Ne confondons pas le train-jouet pour enfants et le modélisme ferroviaire, qui est un loisir technique pour adultes. Ce sont deux mondes différents, même si le second est né en Europe entre les deux guerres, et à partir des insuffisances du premier qui, depuis le milieu du XIXe siècle, était destiné à amuser les enfants et dont les adultes, faute de mieux, utilisaient les modèles haut de gamme en les perfectionnant parfois.
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les premières manifestations publiques d’un modélisme enfin reconnu et se voulant un « hobby », un loisir organisé et pratiqué en association, se manifestent en France alors que le Royaume-Uni a été le précurseur dès les années 1910 avec le « Model Railway Club » de Londres, un groupe de précurseurs qui crée, dès 1912, le premier réseau d’association connu dans l’histoire du modélisme ferroviaire. Ses membres se retrouvent sur les quais des gares, sur les ponts enjambant les voies, sur les remblais, font de l’observation érudite et raisonnée, équipés d’appareils photographiques à format assez petit (6×9) pour être facilement transportables, et assez commodes et faciles d’utilisation pour ne pas faire de ce loisir une activité ruineuse et complexe. Parfois aussi ils se retrouvent autour du réseau de trains-jouets que l’un d’entre eux a installé à demeure chez lui, tout en procédant à des adaptations de tracé ou des perfectionnements de matériel roulant qui préfigurent déjà une démarche de type modéliste. En France, il en sera de même, en attendant que Robert Marescot produise un matériel roulant de type réaliste, des voies, des signaux permettant de franchir nettement le pas qui les séparera définitivement du train-jouet.

Le lycée Hoche de Versailles, berceau du modélisme ferroviaire en France ?
Marescot, donc ? Certainement, mais il faudrait aussi citer une marque comme LR dont nous avons déjà écrit quelques articles sur ce site « Trainconsultant » qui, avec sa voie à traverses en bois et ses appareils de voie comme la double bretelle, vise aussi ce genre de clientèle. Un réseau en voie fer-blanc JEP ou Hornby est, à ce titre, absolument « imbuvable » pour un jeune modéliste débutant dans les années 1920. On pourra aussi, à l’époque, trouver de la voie Bassett-Lowke chez le marchand de trains Filleaud, qui, avec ses traverses en bois et ses rails en profilé est parfaite pour la pratique du modélisme de l’époque.
Autour de ces amateurs ferroviaires se constituent peu à peu des associations. En France, tout aurait commencé au lycée Hoche de Versailles, où quatre garçons, âgés d’une douzaine d’années, oublient un peu le grec et le latin, en fin d’après-midi, pour se retrouver et parler de trains : il s’agit de Robert Marescot, Marcel Debrun, André Schefer (qui deviendra le peintre Emile-André Schefer), et Jacques Henry. Prenant, avec le temps, un aspect plus formel et structuré, le groupe se change en association en 1919, prenant le nom de « Loco ». Il va donner ensuite le noyau fondateur de la fameuse Association Française des Amis des Chemins de fer (AFAC) qui doit donc une grande partie de ses origines au modélisme ferroviaire.
La naissance de l’Association Française des Amis des Chemins de fer (AFAC)
L’AFAC est créée le 9 juillet 1928 (d’après une lettre écrite par Robert Marescot le 19 décembre 1985 à Jehan-Hubert Lavie (Loco-Revue) qui rédige alors un article sur l’histoire de la production Fournereau) et, comme il est inutile de le rappeler aux amateurs, elle est toujours très active, essentiellement centrée sur le chemin de fer réel, et sa revue de référence « Chemins de fer ». Mais ses locaux situés au sous-sol de la gare de l’Est abritent toujours des réseaux en « O » qui restent, par certains aspects (tracé, voies, etc.) aujourd’hui toujours, des témoignages précieux et vivants de ce que furent les réseaux des années d’entre les deux guerres ou des années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, bien qu’ils aient fortement évolué depuis.
Revenons-en dans ces dernières années 1920. Les grands noms de l’époque, membres de l’AFAC ou non mais fréquentant les réseaux de l’association, sont ceux de Robert Marescot au tout premier plan, créateur du modélisme ferroviaire français produit d’une manière industrielle et un des fondateurs de l’AFAC comme l’est aussi son grand ami Marcel Debrun. Il y a Pierre Dohollau, Guy De la Forterie, Jean Lequesne (futur artisan), Jean Cibert, Charles Aufière, le comte Molitor, René Fournier, le peintre Emile-André Schefer, le modéliste anglais G.P. Keen du « Model Railway Club » dont il est président et qui apporte la bonne parole de ce côté-ci de la Manche, ou encore Jacques Jeunet, Pierre Laurent, ou Robert Postel et surtout Jean-Edmond Fournereau qui dans quelques années reprendra la production de Marescot en 1931 avant de créer “Loco-Revue” en 1937. Ce sont eux les précurseurs, les innovateurs.

Sont-ils, pour autant, les premiers modélistes ferroviaires en 1920 au sens où l’on l’entendrait aujourd’hui ? Certainement pas : de grandes différences les séparent de leurs descendants des années 2020. Ils ne sont pas des « compteurs de rivets », des passionnés de précision, des consommateurs de détails que seuls des modèles de la qualité d’un Lombardi ou d’un Fulgurex pourraient satisfaire. Il est certainement vrai que ces modélistes des lointaines années 1920 seraient comblés par un modèle haut de gamme du XXIe siècle d’aujourd’hui, mais ils en sont à des années-lumière quand ils posent, avec fierté, une Pacific Marescot sur les voies à trois rails sur traverses en bois très espacés de leur réseau en ovale, réseau décoré avec des reliefs en plâtre saupoudré de sciure puis peints en vert, dans un style crèche de Noël et “agrémentés” de bâtiments grossiers en Isorel découpé et peint.
Ils se contentent d’une forme générale évoquant un type réel donné, d’un nombre de roues exact (refusant de voir une Pacific dans une 120 JEP) et, si possible, d’un embiellage à contre-manivelle de commande de distribution. Ils acceptent des boudins de roue très forts, ceux du « coarse scale » (voir plus loin dans cet article pour l’explication de ce terme) de leur temps, ne connaissent pas encore le « fine scale » (idem) des années qui suivront la Seconde Guerre mondiale – car le destin leur réserve une autre guerre à affronter. Ils acceptent le troisième rail, parfois en le déplaçant sur le côté de la voie à la manière de la banlieue Etat ou du métro. Ils ne ballastent pas systématiquement les voies, et ils ne trouvent rien à redire à des « grandes lignes » aux traverses espacées comme celles d’un secondaire en voie métrique. Bref, ils ont l’esprit large…. Mais on les comprend, quand on sait par où ils sont passés, survivant aux déceptions cruelles créées par un train mécanique CR et son ovale de voie en fer-blanc.
Le plus détesté par les modélistes : l’aiguillage à pivot central.
Un appareil de voie réel (appelé à tort “aiguillage” par le grand public) se compose de la “pointe” et du “talon”. Des rails mobiles, ou “aiguilles” se déplacent pour diriger les trains roulant de la “pointe” au “talon”.
Ce système réel, simple et parfait, sera malheureusement ignoré, pour des raisons de coût par les fabricants de trains-jouets et sur voie en fer blanc. Ils utilisent tous un appareil de voie très simple, n’ayant qu’une pièce mobile pivotant grâce à un levier de commande, et qui tolère l’absence de toute norme de roulement précise imposée par les roues en tôle montées “folles” sur les axes métalliques des essieux. L’inconvénient de cet appareil de voie est qu’un train, survenant par le talon et sur la voie non donnée, déraille puisque ne trouvant subitement plus aucun rail en continuité sous lui. L’enfant doit donc soigneusement positionner ses appareils de voie. Les déraillements étaient donc très fréquents.
Les modélistes, eux, utilisent des appareils de voie tout à fait conformes aux appareils réels et dont seulement deux rails, formant des pointes ou des “aiguilles” au véritable sens du mot, se déplacent pour venir coller contre la face interne des rails et dévier les trains en douceur. Si un train vient de la voie non donnée et par le “talon”, il ne déraillera pas : simplement ses roues pousseront les aiguilles et pourront rouler normalement. On appelle cette action “talonner” les aiguilles. Cette action, dans la réalité, reste limitée à certaines conditions spéciales (circulation lente sur voie unique, etc) mais elle est mécaniquement normale.
Il est à noter que, dans le monde du train-jouet en France et en écartement “0”, Hornby le premier proposera, en 1955, des “aiguillages talonnables” et qui seront même à télécommande électrique. JEP en fera autant, à partir de 1955 en “00” et 1958 en “0”, avec sa magnifique voie sur traverses en plastique. D’une manière générale pour les trains en “00” puis “HO” et dès la fin des années 1930 avec 20 années d’avance (comme le Hornby “Dublo” de 1938, tous les appareils de voie seront talonnables comme en réalité. Le train-jouet en “00” marque donc un grand progrès technique à tous points de vue par rapport au “0” , même pour les marques populaires comme Jouef, et se veut une démarche vers le modélisme.


Les premières pratiques modélistes.
Dans ces années d’entre les deux guerres, les trains-jouets ont très fortement évolué, s’éloignant de la naïveté infantile pour tenter de ressembler aux trains réels, et ils se prêtent, du moins pour les trains-jouets haut de gamme, à des pratiques s’approchant d’une démarche modéliste, à condition de leur faire subir des modifications parfois importantes. Quant au monde des modèles réduits, il existe et a trouvé ses marques, ses repères, avec la démarche de Bassett-Lowke au Royaume-Uni ou de Marescot en France : de très bons modèles, assez précis, ou des pièces détachées pour construire, des magasins spécialisés, voilà les bases d’un loisir technique déjà en place techniquement, même si, socialement, il n’est pas encore reconnu et reste assez confidentiel.
Les amateurs, désormais, utilisent des modèles à moteur électrique, et sont attachés à la présence de mécanismes de qualité qu’ils savent apprécier et même perfectionner. Avant tout, ils font rouler, et tiennent à ce que cela roule. L’outillage, autour du réseau, est devenu important et une abondante réserve de visserie, de pièces détachées d’origines diverses, montre que la pratique du modélisme est bien devenue technicienne jusque dans l’utilisation de normes précises pour les organes de roulement ou l’écartement.

Le réseau est, lui aussi, très présent désormais, et sa voie à rails en profilés et à traverses en bois est installé à demeure, mais avoue, il faut le dire, l’influence encore forte du train-jouet avec un tracé circulaire parfois simpliste, la voie à trois rails avec conducteur central, un relief en « crèche de Noël » fait de papier fort saupoudré de sciure et peint de couleurs vives, des bâtiments en bois assez grossiers et proches de la maison de poupée.
Ces « chevaliers du refus », comme nous les appelons dans notre livre «1915-2015, un siècle de trains miniatures“, Éditions LR presse, sont ces adultes amateurs de trains réels qui désirent les retrouver sous la forme la plus fidèle possible, sur un réseau en « O » ou en « I » installé en permanence chez eux, et qui ne disposent, faute de mieux, que de trains-jouets pour enfants disponibles dans le commerce courant. Alors ils achètent, avec une moue dubitative, ces trains-jouets en coffret, ou ils redécouvrent celui de leur propre enfance dans un grenier poussiéreux, et ils refont le monde, armés de cisailles, de scies, de pinces, de tournevis, de marteaux et d’un fer à souder.



Dans les années 1930 à 1950, on a scié, en long et en deux, des trop courtes et pataudes voitures dites « Forestier » de chez JEP pour en faire une longue avec deux courtes, mais on a aussi traité de la même manière les 131T du même fabricant pour en faire des 141-TC Nord satisfaisantes ou les BB-12000 de Hornby pour en faire des BB-12000 presque à l’échelle. Certains esprits audacieux allaient jusqu’à construire des voitures en teck de la CIWL de grande longueur, en réalité sur deux bogies à trois essieux, ceci à partir de trois caisses de voitures courtes Märklin en « 0 » qui, chacune et aujourd’hui, valent une petite fortune. Les locomotives toutes désignées d’avance pour le sacrifice ne pouvaient être que les « Coupe-Vent » ou les « Pacific PLM » Märklin (valeur actuelle approchant les 10.000 euros sur le marché de la collection…) souvent perfectionnées avec des pièces détachées comme celles vendues par Bassett-Lowke au Royaume-Uni, ou par Fournereau en France, qui, charitablement mais sournoisement, apportaient sur leurs catalogues un choix irraisonné de tampons, attelages, supports d’essieux, cheminées et dômes de prise de vapeur, soupapes, soufflets, mains-montoirs, roues à rayons de tous diamètres, qui permettaient d’accomplir la transformation avec quelques chances de succès. Des magasins parisiens comme Paz & Silva, ou aussi Mestre & Blatgé se sont orientés vers le modélisme dont ils ont compris l’intérêt et la particularité.





Le passage des normes du train-jouet au “coarse scale” puis au “fine scale”.
Avant de nous plonger dans cette passionnante période, accordons nos violons.
Les anciens trains-jouets en tôle ne prétendaient pas être des maquettes exactes, et donc n’étaient pas à une échelle précise. Il y avait des gammes de trains dont la taille allait croissant avec le prix, donc avec l’écartement des rails. Souvent chaque marque avait sa gamme d’écartements, ses propres profils de rails et de roues, et les roues étaient libres sur les corps d’essieux, l’écartement minimal étant simplement garanti par estampage à la presse d’ergots empêchant les roues de se rapprocher les unes des autres au point de tomber entre les rails. La confusion du public entre marques et systèmes de roulement était totale et Märklin, vers 1890, imposa sur son catalogue une dénomination standardisée des écartements.
Pour des rails de même écartement : le plus gros était le « III » (trois), le « II » (deux) moyen et le « I » (un) le plus petit. Puis, avec l’exiguïté des logements, le « 0 » (zéro) s’imposa vers les années 20. Ensuite, vers la fin des années 30, le « 00 » (zéro-zéro) devint à la mode en étant deux fois plus petit que le « 0 ». Si le « 00 » persiste en Angleterre, il devint, sur le continent, le « HO » (ou « half 0 » = demi-zéro). Depuis 1964 le « N », encore plus petit, existe et connaît un certain succès. Enfin, le très petit « Z » a vu le jour en 1972. La course à la miniaturisation semble s’être arrêtée.
Le positionnement précis des roues, désormais fixées sur les corps d’essieu, commence à imposer des normes entre les deux guerres. Si les roues en tôle libres et “flottantes” des trains-jouets (en rouge sur le schéma ci-dessous) ne répondent à aucune norme autre que l’écartement entre faces internes des rails, avec les roues en métal moulé emmanchées à force sur l’essieu, les normes de l’époque s’imposent avec des distances entre faces arrière des roues qui sont précises. C’est l’époque du “coarse scale” (terme anglais, avec toutes nos excuses) ou “norme grossière”, avec des roues à gros boudin (en bleu sur le schéma ci-dessous). Puis, dans les années 1950-1960 arrive en France et en Europe, et sous l’influence anglaise et surtout américaine, le “fine scale” ou norme fine (en vert), avec des boudins de roue très fins, et un guidage très précis sur les appareils de voie. Notre article, ici, concerne donc les modèles en “coarse scale”.






Robert Marescot, le pionnier.
Robert Marescot (1896-1988) est un pionnier du modélisme ferroviaire en France. Né à Versailles, il fait des études d’ingénieur en fabrication mécanique. Passionné de trains miniatures, il fait partie d’un groupe de passionnés qui prend le nom de « Loco », notamment avec son ami Dubreuil dont le grand réseau en « O » installé à Versailles est le lieu de convergence du groupe.
Ce qui nous intéresse ici est que Marescot devient producteur trains miniatures à partir de 1922, mais non de trains-jouets naïfs, mais bien de trains traités presque à l’échelle qui passent, à l’époque, pour de véritables maquettes destinées à une clientèle de modélistes ferroviaires.
La gamme offerte n’est pas étendue, et se réduit à une locomotive type 220 inspirée des 220 américaines série 2851 à 2856 du réseau de l’Etat de 1900, une Pacific Etat classique du type mis en service en 1913, une rame de voitures Etat et un fourgon assorti du type de 1910. Et l’on peut penser qu’il est l’inventeur d’un système d’inversion à distance qui, dans les publications de l’époque, porte bien son nom. L’auteur Henri Girod-Eymery appelle de tous ses vœux le « système Marescot » dans son livre « Les chemins de fer modèles aux écartements O et HO », écrit avec Jean Falaize, paru en 1948 chez « Documents et collections d’art », et ce livre reste le plus beau témoignage de cette époque. La lecture, pour cette raison, en est passionnante et indispensable.


Jean-Edmond Fournereau sait faire souffler l’esprit et créer “les années Fournereau”.
En 1931 Jean-Edmond Fournereau, grand connaisseur du monde ferroviaire et du train miniature, rachète l’ensemble du fonds Marescot, y compris les pièces détachées, les modèles montés, les stocks et l’outillage. Robert Marescot lui cède le tout pour reprendre, lui, une affaire dont il vient d’hériter de son père récemment décédé. Jean-Edmond Fournereau connaît non seulement très bien Robert Marescot, mais tout aussi bien sa production pour avoir travaillé dans l’entreprise qui a compté jusqu’à 80 personnes. Il est très habile pour fabriquer des modèles réduits exacts, et l’agence lui en commande pour servir de publicité dans les vitrines ou d’ornement sur les bureaux des dirigeants. C’est ainsi qu’il réalise des avions, puis des trains, car c’est bien le chemin de fer qui l’intéresse fondamentalement, et, toute sa vie durant, il restera fidèle à cette passion.
En 1931, Jean-Edmond Fournereau crée son premier modèle, une 131T du réseau de l’Etat très réaliste conçue en reprenant des éléments du châssis de la Pacific Etat, et dès 1932, c’est la mise sur le marché d’un nombre impressionnant de modèles comme la 241 Est, une des plus belles locomotives françaises qui, à l’époque, est mise en service sur le réseau de l’Est après de longues années d’essais du prototype sorti en 1925. Puis Jean-Edmond Fournereau suit de très près l’actualité ferroviaire, avec des Pacific Etat reproduisant les modèles réels obtenus à partir de transformations faites par Chapelon, avec des “Superpacific” Nord transformées, mais aussi des 241 PLM et une 141-TD Etat. Il existe dès lors deux catégories de produits : les “modèles courants”, fabriqués avec des matériaux moins chers (comme le bois pour les caisses des wagons) et faisant l’objet d’une finition plus simple, et les modèles dits “Superdétails” tout métal, réalisés en petites séries sur commande. Les années suivantes voient l’accumulation de modèles passionnants se poursuivre, avec, entre autres, des machines pour lignes secondaires et trains express ou omnibus comme une 230 Etat, et une autre du Paris-Orléans, et une très belle 140 Etat (future 140 C SNCF).
En 1937 il crée “Loco-Revue” qui, entre autres qualités, deviendra la meilleure revue de modélisme ferroviaire en France et le restera, toujours la meilleure aujourd’hui. Mais il poursuit la production de nombreux modèles à la demande ou sur commande spéciale, comme ceux qui sont produits pour le Musée des Arts et Métiers ou celui des Travaux Publics.
En 1948 ses deux fils Jean et Jacques Fournereau créent leur propre SARL sous le nom de « JFJ » dévolue à la fabrication de modèles réduits prêts à rouler ou en « kit ». En 1949 un nouveau véritable catalogue apparaît. La gamme d’avant-guerre est presqu’intégralement reprise, et les locomotives sont mues par le moteur A-50, première version du fameux moteur T-55. Du coté des modèles, la 141-P et 141-R Fournereau reflètent la nouvelle tendance de la SNCF. C’est en 1950 que la firme déménage à Auray en Bretagne, où, aujourd’hui, Loco-Revue est toujours publiée par les éditons LR-Presse. Mais le recul du « 0 » devant le « H0 » n’encourage guère la firme à se convertir dans ce nouvel écartement et à lutter contre un JEP, un Jouef naissant, ou un Hornby qui a des projets, et Jean-Edmond Fournereau se concentre sur Loco-Revue dont son fils Jean-Lucien reprendra la direction (et restera fidèle à cette immense tâche jusqu’à son décès en 2002). Aujourd’hui le groupe LR-Presse qui comprend de nombreuses revues autour de Loco-Revue, est dirigée par Christian Fournereau, fils de Jean-Lucien Fournereau. On dit que le palais de Buckingham sera à vendre avant LR-Presse….







Que sont les modèles Fournereau ?
Les accessoires et pièces détachées sont, en fait, la base d’un système de production et de commercialisation : ils permettent à l’amateur de s’approcher des produits de la firme en déboursant de très petites sommes pour commencer, et pour s’initier et se mettre en confiance en faisant des premiers pas très faciles dans le modélisme ferroviaire qui, à l’époque, est surtout une activité de construction de modèles. On peut pratiquement tout acheter : tout ce qui entre dans la fabrication d’un modèle peut être commandé et acheté à l’unité comme les roues, les engrenages, les moteurs, toutes les pièces de fonderie, et même les matières premières et la visserie, ou le petit décolletage.
La conception des modèles Marescot et des modèles Fournereau, qui en ont pris la suite, est caractéristique, comme ceux de Gaume, ou de Munier, ou Lequesne, des méthodes des fabricants de modèles réduits des années 1930. La fabrication fait appel à l’emboutissage de la tôle d’acier à la presse, et à la fonderie en plomb-carat puis au zamac. Il n’y a pas de lithographie, contrairement au cas des fabricants de jouets, ou même contrairement à Bassett-Lowke au Royaume-Uni qui lithographie ses voitures et ses wagons.
La présence d’une main-d’œuvre nombreuse est déterminante pour ces techniques qui ont recours à de petites machines, et les ateliers de la firme Fournereau comptent jusqu’à une dizaine de personnes. Tout est fait sur place, à partir des matières premières, ce qui demande plusieurs spécialisations professionnelles dans les ateliers et une bonne qualification du personnel employé, comme du tournage, de l’ajustage, de la fonderie, de l’électricité et du bobinage, et même de la peinture.
L’alimentation électrique des modèles se fait en trois rails courant alternatif avec inverseur à levier ou par relais à surtension, en reprenant donc directement le système éprouvé des trains-jouets. Plus tard, des cellules redresseuses sont incorporées pour permettre le fonctionnement en courant continu, mais le moteur T 55 est à aimant permanent et ne fonctionne qu’exclusivement en courant continu.
Les collectionneurs connaissent aussi d’autres détails comme, à la fin des années 40, le passage à la fonderie au bronze pour les roues, ou encore le recours à la feuille de laiton pour les corps de chaudière sur les derniers modèles. La qualité de la décoration, de la peinture, des marquages, et des finitions reste exemplaire. C’est pourquoi le Musée des Arts et Métiers, pour constituer sa collection de modèles réduits retraçant l’histoire du chemin de fer en France, fait appel, dans les années 1930-1940, aux meilleures firmes de l’époque, et notamment les Ets. Fournereau.



La fin des produits destinés à une élite.
Il est certain que les prix de ces premiers véritables modèles ne peuvent pas se comparer à ceux des trains-jouets Hornby ou de JEP. Prenons le catalogue de 1937, époque où la production est bien assise et les prix déterminés. La 030T Boer Fournereau est vendue 450 francs, la moins chère des Pacific Etat est à 750 francs, tandis que les très belles et importantes locomotives se situent en 1.000 et 2.000 francs de l’époque (soit proche des euros actuels). Les voitures et wagons se situent entre un minimum de 60 francs, et atteignent, pour les modèles les plus élaborés, 200 francs. Les pièces détachées ne dépassent guère la dizaine de francs.
Chez JEP, par exemple et pour la même année, les trains électriques complets valent de 210 à 750 francs, ce dernier cas étant le prix de la « Flèche d’or », tandis que le plus beau des autorails, le grand « triple bleu » coûte, en coffret complet, jusqu’au même prix de 750 francs. Donc, la Pacific Fournereau la moins chère coûte le prix d’un train « Flèche d’or » complet, ce qui est méritoire – mais la différence est que, chez JEP il n’y a rien de plus à convoiter, alors que chez Fournereau, on en fait qu’entrer dans le monde du désir, modestement placé, en pouvoir d’achat, au pied de l’escalier…. Et ajoutons que les 750 francs de la « Flèche d’or » ou de la Pacific Fournereau de base représentent assez exactement le salaire mensuel d’un ouvrier qualifié de l’époque.
La boucle est bouclée : parti avec une inspiration très club fermé à l’anglaise, s’inspirant du très chic « Model Railway Club » londonien, le modélisme en France est arrivé, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, au point où cet itinéraire ne pouvait que l’y mener : un loisir pour « messieurs bien ». Cela n’a rien de condamnable en soi, évidemment, mais cette situation porte en elle les germes mêmes de ses difficultés économiques à venir : produit de haute qualité pour un public restreint et exigeant, le modélisme dépend de l’existence de ce public et de son impossibilité de croître numériquement pour atteindre une dimension garantissant l’existence d’une production industrielle rentable. A la moindre montée du coût des matériaux ou de la main d’œuvre, l’édifice se fragilise, et à la moindre diminution ou désaffection dans les rangs de la clientèle, l’édifice vacille. Les deux effets vont se conjuguer de la manière la plus funeste, quelques années plus tard, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, avec la disparition des grands fabricants français de modèles en « 0 » jointe à la disparition de cette échelle. Il y aura bien, ultérieurement pendant les années 1970-1980, un retour pour le «0», mais sous la forme d’une fuite en avant dans l’hyperréalisme des modèles et des prix, et aussi un éparpillement dans d’éphémères productions artisanales, une chute du nombre de pratiquants, et une « niche » réservée à des modèles importés et peu accessibles financièrement.



Contrairement à une opinion très répandue dans le grand public, et conformément à ce qu’ont démontré les historiens de l’économie, les guerres ne constituent que très rarement, pour ne pas dire jamais, des limites, des ruptures, des passages d’une période à une autre. La Première Guerre mondiale est déjà précédée par les graves crises économiques que l’on lui impute, et, une fois la guerre terminée, le processus des bouleversements économiques demande beaucoup d’années pour se remettre en place, ne démarrant qu’à la fin des années 1920, et apparaissant souvent comme étant la conséquence des crises qui ont existé avant la Première Guerre mondiale.
En ce qui concerne le domaine historique qui nous intéresse ici, celui du train miniature, cette Première Guerre mondiale ne change rien, fondamentalement, et, même, on voit une firme comme la future JEP mettre au point et lancer son écartement « 0 » en 1915, créant ainsi la nouvelle base de son système. Il est vrai qu’en Allemagne, la guerre fait fermer la firme Carette. Jean Carette, est né en France, et préfère venir vivre la guerre dans son pays natal, il faut le préciser : ce n’est donc pas une décision économique. La guerre fait aussi disparaître Schoenner et d’autres belles firmes qui perdent leur clientèle aisée dans la tourmente. Mais les membres du club « Loco » de Versailles créent leur association en 1919, en prenant pour source d’inspiration l’association « Model Railway Club » londonienne de 1912 dont ils ont gardé l’esprit en tête et dans leur pratique modéliste.
Dès 1946 ou 1947, les grandes firmes comme JEP ou Hornby, ou encore LR, reprennent leur fabrication, et redonnent vie aux projets d’avant-guerre, surtout pour JEP qui avait préparé, avant la guerre, son programme en « 00 » et le lance sans perdre de temps, avec des modèles des années 1938-1940 comme la voiture Etat allégée (dite « saucisson ») et la 232-R étudiée par l’OCEM.
Notons ce fait complètement oublié : JEP est bien la seule firme, durant cette deuxième moitié du XXe siècle, à avoir commercialisé une voiture en “H0” qui soit exactement à la bonne longueur, soit 270, mm : il s’agit une voiture DEV dite “Forestier” de la SNCF. Toutes les autres marques, y compris les plus prestigieuses, ont raccourci leurs voitures en les traitant à une échelle du 1:100e.

D’autres fabricants réussissent à percer dans le domaine très fermé du modélisme en “0”.
Fournereau n’est pas seul, dans cette spécialité, et, dans les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale, d’autres marques se lancent, comme Munier. Cette firme artisanale est fondée à Compiègne, 21 Ave de la Marne, à la fin de l’année 1948 et elle offre, dans ses premières publicités, des pièces en «0 » pour la construction amateur de modèles réduits ferroviaires comme des roues, des boîtes d’essieu. Elle propose aussi des moulages au sable à la demande. Puis elle se spécialise dans le matériel roulant à l’échelle « 0 » de type maquette, tout métal, vendu à monter ou prêt à rouler . Une des premières productions, en 1949, est un wagon couvert KKuw à monter et composé de pièces en bronze, suivi d’une voiture Est à monter, elle aussi en métal moulé et pour l’échelle « 0 » toujours. Les locomotives type 222T et 141TC Nord en « kit » bronze ou montées apparaissent dans les publicités de 1949, avec des voitures Nord ou Est en « kit » métal moulé. La 230 D Nord sort en Juin 1950, suivie de la 141 R pour Noël de la même année. Les voitures « Forestier » SNCF avec des A8, A3B5, B8, B9, C10, et voitures-restaurants CIWL à l’échelle ou raccourcies sortent pour la fin de 1952. En 1953 apparaît le fourgon DEV unifié et des voitures à 2 essieux C6t. La production a cessé progressivement vers la fin des années 60, et les voitures ont été reprises par l’artisan lyonnais Guillermet.


Il faudrait aussi citer Robert Gaume qui est un artisan installé au 25, Rue Saint-Sébastien, dans le 11ème arrondissement de Paris à la fin des années 1930 et il construit, à la demande, pour des amateurs ou des musées, des modèles réduits ferroviaires dans les écartements « 00 », « 0 » et « I ». Il vend aussi des pièces détachées à l’échelle. En 1946 Robert Gaume crée sa marque « Les Modèles Français » et il poursuit la construction de modèles pour l’écartement « 0 » qui, bien que commençant à être supplanté par le « 00 » puis le « HO », reste l’écartement noble par excellence, celui pratiqué par les modélistes ferroviaires exigeants et fortunés. Les choix de Gaume se portent sur des modèles de prestige: locomotives de vitesse, matériel grandes lignes, produits à l’unité et pour quelques dizaines d’exemplaires chacun. Les « Pacific » D ou G du PLM sont à l’honneur sous la forme de nombreuses versions et marquages: 231 D 207, 231 G 270, mais aussi les anciennes « Coupe-vent » du PLM, ou encore les très fines « Atlantic » Nord, ou les plus rares 141E à F du PLM produites tardivement. Bien sur la 241 C 1 du PLM reste la pièce maîtresse. Les modèles sont de construction à la fois très soignée, mais très robuste puisqu’en laiton, bronze et acier épais. Les peintures et marquages sont soignés. Les embiellages sont complets, et les nombreux détails du corps cylindrique (tuyauteries, pompes, réchauffeurs) sont finement reproduits. Actuellement, sur le marché de la collection, une 241 C Gaume peut être vendue plus de 3000 Euros, et les autres modèles entre 1000 et 2000 Euros, ce qui place ces modèles parmi ce qui est recherché et apprécié.


D’autres firmes comme le “Kilomètre 108” ont proposé des “kits” en “0. Véritable pionnier du « kit », mais en bronze, ce détaillant parisien propose une CC 7001 en 1953, mais aurait aussi proposé d’autres modèles plus confidentiels dès les années 1946 : 141P, BB 8100, etc. Ces kits étaient, toutefois, très difficiles à monter, le bronze moulé n’étant pas facile à souder…
Le « 00 » à l’horizon, créateur d’une nouvelle époque.
Né en Allemagne et au Royaume-Uni avant la Seconde Guerre mondiale, le « 00 » aurait du naître en 1939 ou 1940 en France : le mouvement n’a pas été tué par la guerre, mais simplement retardé, comme beaucoup de choses l’ont été dans l’industrie. Le redémarrage économique de l’après-guerre, tant pour l’automobile réelle que pour le matériel roulant de la SNCF, se fait donc avec les modèles d’avant-guerre. La situation est donc comparable, en 1945, à ce qu’elle était en 1939 pour le train miniature : d’une part, toujours les mêmes grandes firmes françaises et toujours les importations allemandes qui reprennent, pour le train-jouet, et, d’autre part, pour le modélisme, toujours la prééminence de Fournereau, la reprise des importations britanniques.
Le grand facteur de changement, mais qui n’est que la suite d’un processus amorcé dès le milieu des années 1930 en Allemagne, est que le « 00 » est dans tous les esprits, et notamment celui des artisans en puissance qui voient en cet écartement la meilleure des motivations pour s’installer à leur compte, mais aussi dans les bureaux d’études des grands industriels du jouet, puisqu’il est tout aussi présent dans l’esprit des enfants et des modélistes de l’époque. Le “00” s’impose, mené par Märklin ou Trix en Allemagne, et par Hornby au Royaume-Uni sous sa marque “Hornby-Dublo”, comme né d’un grand progrès technique et d’une conception très poussée. Le “0” prend un coup de vieux, et les marchands de jouets reprennent les anciens coffrets en “0” pour un prix dérisoire, ceci pour aider les clients à acheter du “00” dont les prix de vente sont très élevés.


La Pacific Antal pionnière du « 00 » français.
Ce modèle réduit – car ce n’est pas un train-jouet – est, sinon la cause d’un grand bouleversement, du moins le symbole visible qui l’accompagne et le caractérise dans la France de l’après-guerre. Locomotive mythique, elle est le seul modèle de type vapeur française de grande diffusion dans une échelle nouvelle pendant des années et des années. Nous nous devons d’en parler ici, car elle est conçue en 1943, et elle est donc bien un produit de l’époque de la guerre, et conçue dans l’esprit modéliste d’avant la guerre.
Modèle réduit ou train-jouet ? Avec un rare opportunisme et un tout aussi rare savoir-faire, elle joue sur les deux tableaux visant et atteignant le marché des adolescents comme celui des modélistes ferroviaires : elle est d’emblée tout autre chose que les naïves locomotives Hornby ou JEP des années 30 à 50 avec leur caisse en tôle lithographiée posée sur un mécanisme-moteur à quatre roues, mais c’est aussi et surtout une vraie Pacific à 12 roues avec un tender à bogies, une forme exacte, des détails précis et suffisants. Ce coup de maître est joué par Antoine Alaverdhi, un artisan qui propose, dès 1943, cette locomotive populaire qu’est la Pacific PLM à la clientèle des modélistes dans une France pourtant en pleine guerre. Il faut du courage et de la conviction, mais cet homme a les deux qualités.
Alaverdhi choisit très sciemment une locomotive connue, presque “passe partout” au yeux du grand public comme des modélistes, mais jolie, équilibrée, très française (élément très appréciable en ce lendemain de guerre) que jamais les modèles de type allemand Märklin, en dépit d’excellentes qualités mécaniques, ne pourront offrir. Cette locomotive joue bien son rôle de leader – pour ne pas dire de « locomotive » – en créant autour d’elle une dynamique qui profitera à VB, PMP, Gérard-TAB, et d’autres artisans qui démarrent leur production après la guerre. Elle met le « 00 » à la mode, crée la fascination, attire les foules dans les magasins de modélisme qui reprennent, pour vendre la Pacific Antal, les trains-jouets en « O » pour une somme dérisoire. De nombreux garçons, fascinés, apportent ainsi des trésors Märklin, JEP ou Hornby, pour repartir avec un coffret Vuillaume, et JEP pousse les feux de ses bureaux d’études pour s’engouffrer, dès que possible, dans ce créneau prometteur qu’est le « 00 », et qui ne tiendra pas ses promesses, et contribuera sérieusement à la faillite de la grande firme.
Vendu comme modèle de base ou « avec superdétails », le modèle comprend ou non un éclairage avant et des tuyauteries supplémentaires sur la chaudière. Il existe même une version « super amateur » avec un “détaillage” encore plus complet. En 1959 le catalogue “Baby-Trains” propose la locomotive à 16 500 frs, soit le double du prix de la 050 TQ Gérard-TAB à 9 500 frs, ou de la VB à 8 900 frs: elle est donc très chère, et quatre fois et demi plus chère que la 231.C Jouef vendue 3 600 frs dans les grandes surfaces d’alors. La production semble avoir cessé en 1967-68, laissant à Jouef une domination absolue sur le marché du modélisme ferroviaire français, domination partagée avec JEP et Hornby pour quelques années encore de survie à l’ombre de Jouef.





Les détaillants parisiens, eux, se sont lancés “à fond” dans le “HO”. Parmi eux, le souvenir de “Baby-Train” est immuable, notamment avec son “patron” dit “le père Perrin”, un personnage haut en truculence et ancien agent de police cycliste passionné de trains miniatures. Fondée en 1952, le magasin Baby-Trains était, pendant les années 1960, une incroyable caverne d’Ali-Baba, pleine de trains miniatures, de choses introuvables ailleurs, de pièces détachées, de matériel neuf et d’occasion. Lieu de rendez-vous des modélistes « branchés », même en plein Mai 68, le magasin était situé au 5, Rue du Petit Pont et l’arrière-boutique permettait, par un couloir de jonction, de passer dans le magasin voisin où l’accumulation de choses incroyables valait le voyage. Personnage pittoresque et bien parisien, à l’argot accompli et haut en couleurs, le « Père Perrin » avait une profonde fibre modéliste et a produit lui-même un certain nombre de modèles à monter, mais d’une manière assez confidentielle et difficiles à souder. La première création est le train « Arpajonnais » en HOm, puis viennent un autorail Schneider à 2 essieux avec sa remorque (type musée de Mulhouse), un autorail à impériale, puis de très nombreux autorails en « kit » bronze comme un FNC, un 300 ch « Picasso », un ABJ, un De Dietrich, etc. D’autres modèles suivront : 130 PLM, 220 coupe-vent PLM, des caisses de BBB 6002, CC 1100, 2D2 « Waterman », CC 65500, etc. La production de ces « kits » cesse durant les années 1960 et le magasin ferme pendant les premières années 1980. Le catalogue Baby-Trains était, à l’époque, un ouvrage de référence.

D’autres établissements comme “JL” fondée par Jean Laffont au début de 1949 au 132, rue de Rivoli, à Paris 1er, proposent une gamme très étendue de voitures et de wagons à construire, des voies, des caténaires, et offre de nombreuses pièces détachées pour la construction amateur type maquette à l’échelle « HO » incluant l’usage de matériaux typiques de l’époque comme le bois ou le carton associés au métal. Devenue JLB en 1975 par le rachat effectué par Jean-Louis Bourlois, la marque cesse ses activités peu après.

Il faudrait aussi citer « Le Disque Rouge », crée par R. Duchesne, installée au 31, bis, rue de Paris, à Pantin durant les années 1950. Le catalogue comprend de nombreux signaux en « HO », un bloc-système complet, mais aussi des bâtiments, des accessoires pour réseau comme des passerelles de gares, des pylônes d’éclairage pour gares de triage, des passages à niveau avec maisons de garde et barrières ouvrantes. Cette production se retrouve sur beaucoup de réseaux d’époque et marque, pour bien des modélistes quittant leur train-jouet en « O », une véritable conversion à la fois technique et esthétique. C’est sans nul doute cette dernière dimension qui fait le succès du “HO” : le sentiment qu’en passant de l’ancien monde du “0” au modèle réduit en “HO”, on fait un bond en avant avec un repositionnement technique important.


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