 1855. Mais Dreux, à 82 km de Paris, est seulement atteinte en 1864 : le quart de la ligne est construit. Vire, à 272 km de Paris, est atteinte en 1867, et Granville en 1870, soit 15 ans après la concession.

A Briouze, gare située entre Argentan et Vire, une ligne d’intérêt local est ouverte jusqu’à La Ferté-Macé dès 1869. La ligne atteint cette ville haut perchée sur son plateau et ne compte pas aller plus loin, la gare étant construite en cul-de-sac presque au centre de cette vieille ville. Mais il ne faut jamais jurer de rien… et cette courte ligne est bel et bien prolongée, en 1881, au prix d’un “plongeon” acrobatique en pente de 15 à 16 pour mille, ceci jusqu’à Couterne, et desservant au passage l’importante station balnéaire de Bagnoles-de-l’Orne.

A partir de l’inauguration de cette ligne, en 1881, le régime est de quatre à cinq allers et retours quotidiens entre Briouze et Couterne. Bagnoles, point phare de cette ligne, attire de nombreux touristes à la Belle époque : le trajet, pour les voyageurs montant en gare des Invalides à Paris, demande entre 5 et 6 heures selon les trains. Pour ne pas faire trop perdre de temps à ces voyageurs exigeants et fortunés, la compagnie de l’Ouest pratique, à Briouze, le déclenchement en marche des voitures directes pour Bagnoles, placées en queue d’un express Paris-Granville. Peu avant Briouze, le « conducteur » placé dans la guérite de la première voiture de la tranche Bagnoles actionne le système de déclenchement, lève l’attelage, et freine ses voitures, laissant le train filer en direction de Granville grâce à l’accélération alors effectuée par le mécanicien.

S’il ne rate pas son coup, il arrête ses voitures « pile poil » en gare de Briouze où, immédiatement, une petite locomotive prend la tranche en charge et l’achemine jusqu’à Bagnoles, mais en perdant quand même de précieuses minutes sur le double rebroussement de la Ferté-Macé…

S’il rate son coup et reste “en rade” avant ou au-delà de Briouze, il faut envoyer la petite locomotive aller chercher les voitures perdues en pleine voie et les ramener, discrètement et honteusement, en gare.

Le principe du déclenchement en marche type Ouest. Il s’agit, pour l’agent posté dans la guérite, de débrancher les boyaux du frein continu, puis de défaire l’attelage. L’artiste travaille sans filet. La compagnie de l’Ouest proposera à la veuve de l’éventuel défunt un modeste emploi de garde-barrière.

L’épisode Bugatti.

Notons qu’en 1937, le réseau de l’Etat ouvre deux nouveaux dépôts de Bugatti 400 ch : Versailles-Matelots et La Rochelle. Le dépôt de Versailles-Matelots nous intéresse car il assure la maintenance des autorails Bugatti 400 ch. engagés sur les deux nouvelles relations que sont Paris-Bagnoles-de-l’Orne et Versailles-Dreux.

Ce service, qui est au plus haut niveau jamais atteint pour Bagnoles, ne durera pas. La SNCF, à sa création en 1937 valable au 1er janvier 1938, sera bien obligée de faire des coupes sombres dans les services, notamment celui des luxueux autorails Bugatti et c’est ainsi qu’au service d’hiver 1938/39, on ne voit plus le service Paris-Bagnoles en Bugatti. Bagnoles n’est pas, pour autant, obligé de se passer de chemin de fer. La ville joue à un double jeu avec “joker”, puisque sa ligne de Briouze se prolonge jusqu’à Couterne, une autre gare d’embranchement située sur la ligne d’Alençon à Pontaubault par Domfront, parallèle à la ligne Paris-Granville et située plus au sud. Donc, pour Bagnoles, on peut légitimement espérer que ce qui ne viendra pas d’un côté viendra de l’autre, mais dans la réalité des faits l’essentiel du trafic se fera par Briouze et cessera avec Briouze.

Un autorail Bugatti 400 cv du réseau de l’Etat quittant la région parisienne en 1937 : cela pourrait être celui de Bagnoles-de-l’Orne.

La Ferté-Macé : une curiosité pour accéder à Bagnoles.

Une très rare curiosité ferroviaire existe à la Ferté-Macé. Lors de la construction de la ligne de Briouze à La Ferté-Macé, tout est bien qui finit bien en 1869, puisqu’il n’est pas question d’aller plus loin.

La question qui fâche, posée en 1875, est celle de continuer jusqu’à Bagnoles et Couterne, et, fâche ou pas, il faut bien se rendre à l’évidence : il n’y a pas de possibilité de continuer à traverser la ville pour la quitter par le côté opposé car la ville est sur un plateau en surplomb, dominant une plaine : pour éviter un “plongeon” peu compatible avec les bonnes mœurs ferroviaires, la voie ferrée n’a pas d’autre solution que de quitter la ville par là où elle est entrée, puis descendre à flanc de coteau pour accéder au niveau inférieur qu’est celui de la plaine. C’est en somme un assez mauvais replâtrage sur le plan topologique… mais ne commentons pas.

Les trains continuant pour Couterne ou Bagnoles à partir de 1886 doivent donc effectuer un rebroussement et, dès la sortie de la gare, et passer sur un appareil de voie donnant une position déviée. Cette déviation mène en pente de 16 pour mille maximum jusqu’à un second rebroussement situé à 600 m de là en contrebas. On peut alors de repartir en marche avant après la manœuvre de l’aiguille et, toujours en pente de 16 pour mille maximum, aller en direction de Couterne, en contournant la ville par le bas : un vrai zigzag à la manière du Central Pérou, le mal des montagnes en moins, et très surprenant dans cette calme Basse-Normandie ! Ici, prenant la relève des locomotives à vapeur, les autorails Bugatti 400 ch. des années 1937-1939 assurent le service direct depuis Paris et se livrent à cet exploit, tout comme les “Caravelles” x-4300 et 4500 de la SNCF des années 1950.

Aujourd’hui, tout cela ,a pris fin. Bagnoles n’a plus aucune activité ferroviaire sauf des “vélorails” et pas même un train touristique sur la ligne. Le rêve passe, et, comme disaient les gens lettrés des siècles passés :” sic transit gloria mundi”. A moins d’avoir fait du latin au lycée leur servait à quelque chose : placer de belles citations dans les conversations entre “gens bien”.

Le rebroussement de La Ferté-Macé. Ce n’est pas la ligne des Andes au Pérou, mais on n’est pas loin.
La gare de La Ferté Macé, gare terminus entre 1869 et 1885, donc en cul-de-sac et avec ses nécessaires plaques tournantes.
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