La question servant de titre pour cet article pourrait servir de titre pour la politique actuelle en matière de production énergétique de notre indispensable électricité nucléaire ou “verte”, mais que le lecteur se rassure : le “1937”, présent dans le titre, mettra tout le monde à l’aise : il ne s’agit donc que de l’histoire du chemin de fer.
La traction électrique est perçue, dans les revues ferroviaires de la fin des années 1930, comme la Revue Générale des Chemins de Fer, comme le mode qui inéluctablement dominera le « chemin de fer de demain », du moins si l’on s’en tient aux arguments techniques évidents de la puissance, du rendement, des performances, du moindre coût en entretien et de la conduite, de la disponibilité, etc.
Ce que la traction électrique a démontré jusque-là, c’est-à-dire pas grand chose.
Le réseau du Midi a démontré, des décennies durant et chiffres à l’appui, que les rapports de coûts totaux entre la traction vapeur et électrique sont de 1 à 0,6 à égalité de kilomètre-train, et même de 1 à 0,5 en tenant compte de la charge moyenne plus élevée réellement transportée en traction électrique, comme on peut le lire dans l’excellent ouvrage « Histoire de la traction électrique » (Machefert-Tassin, Nouvion, Woimant) éditions La Vie du Rail. Tome I, Page 516. Mais le Midi, même après sa fusion avec le PO en 1934, est, en 1937, le moins bien placé des réseaux français sur le volume global transporté, ne desservant que des régions faiblement urbanisées ou industrialisées. Les autres grands réseaux nationaux, comme le Nord, l’Est, ignorent la traction électrique, tandis que le PLM et l’État n’ont guère électrifié que des lignes de banlieue ou de montagne.
Cela veut dire que les affirmations techniques en faveur de la traction électrique n’ont pas encore, en 1938, trouvé l’illustration concrète sur le terrain d’un réseau gros transporteur qui pourrait séduire les détenteurs de capitaux devenus très rares durant les années de crise que sont les années 1930.
La traction électrique ne décolle pas vraiment durant les années 1930, en dépit des électrifications effectuées, et elle reste une vision d’avenir, une passionnante expérience technique, une vitrine technologique, dirait-on aujourd’hui. Le réseau électrique des années 1930 n’a rien de comparable avec, par exemple, le réseau TGV d’aujourd’hui qui, en moins d’une dizaine d’années, a bouleversé le chemin de fer français.

L’électrification Paris-Le Mans, le chef-d’œuvre de Raoul Dautry, qui dirige le réseau de l’État, ne s’effectue que dans le cadre d’un “plan Marquet anti-chômage”. Soyons bien clairs sur ce point qui, pour le moins, montre bien qu’une électrification n’est rien d’autre qu’un perfectionnement d’appoint accepté sous la réserve qu’il soit financé par la collectivité, mais nullement un cas d’urgence.
Les caisses des réseaux sont vides, aussi, et l’idée de grands investissements n’est plus de mise. La traction électrique est mal vue de la part des dirigeants des réseaux : elle est le “cheval de Troie” qui cache la sollicitation de capitaux publics qui ne pourront qu’accroître la dépendance des réseaux vis-à-vis de l’État français, alors que perfectionner la traction à vapeur, c’est rester dans le domaine traditionnel des investissements moindres et internes que les réseaux connaissent depuis un siècle. Charbonnier est maître chez lui… et les réseaux marchent au charbon…
Mais Raoul Dautry va le démontrer.
Raoul Dautry (1880-1951) est un ingénieur « visionnaire », et, comme directeur du réseau de l’État, son chef-d’œuvre est l’électrification Paris-Le Mans effectuée en 1937. Après ses études à l’École polytechnique (promotion de 1900), il entre au chemin de fer, avouant n’avoir d’autre choix que l’église (mais il n’a pas la foi, dit-il) ou l’armée (mais il n’a pas la carrure physique, étant très petit, constate-t-il), et, puisqu’il ne reste, comme grand corps de l’État, que le chemin de fer, il commence une belle carrière à la compagnie des chemins de fer du Nord.
Lors de la Première Guerre mondiale, il crée la « Voie des cent jours » au départ de Beauvais : il met au point un système de « dispatching » des trains permettant aux armées de se rendre rapidement en renfort, très attendu sur le front de l’est pour la bataille de la Marne. Après la guerre, il est directeur général de l’administration des chemins de fer de l’État entre 1928 et 1937. Avec une énergie et une autorité dont les cheminots de l’État se souviendront, Dautry redresse la situation du réseau et en fait une véritable “vitrine technologique” qui crée la surprise, tellement ce réseau véhiculait une image indécollable d’une bureaucratie incompétente, image soigneusement entretenue par la presse et donc l’opinion publique. En redressant un réseau de l’État alors à la dérive, Dautry rend crédible et possible la nationalisation du chemin de fer français.
La “dautrite”, maladie professionnelle (non reconnue) sur le réseau de l’Etat.
Il faut dire que Dautry est un redoutable meneur d’hommes. Il organise même, au petit matin dans un des bois publics parisiens, des rencontres sportives et matinales, avant l’heure d’aller au bureau, et destinées à ses ingénieurs et collaborateurs pour “mieux faire connaissance” … c’est-à-dire, en clair : voir exactement ce qu’ils valent et quelle est leur résistance au stress. Bref, c’est très moderne.
Mais il sait aussi se déplacer rapidement sur l’ensemble du réseau et débarquer, inopinément, dès potron-minet (comme on dit à l’époque) dans une petite gare perdue tranquillement sur une LDFT (comme on ne dit pas encore) et tirer de son lit un chef de gare qui ronfle encore du sommeil du juste, ou sortir du Café de la Gare le chef de dépôt dégustant un petit blanc matinal pour se remettre en forme. Formé d’une seule voiture-salon attelée à une puissante “Mountain” État (type Est), son train spécial sait emmener Dautry partout là où il ne faudrait pas trop qu’il soit et crée, chez les cheminots de tous grades, une sorte de psychose accompagnée de sueurs froides que l’on appellera la “dautrite”. Quand un chef de gare, qui vient de se faire avoir, veut prévenir un collègue qui va se faire avoir… c’est déjà trop tard : Dautry est déjà passé et “a eu”. Nous recommandons la lecture du livre “Raoul Dautry (1880-1951) : le technocrate de la république” de Raoul Baudoui paru chez Balland en 1992.
Dautry, ministre courageux en des temps troublés.
En 1938, la toute nouvelle SNCF fait appel à lui, et il devient membre de son conseil d’administration. Toutefois, d’autres fonctions urgentes attendent Raoul Dautry et l’éloigneront du chemin de fer : il est ministre de l’Armement du 20 septembre 1939 au 16 juin 1940 sous les gouvernements d’Édouard Daladier et de Paul Reynaud. C’est lui qui mettra en place une mission en Norvège pour chercher le stock disponible d’eau lourde au nez et à la barbe des Allemands qui le convoitent et qui leur échappera. Ne pouvant venir en France, ce stock sera entreposé au Royaume-Uni pendant la guerre. Fidèle à l’État, y compris sous le régime de Vichy, Raoul Dautry ne peut pas supporter la défaite suivie de l’Occupation, et c’est ce qui lui fera renoncer à toute vie publique et politique. Il se retire dans sa maison de Lourmarin (Vaucluse).
Charles de Gaulle, à la Libération, fait de lui son ministre de la Reconstruction et de l’Urbanisme dans le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF), ceci du 16 novembre 1944 au 20 janvier 1946. De Gaulle ne s’est pas trompé, et Raoul Dautry fera, une fois encore, la preuve de ses qualités et confiera à l’architecte Auguste Perret la reconstruction de la ville du Havre.
Devenu administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Raoul Dautry choisit le site du centre CEA de Saclay dont Auguste Perret construit les bâtiments. En 1946, il est élu à l’Académie des sciences morales et politiques, et il est aussi nommé grand officier de la Légion d’honneur. Il finira sa vie paisiblement en retournant à Lourmarin dont il est le maire et le grand réorganisateur de la petite ville.

Le réseau Ouest-Etat avant l’ère Dautry : le paralytique fusionne avec l’aveugle ?
Ce réseau est le dernier grand réseau crée en France. Il est formé de la fusion du réseau de l’Ouest, qui vit très mal jusqu’à ce moment béni, et du réseau de l’État, qui n’a pas eu, non plus, une situation brillante jusque-là. Prononcée en 1909, l’union de ces deux exclus de la richesse ferroviaire française fera-t-elle mieux que celle de la fable du paralytique et de l’aveugle ? Il faut croire que oui, car le réseau de l’État, surtout avec Raoul Dautry durant les années 1930, parviendra à un niveau très enviable, et prendra sa place dans la cour des grands pour montrer, par sa gestion exemplaire, la voie à suivre pour la nationalisation.
La création du premier réseau de l’État originel se fait en 1878 lors d’un grand débat national sur le statut des chemins de fer, débat qui, en fait, couve depuis l’origine des chemins de fer en France. Prévue par le détail dès le début des années 1930, la nationalisation est une idée ancienne et la création de la SNCF en 1937 avec effet pour le 1ᵉʳ janvier 1938 est bien le terme de cette longue évolution.
Le réseau de l’État apparaît comme un champ expérimental (on dirait aujourd’hui une « vitrine ») qui doit démontrer, devant l’opinion et les grands réseaux, qu’une gestion directe des chemins de fer par les pouvoirs publics ne peut être que bénéficiaire pour la collectivité nationale. Si des pays comme la Suisse l’ont compris dès la fin du XIXe siècle, la France hésite encore et ce n’est que la faillite des réseaux avec la crise des années 1930 qui, en fin de compte, met un terme à un siècle de capitalisme privé.
Un réseau de l’Etat mais « par défaut ».
Le réseau de l’État apparaît en 1878 dans des circonstances tout à fait hasardeuses et bien fortuites. Au début des années 1860, le Second Empire concède des lignes d’intérêt local, trop peu productives au goût des grandes compagnies, à des financiers davantage attirés par les subventions promises que par le goût de construire et d’exploiter des chemins de fer.
Le scénario est invariable : une fois la construction terminée, les spéculateurs se retirent et la Chambre républicaine, élue en 1877, charge le ministre des Travaux Publics d’assurer la continuité de l’exploitation des lignes en faillite en attendant leur reprise ultérieure par l’une des grandes compagnies. Cette loi du 18 mai 1877, bien que faite à titre provisoire, demeure l’acte législatif fondamental du Réseau de l’État jusqu’en 1937.
À l’origine, le Réseau de l’État n’est pas un ensemble cohérent, et il se borne à réunir 2615 km de lignes dispersées dans les Charentes, la Vendée, les régions de Nantes et d’Orléans, construites sans aucun plan d’ensemble, mal reliées et complètement isolées de Paris, et gérées d’une manière autonome jusqu’en 1882, année où cet ensemble est rattaché au budget général de la nation, voté par le Parlement. Le réseau est alors un, parmi d’autres, des services spéciaux de l’État qui s’administrent eux-mêmes, avec un budget propre, comme la Monnaie, l’Imprimerie Nationale ou la Caisse des Dépôts.
En 1895, ce réseau sort de la situation provisoire issue des textes de 1878 et 1882. Le ministre des Travaux Publics Edmond Guyot-Dessaigne statue par décret sur l’organisation définitive de l’exploitation du réseau, nommant un Directeur de réseau qu’il maintient sous son autorité immédiate. C’est à cette époque que commence à se diffuser l’idée que les transports ferroviaires constituent une sorte de service public, que chaque région a droit à son désenclavement, quelle qu’en soit la rentabilité économique.
Le rachat du réseau de l’Ouest : quand l’Etat se met à faire des (bonnes ?) affaires.
Le rachat du Réseau de l’Ouest voté en 1908 et effectif en 1909 procède de la même manière de voir les transports publics. En effet, à partir de 1891, la Compagnie de l’Ouest, en proie à de graves difficultés financières, ne doit sa survie qu’aux avances de l’État au titre de la garantie d’intérêt. Condamnée à exploiter son réseau sans espoir d’augmenter les dividendes avant la libération de plus en plus lointaine de sa dette, la Compagnie de l’Ouest ne peut trouver de raison d’être, n’ayant aucune possibilité de développer son trafic, d’investir dans un matériel roulant nouveau, et d’engranger des bénéfices.
Pendant dix ans, la Chambre des députés examine, sans se laisser convaincre, des projets de rachat de l’Ouest et éventuellement d’autres réseaux, proposés par des députés radicaux. À la suite de l’accroissement de trafic occasionné par l’Exposition Universelle de 1900 auquel le réseau ne peut faire face, la situation de la Compagnie de l’Ouest est désastreuse, notamment vis-à-vis de l’opinion publique, car le réseau est paralysé et incapable de faire face à la demande de transport.
C’est sous Georges Clemenceau, qui inscrit le rachat de l’Ouest dans son programme de gouvernement, que le ministre des Travaux Publics Louis Barthou dépose un projet de loi de rachat qui sera effectif le 13 juillet 1908. Il est à noter que ce rachat de l’Ouest n’est pas un succès ni des socialistes ni des partisans de la nationalisation des chemins de fer, car l’État ne rachètera pas d’autre réseau, mais gèrera, dans l’urgence, celui de l’Alsace-Lorraine lors du “retour” de 1919.
Ce rachat de 1909 est le fruit du travail de politiques qui ne trouvent pas d’autre solution, les négociations menées par le ministère avec la Compagnie pour un rachat partiel par l’État et le PO n’ayant pas abouti. Les budgets du réseau de l’Ouest et de l’ancien Réseau de l’Etat resteront distincts jusqu’en 1917 pour prouver la rentabilité virtuelle du réseau qui sera exploité comme toute entreprise industrielle. Or le rachat de l’Ouest fait du « grand Réseau de l’État » le deuxième réseau français par son étendue après le PLM.
La naissance d’un réseau modèle.
La loi de finances du 13 juillet 1911 donne au réseau une organisation administrative et financière considérée comme définitive, avec une gestion par le ministre des Travaux Publics, qui nomme le Directeur, les chefs de service et les membres du Conseil de réseau, et au Parlement qui vote le budget du réseau comme budget annexe.
La Première Guerre mondiale le plonge, à partir de 1917, dans une crise grave. Le réseau mobilise à lui seul autant que tous les autres réseaux réunis, ce qui lui pose très vite un sérieux problème de main d’œuvre. Le gouvernement le charge de centraliser les commandes de combustibles et de matériel pour les industries considérées comme stratégiques et pour une partie de la population civile. Des ateliers du réseau sont transformés en usines d’obus. Epargné par les destructions, le réseau doit en revanche assurer des transports militaires très importants, notamment pour l’armée anglaise et à partir de 1917 pour l’armée américaine, ce qui perturbe son trafic commercial.
Après la guerre, le réseau a du mal à reprendre vie, avec un taux de matériel endommagé très élevé, et un personnel surabondant et sous-qualifié que l’État, qui doit donner l’exemple, a massivement embauché à la suite de la loi de 1919 sur la journée de huit heures de travail. Le retour à une activité économique normale provoque un brusque accroissement de la demande de transport auquel le réseau ne peut répondre.
Les grèves se multiplient sur le réseau à partir des redoutables années 1920 et, vraiment, ruinent l’image de marque d’un réseau qui tient, pourtant, à se démarquer de l’injustice de ce que les réseaux privés appellent “un réseau de fonctionnaires”. Le décret du 16 novembre 1926 arrive à point nommé pour libérer le réseau des contraintes de la comptabilité publique et lui donne beaucoup plus d’autonomie financière. Le réseau pourra-t-il enfin devenir un vrai réseau et lutter à armes égales avec ses concurrents ?
L’ “Esprit Nouveau” sur le réseau de l’État avec Raoul Dautry.
Le 17 octobre 1928, nous le savons déjà, Raoul Dautry est nommé Directeur général du Réseau de l’État. Il le restera jusqu’en 1937, appliquant une pensée originale où un « Esprit Nouveau » se situe entre le libéralisme et le socialisme selon la manière de placer le curseur, pratique une “organisation scientifique du travail” et une “efficacité économique”, sans renoncer “au maintien des droits sociaux”. Aujourd’hui certains hommes d’État aimeraient…
Dès les premiers mois, Dautry réussit à dynamiser le réseau et à y créer une “atmosphère nouvelle” (sic) qui ira jusqu’à modifier la perception du réseau par le grand public. Dautry mise tout d’abord sur la vitesse pour préserver le trafic, et il rationalise les itinéraires et les correspondances. Il crée en 1933 des bureaux d’études du travail, des méthodes et de l’outillage, ceci dans chaque atelier afin de procéder à un examen minutieux des conditions d’exécution du travail, puis un laboratoire pour l’étude des problèmes du travail humain, composé de médecins et de techniciens du réseau.


Dautry songe aussi aux grandes électrifications du réseau, dont celle de Paris au Mans sera le point de départ dès 1937, sous la forme d’une électrification réalisée de manière exemplaire et à un très haut niveau de technicité. En 1938, lors de l’intégration du réseau de l’État dans celui de la SNCF dont il devient alors la région Ouest, le total des locomotives et des engins moteurs est de 3942 unités, et 422 locomotives accusent plus d’un demi-siècle d’âge ! Mais la moyenne d’âge du parc du réseau de l’État est, en fait, très basse avec seulement 23,91 années, car le réseau, avec Dautry, a fait un important effort de reconstruction de locomotives de type 231 durant les années 1930 et surtout en 1933 et 1937. C’est ainsi que 137 locomotives de type 230 ont une année au plus et 153 de type 231 ont 5 ans au plus en 1938. Bien entendu, les 23 locomotives électriques 2D2 engagées pour Paris-Le Mans sont neuves : le total des locomotives âgées de moins de 10 ans est de 14,4% pour le réseau de l’État contre 9,2% pour le Nord ou 7,1% pour l’Est.
Les 2D2-500 État, magnifiques championnes du Paris-Le Mans.
Les 2D2-500 État, puis 5400 SNCF, feront le succès de l’électrification Paris-Le Mans dont elles seront, pendant les premières années, les locomotives très emblématiques grâce à des campagnes de publicité du réseau de l’État, faites avec un rare savoir-faire, notamment en matière d’édition, de graphisme, de mise en page.






Commandées par le réseau de l’État en 1935 et livrées de décembre 1936 à début 1938, ces locomotives auraient dû former une série de 25 machines. Elles seront construites par les sociétés CEM, pour ce qui est de l’équipement électrique, et Fives-Lille, pour ce qui est de la caisse et l’équipement mécanique. Toutefois, les deux dernières locomotives, qui devaient être fabriquées par l’industrie allemande au titre des dommages de guerre 1914-1918, seront construites sur le modèle des 2D2-5000 du Midi.
Donc les 2D2 État seront produites à 23 exemplaires, mais aussi, elles doivent beaucoup aux fameuses 2D2 de la série E-503 à 537 du PO dont elles sont directement issues, à ceci près qu’elles ne sont pas équipées du freinage par récupération, ni du freinage rhéostatique, la ligne du Mans étant plus facile que celles du PO. Les quatre moteurs sont entièrement suspendus, et peuvent être alimentés en série, en deux séries de deux moteurs en parallèle, ou totalement en parallèle. Les transmissions Buchli, elles, sont bien conservées sur les machines État.

Les “Cyclopes” attaquent, mais gagneront, finalement, un oeil supplémentaire.
Les 2D2-État diffèrent des machines PO par l’esthétique des cabines de conduite signées par l’architecte industriel Henri Pacon qui les rend plus aérodynamiques, les débarrasse des capots des machines PO, et surtout leur dessine un unique phare qui surmonte un sifflet mal placé, ce qui leur vaut le surnom de « Cyclope » du nom du géant légendaire de l’antiquité qui n’avait qu’un œil (voir l’Odyssée d’un certain Ulysse pour les amateurs de belles lettres antiques que ce site a l’honneur de compter parmi ses lecteurs).
Notons que les « Cyclopes » recevront un deuxième « œil » à l’occasion des Grandes Révisions Générales SNCF des années 1962 à 1965, avec un éclairage unifié à deux feux et un avertisseur placé sur le toit. En outre, et comme pour les 2D2-5500, leur vitesse est portée de 130 à 140 km/h par l’adoption de boîtes à rouleaux. Formant une série de 23 exemplaires, elles passeront l’essentiel de leur carrière sur leur ligne de prédilection, mais, dans les années 1960, la SNCF les fera aussi circuler sur d’autres lignes de sa région Sud-Ouest avant de les retirer du service à partir de 1975. La SNCF les renumérotera dans la série des 2D2-5401 à 5423 en 1950.
Si, à la construction, les locomotives sont peintes en un vert foncé rehaussé d’un filet jaune puis rouge en bas de la caisse et autour des ouvertures, lors des grandes révisions générales SNCF, elles sont repeintes en vert-bleuté foncé et les faces frontales reçoivent une « moustache » en alliage poli qui sera aussi et surtout dotée du fameux macaron rond de la SNCF.




La mort des 2D2-État, puisqu’elles sont monocourant.
Notons que le déclin de ces belles 2D2 est lié à l’électrification du Mans à Laval et Rennes en 1965, en courant monophasé 25 kV 50 Hz. Donc les 2D2-5400 ne peuvent poursuivre au-delà du Mans et doivent céder le pas d’abord aux locomotives à vapeur, notamment les 241-P du Mans, puis aux nouvelles BB-25200 et BB-25500, qui sont, elles, des bicourants.
Les 2D2-5400 seront mutées, entre 1965 et 1969, dans des dépôts comme ceux de Paris-Sud-Ouest, Tours-Saint-Pierre et Bordeaux, où elles sont finalement regroupées en 1969. Les révisions sont stoppées en 1976, condamnant à mort ces locomotives au fur et à mesure de l’épuisement de leur parcours qui aura totalisé, pour la 2D2-5401, pas moins de 6 370 512 km.






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